Le gouvernement de Gabriel Attal est nommé mais la difficulté demeure à l’Assemblée faute de majorité, et pourrait même s’être aggravée avec une partie des troupes macronistes et des alliés remontée contre une droitisation assumée.
L’équipe Attal, un « nouveau cap », comme l’avait promis Emmanuel Macron ? « Le sens politique de tout ça, pour l’instant, on ne le perçoit pas. Pour quelles réformes, quelle stratégie politique et quelle suite à donner à cette législature ? On ne le saura éventuellement qu’avec la prise de parole du président et le discours de politique générale » de son Premier ministre, réagit auprès de l’AFP le député Horizons Frédéric Valletoux.
Le gouvernement Attal fait la part belle à la droite : Rachida Dati et Catherine Vautrin sont venues s’ajouter aux ex-LR passés chez Macron depuis 2017, Bruno Le Maire, Sébastien Lecornu et Gérald Darmanin.
De quoi réjouir l’aile droite du groupe Renaissance. « Le gouvernement, le ton qu’a employé Gabriel Attal et cette première composition ministérielle répondent non seulement beaucoup plus aux attentes des sympathisants du président, mais rejoignent aussi ses premières décisions, qui sont sur les attentes majoritaires des Français », estime auprès de l’AFP le député Renaissance et ex-LR Robin Reda. « L’électorat du président en 2022 n’était pas l’électorat de 2017, et la France de 2022 n’était pas celle de 2017 », insiste le député de l’Essonne, qui siégeait au groupe LR lors de la précédente législature.
« Une bombe à fragmentation »
Un avis cependant loin d’être partagé par l’ensemble du groupe Renaissance. « C’est une bombe à fragmentation que le président a décidé de jeter », fulmine un député macroniste de la première heure, particulièrement remonté contre la nomination de Rachida Dati, « une personne éthiquement et moralement radioactive ».
Cette droitisation assumée « déséquilibre fortement notre majorité », poursuit cette source pour qui « la question d’un groupe séparé de (l’aile gauche) de Renaissance est maintenant posée », alors même qu’elle ne l’avait pas été, selon lui, après la loi immigration, sur laquelle 20 députés du parti présidentiel avaient voté contre et 17 s’étaient abstenus. Mais « je pense que c’est le pari du président de la République que personne n’aura le courage d’aller jusqu’au bout », ajoute cet élu. Ce qu’une députée de l’aile gauche sollicitée par l’AFP semble confirmer : la création d’un groupe « n’est pas du tout à l’ordre du jour. On attend de voir la photographie finale du gouvernement ».
Du côté des alliés, ça tangue également. Le MoDem ne compte qu’un seul ministre dans l’équipe resserrée : Marc Fesneau, reconduit in extremis à l’Agriculture. Comme Horizons, avec Christophe Béchu. « On a le sentiment que la loyauté n’est pas forcément récompensée », glisse un député du parti d’Édouard Philippe.
« Le bon coup politique »
Mais si Horizons assume son orientation à droite, il en va différemment du parti de François Bayrou, lequel avait déjà fait part de ses « interrogations » sur le profil de Gabriel Attal, invoquant « l’expérience nécessaire » pour Matignon. Une analyse que le parti centriste juge confortée par la composition du gouvernement annoncée jeudi. « D’aucuns vivent avec la conviction profondément ancrée que la France penche à droite. Ce n’est pas ce que nous pensons », explique un cadre du MoDem.
« Je vois bien le bon coup politique qui a été fait » en tentant d’affaiblir un peu plus Les Républicains (LR), poursuit cette source. Mais en majorité relative, l’exécutif « aurait pu se préoccuper de ce qui pouvait rapporter des voix à l’Assemblée. Or Dati et Vautrin ne rapportent pas des voix des députés LR ». « Il est certain qu’à chaque débauchage, il y a une crispation du groupe LR. On peut donc s’attendre à un groupe LR plus réfractaire qu’il ne l’est habituellement », confirme un stratège du parti de droite.
Motif de rupture au sein de la majorité ? Le député MoDem Richard Ramos a plaidé vendredi pour une liste autonome aux élections européennes. Pour « que l’on marque clairement notre différence », explique le député du Loiret, alors qu’avec son gouvernement remanié, « le président de la République a réinventé l’UMP ». « Il ne faut pas prendre trop au sérieux les colères du MoDem », modère un député Renaissance, qui conseille d’« attendre la liste des secrétaires d’État ».
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