Geneviève de Galard, « l’Ange de Điện Biên Phủ », est décédée

Par Epoch Times avec AFP
1 juin 2024 10:30 Mis à jour: 1 juin 2024 10:35

On l’a surnommée « l’Ange de Điện Biên Phủ ». Infirmière engagée en Indochine, Geneviève de Galard, décédée jeudi à 99 ans, est devenue une héroïne malgré elle, s’imposant dans un monde d’hommes par son courage et son abnégation.

« On parle souvent de ‘sexe faible’. (Cet épisode) a permis de se rendre compte que le sexe faible n’était pas celui qu’on pensait… », racontait-elle en souriant bien des années plus tard. Elle n’avait rien oublié de ce printemps 1954 où l’artillerie Viêt-minh pilonne sans relâche le camp retranché : le bruit « d’enfer » des tirs, la puanteur et la chaleur étouffante de ces boyaux de terre, les noms de « ses chers » blessés…

Seule femme présente sur place, elle a survécu à ce fiasco militaire, devenu un cimetière à ciel ouvert pour environ 3000 soldats français. « Au milieu de cette défaite collective, il y a eu Geneviève de Galard », résumait en juin 2022 sur France Inter Marie-Laure Buisson, qui a consacré un chapitre de son livre Femmes combattantes à l’infirmière. « C’est une très grande héroïne. »

Une de Paris Match

La France et le reste du monde découvrent le 5 juin 1954 cette jeune femme brune aux yeux bleus de 29 ans. Tout juste sortie de l’enfer, elle fait la Une de Paris Match, habillée d’une combinaison verte de parachutiste. L’hebdomadaire titre « La France accueille l’héroïne de Điện Biên Phủ ». La photo fait le tour du monde.

Née à Paris le 13 avril 1925, Geneviève de Galard-Terraube a grandi dans une vieille famille aristocratique. Un aïeul aurait combattu avec Jeanne d’Arc. Elle perd à neuf ans son père, officier. Un deuil douloureux, qui la rend très sensible à la souffrance d’autrui.

Devenue infirmière, elle a déjà géré des situations difficiles en Afrique quand elle signe en 1953 un contrat de convoyeuse de l’air et se porte volontaire pour l’Indochine. Elle accompagne dans les Dakota médicalisés les blessés depuis Điện Biên Phủ mais, avec les bombardements incessants, les évacuations deviennent très difficiles.

Geneviève de Galard, l’infirmière de Dien Bien Phu, pose le 30 avril 2004 dans la caserne du 1er RE de la Légion Étrangères à Aubagne, devant un pionnier. (Photo GERARD JULIEN/AFP via Getty Images)

Le 28 mars, son avion se pose acrobatiquement. Endommagé, il ne redécollera jamais. Armée d’une simple trousse de premiers secours et de sa foi indéfectible, elle officie à l’antenne chirurgicale.

Elle refait des pansements à la lumière de lampes de poche, administre des piqûres au Phénergan, réconforte les blessés, des hommes souvent plus jeunes qu’elle au regard « d’enfants égarés ». « Quand vous descendez dans mon abri, mon moral remonte de 100% », lui murmure l’un. « Quand ce sera fini, Geneviève, je vous emmènerai danser », lui promet un légionnaire, amputé des deux bras et d’une jambe.

« Le bruit des bombardements était infernal et, lors de l’accalmie du matin, on savait que d’autres brancards allaient nous arriver », raconte-t-elle en 2014 à l’AFP. Parfois, il n’y a plus rien à faire. Certains meurent dans ses bras.

Elle devient mère, sœur, amie, gagnant le respect et l’admiration de tous. Sur place, elle est faite chevalier de la Légion d’honneur et reçoit la Croix de guerre. À la chute du camp le 7 mai, elle demande à rester jusqu’à l’évacuation des derniers blessés mais est finalement poussée dans un avion pour quitter Diên Biên Phủ. « Qu’est-ce que nous allons devenir sans nos yeux bleus ? », lui lance un soldat.

« Je n’avais fait que mon devoir »

De retour en France, elle se retrouve brusquement confrontée à une immense popularité. « Que je n’avais jamais ni voulue, ni recherchée. Je n’avais fait que mon devoir. »

Conviée par le Congrès américain – « la première invitation de ce genre depuis Lafayette », s’enorgueillissait son mari Jean de Heaulme, officier épousé en 1956 – elle est accueillie comme un chef d’État et décorée à la Maison Blanche de la Médaille de la Liberté, plus haute distinction pour un étranger.

Surnommée « L’Ange de Diên Biên Phủ » par la presse, elle parcourt le pays pendant trois semaines et descend Broadway sous les confettis devant 250.000 New-Yorkais. « J’ai alors eu l’impression d’être tout à la fois actrice et spectatrice. » Fuyant les honneurs, elle repart vite en mission et retombe dans un relatif anonymat qui lui convient très bien.

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