Avec l’allègement des droits de succession, il s’agit de l’autre grande promesse faite par Emmanuel Macron en matière de fiscalité des particuliers lors de la dernière élection présidentielle : permettre aux couples de concubins de déclarer leurs revenus comme les couples pacsés ou mariés.
Déposé par Mathieu Lefèvre et Aurore Bergé, un amendement au projet de budget pour 2023 vise précisément à traduire l’engagement de campagne du chef de l’État. Dans l’exposé de leur amendement, les deux députés du groupe Renaissance écrivent : « L’impôt sur le revenu des personnes en union libre doit pouvoir faire l’objet d’une déclaration commune afin que celles-ci puissent payer leurs impôts conjointement, si elles le souhaitent. Alors que seules les personnes pacsées et mariées peuvent bénéficier d’un tel avantage, il apparaît nécessaire de revoir notre système fiscal pour prendre en compte les situations de concubinage. Cette évolution, concluent-ils, engendrera un gain de pouvoir d’achat pour tous les concubins qui souhaitent déclarer leurs impôts conjointement. »
Le législateur fiscal doit-il se désintéresser du mode de conjugalité pour n’appréhender que l’état de couple ? La justice fiscale implique-t-elle un traitement uniforme des couples, indépendamment de leur forme juridique ?
Pour les couples mariés, le mécanisme de la déclaration commune est la conséquence logique des droits et devoirs nés du mariage, lesquels se traduisent, pour les époux, par la mise en commun des ressources et des charges. L’unité d’imposition, à travers l’application du quotient conjugal et, éventuellement, du quotient familial, répond ici à l’unité économique du foyer fiscal.
Pour les couples pacsés, le législateur, méfiant vis-à-vis d’éventuels « pacs blancs », avait d’abord conditionné le bénéfice de la déclaration commune à l’impôt sur le revenu à la stabilité de l’union (alors caractérisée par une durée de trois ans suivant l’ancien article 6 du Code général des impôts), avant d’abandonner ce critère à compter de l’imposition des revenus de 2004.
La situation des couples pacsés est toutefois différente de celle des couples de concubins. Le pacte civil de solidarité est un engagement, source de droits et de devoirs (les partenaires pacsés doivent notamment, aux termes de l’article 515-4 du Code civil, s’apporter « une aide matérielle et une assistance réciproques », et ils « sont tenus solidairement à l’égard des tiers des dettes contractées par l’un d’eux pour les besoins de la vie courante »). La convergence fiscale progressive du pacs sur le mariage, autrement dit l’alignement du statut fiscal des couples institutionnels, se conçoit dès lors aisément.
Il en va différemment du concubinage. Là où le mariage et le pacs sont sources de droits et de devoirs, le concubinage n’engage pas, quand bien même est-il animé par un lien affectif. Par principe, les concubins rejettent le cadre matrimonial ainsi que les charges et les obligations qui en découlent ; ils ne sauraient par conséquent en revendiquer le corollaire fiscal que constituent la déclaration commune à l’impôt sur le revenu et l’application du quotient conjugal.
L’existence d’une union par définition instable étant nécessairement difficile à prouver, la spécificité du statut fiscal des concubins se justifie de surcroît par l’importance du risque de fraude. On rétorquera que l’impôt sur la fortune immobilière (et, avant lui, l’IGF puis l’IFI) retient l’imposition commune en cas de « concubinage notoire ». Mais cette innovation, introduite lors de la création en 1982 de l’impôt sur les grandes fortunes, s’expliquait justement par la nécessité de parer aux risques d’évasion fiscale susceptibles de provoquer des divorces de complaisance…
Contrairement à celle visant les droits de succession, Emmanuel Macron et les députés Renaissance seraient bien inspirés de renoncer à cette autre promesse.
Article écrit par Victor Fouquet, avec l’aimable autorisation de l’IREF.
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