Mutilé à la machette, a perdu sa mère et la jambe droite à trois ans, mais continue de « courir pour survivre », avec punch et humour. Il crève l’écran dans un documentaire Netflix sur les jeux Paralympiques, « Rising Phoenix », dès mercredi.
Il appelle sa prothèse de course sa « Bugatti » et sourit à la vie sous le soleil du stade d’Antibes, où l’a rencontré l’AFP pour un entraînement. Alaize (29 ans), enfant du Burundi adopté par une famille française, dévoile comment il a été sauvé par l’athlétisme, une leçon qu’il aimerait partager.
« Pendant des années, chaque fois que je fermais les yeux, j’avais des flashes, je voyais ma mère se faire exécuter devant moi », raconte le champion de sprint et de saut en longueur handisport, en faisant le signe de se trancher la gorge avec la main: elle a été décapitée sous ses yeux à la machette, pendant la guerre civile au Burundi, en octobre 1994. Il avait trois ans.
On a couru, on a couru…
Le garçonnet tutsi a été laissé pour mort, coupé au cou, au dos (il en garde une grande cicatrice), au bras droit et à la jambe droite par ses voisins hutus. Il s’est réveillé à l’hôpital, amputé.
« Avec ma mère, on a couru, on a couru, mais on n’a pas réussi à courir loin, on s’est fait exécuter à 40 mètres de la maison », se souvient-il.
Courir… Il a le déclic une grosse dizaine d’années plus tard, pour ses débuts dans un club d’athlétisme de la Drôme, où la course lui offre sa première nuit sans cauchemar depuis l’attaque.
« Dès mes premiers pas sur la piste, j’ai eu l’impression qu’il fallait que je coure le plus longtemps possible, pour ne pas qu’on me rattrape », rembobine Alaize derrière ses lunettes de soleil miroir très Miami, où il vit désormais.
Le sport ma thérapie
« Je me rappelle comme si c’était hier ma première nuit après cette séance, c’était… waouh! je m’étais vidé l’esprit, j’étais libre, poursuit-il. Mon énergie, ma haine, étaient concentrées sur la piste. »
« J’ai compris que le sport pouvait être ma thérapie », résume « JB ».
Il avait essayé l’équitation, jusqu’au sixième galop, il aimait ça, « mais c’était mon cheval qui se défoulait, et pas moi », rigole-t-il.
La psychologue, ça n’avait pas trop marché non plus. « Elle me faisait faire des ronds et des carrés, s’amuse Jean-Baptiste, au bout de quelques séances je lui ai dit que j’avais envie de changer de méthode… »
Il préfère celle de son prof d’EPS, qui l’a dirigé vers l’athlétisme après sa spectaculaire « remontada » pour remporter le 4×100 m de son équipe, en étant le dernier relais. Ses camarades ne savaient pas qu’il était amputé, il le cachait, souffrant déjà assez « du racisme. On m’appelait bamboula, sale nègre, le singe… C’était dur… ».
Ils m’ont aimé comme un enfant
Heureusement, la famille Alaize lui a donné « l’amour que je n’avais plus pendant des années. Quand je suis arrivé ici je ne savais pas que c’était possible, j’avais perdu ce côté, être aimé. Je n’arrive toujours pas à comprendre comment le racisme peut s’installer, quand je vois mes parents qui sont blancs, moi qui suis un enfant noir, ils m’ont aimé comme un enfant ».
Robert et Danièle, ses parents, avaient déjà adopté un enfant… hutu, du Rwanda, rebaptisé Julien. Jean-Baptiste, lui, s’appelait Mugisha, qui signifie « l’enfant de la chance », pas vraiment prédestiné. Son nom « A l’aise » lui va mieux, il en sourit…
Va aux JO Paralympiques de Londres (2012) et Rio (2016)
La fédération française handisport repère le prodige, et il récolte ses premiers trophées, puis quatre titres mondiaux en juniors. « Ça commençait à changer ma vie, et j’étais content de représenter la France », lance-t-il.
Il va jusqu’au JO Paralympiques de Londres (2012) et Rio (2016), où il termine 5e à la longueur, à 5 cm du bronze, et rêvait de médaille pour 2020, mais avec le report des Jeux, il a perdu tous ses sponsors.
« J’en cherche toujours pour aller jusqu’à Tokyo 2021 ou 2022 et Paris 2024, si je n’y arrive pas, je vais être obligé de tourner la page, ce serait triste », lâche-t-il.
Il espère encore que Rising Phoenix, le documentaire, va lui ramener de la notoriété, et des parrainages.
« Il crève l’écran », assure le producteur, Ian Bonhôte. « Son histoire va résonner, les neuf athlètes de notre documentaire ont tous des parcours différents, mais aucun n’a survécu à ce qu’a subi Jean-Baptiste, son handicap lui a été imposé d’une manière si sauvage et violente… »
Avec son film (1h42), ce Franco-Suisse rêve de « donner l’espoir, à des amputés d’avoir l’air aussi cool que ce gars-là ».
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