Inclure les enfants handicapés à l’école, un défi quotidien lorsque les moyens ne le permettent pas

Par Epoch Times avec AFP
7 février 2025 13:02 Mis à jour: 7 février 2025 13:06

Violences, épuisement, incapacité à faire classe… Partout en France, des enseignants expriment leur désarroi face à l’impératif d’accueillir des enfants en situation de handicap sans disposer des moyens adéquats.

À Bretigny-sur-Orge, à une heure au sud de Paris, des enseignants, accompagnants scolaires spécialisés (connus sous le signe d’AESH) et des parents ont créé un collectif, Enseigner sans en saigner, pour interpeller les autorités et le public.

Réunis un soir dans une école primaire de la ville, des enseignantes décrivent leur quotidien : crachats, morsures, coups de pied, cris, tentatives de fuites de l’école de certains enfants qui ne bénéficient souvent pas des AESH auxquels ils ont droit. S’occuper de ces élèves – une tâche qu’ils soutiennent tous et ne veulent en aucun cas remettre en question – mobilise toute leur attention et les empêche de s’occuper des autres enfants, ceux qui par exemple ne peuvent aller seuls aux toilettes.

« On a développé une ultra-vigilance qui crée des dégâts psychologiques » explique Marion Drouet, membre du syndicat Sud Education 91 et du collectif.

Un manque d’accompagnants face à la hausse d’élèves handicapés

Depuis la promulgation il y a 20 ans de la loi sur le handicap qui instaure la priorité à la scolarisation des enfants « en milieu normal », le nombre d’élèves présentant un handicap inscrits dans des écoles, collèges ou lycées ordinaires a triplé pour atteindre plus de 430.000 en 2022. Mais la hausse des accompagnants ne suit pas. Il manque des centaines d’heures d’AESH à Brétigny-sur-Orge, par exemple.

Romane Boussier, professeure d’EPS du collège Paul Éluard de la ville, compte par exemple une élève souffrant de troubles relationnels autistiques dans l’une de ses classes, et son accompagnante n’est là que pendant la moitié des cours. « L’élève me parle constamment et me pose 56 questions, et j’ai du mal à gérer les autres 29 élèves », témoigne celle qui, parfois, perd patience.

Bretigny-sur-Orge est loin d’être unique. À Fontainebleau ou Rennes aussi, enseignants et parents protestent contre le manque d’AESH et de places dans les instituts médico-éducatifs spécialisés.

Chloé Enfrun, professeure en maternelle à Rennes, membre du Collectif pour une école réellement inclusive, explique « avoir passé l’essentiel de l’année avec un enfant ultra sensoriel et en souffrance dès qu’il y a trop de bruit ». « L’enfant faisait des crises pendant lesquelles il pouvait faire mal aux autres élèves ou à lui-même avec des réactions imprévisibles. Il fallait le maîtriser physiquement », souligne cette enseignante, qui confie avoir peur « qu’un drame se produise ».

Dans son département d’Ille-et-Vilaine, quelque 800 enfants en situation de handicap l’an dernier étaient en attente d’un/e AESH, entre autres manques. Les AESH sont devenus le deuxième métier de l’Éducation nationale, avec 78.816 agents (en équivalents temps plein) en 2023, en hausse de 90% depuis 2013, mais ces AESH sont malgré tout trop peu nombreux et ils ne sont quasiment pas formés, en plus d’être peu payés.

« On a fait de la quantité, mais pas de la qualité »

Dans un rapport publié en septembre, la Cour des comptes saluait le fait que l’Éducation nationale ait ouvert largement ses portes aux élèves handicapés, mais soulignait des lacunes dans leur prise en charge. « Depuis les différentes lois » sur le handicap et l’école inclusive, « on a fait de la quantité mais pas de la qualité, et toute la communauté éducative en pâtit », déplore Guislaine David, secrétaire générale du Snuipp FSU, interrogée par l’AFP.

« Dans certains cas, les enseignants se trouvent démunis pour gérer notamment des enfants avec des troubles du comportement. Il faut trouver des solutions », reconnaît Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’Autonomie et du Handicap, interrogée par l’AFP.

La ministre de l’Éducation Élisabeth Borne a promis la création de 2000 postes d’AESH en 2025. Le gouvernement teste par ailleurs dans quatre départements des Pôles d’appui à la scolarité (PAS) qui permettent de coordonner et mobiliser toutes les ressources d’éducation spécialisée. Au vu de premiers retours positifs, une extension du dispositif est envisagée.

Les syndicats et associations de parents demandent pour leur part, outre plus d’AESH, des enseignants spécialisés, plus de formation pour préparer les enseignants à accueillir les enfants à besoin spécifique, des classes et programmes moins chargés, entre autres.

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