La Cour suprême israélienne a statué que les juifs ultra-orthodoxes devaient accomplir leur service militaire comme les autres, ravivant les tensions sur un sujet qui cristallise depuis des années les dissensions entre laïcs et religieux.
Malgré le potentiel politiquement explosif de ces dissensions et la fureur des ultra-orthodoxes, les commentateurs s’accordent à estimer que le gouvernement de droite de Benjamin Netanyahu, dont les partis ultra-orthodoxes constituent un pilier, n’est pas menacé.
Les neuf juges de la Cour ont invalidé mardi un amendement de la loi sur le service militaire, adopté en 2015, qui visait à reporter des dispositions légales votées en 2014 sous la pression du parti centriste laïc Yesh Atid, alors membre du gouvernement.
Cette loi de 2014 prévoyait une hausse significative de la conscription des hommes ultra-orthodoxes. Ces derniers bénéficiaient jusqu’alors d’exemptions généralisées en raison de leur statut d’étudiants de yeshivas, les écoles religieuses.
C’est le père fondateur d’Israël, David Ben Gourion, qui avait décidé en 1949 d’exempter de service quelques centaines d’étudiants de yeshivas au motif qu’ils étaient garants de la perpétuation de l’étude de la loi et de la religion juive.
Au fil des ans, avec la croissance importante de la population ultra-orthodoxe, des centaines de milliers de jeunes se sont retrouvés automatiquement exemptés, alors que les autres membres de leur classe d’âge étaient appelés à servir.
Dans la situation actuelle, le nombre des exemptions ne devraient cesser de croître. Représentant aujourd’hui 10% de la population, la communauté ultra-orthodoxe, beaucoup plus fertile, pourrait en constituer le quart d’ici à 2050, selon les projections.
Dans un pays habitué aux guerres, où l’armée est une institution centrale, l’exception ultra-orthodoxe est un motif de ressentiment dans les autres groupes sociaux.
Le service militaire en Israël, obligatoire sauf exception à partir de l’âge de 18 ans, est de deux ans et huit mois pour les hommes et de deux ans pour les femmes.
La conscription n’est que l’une des querelles à illustrer la confrontation entre l’observance des règles juives et la vie moderne, avec par exemple, la poursuite des travaux publics le jour du shabbat .
Les Israéliens sont habitués aux images de heurts entre policiers et ultra-orthodoxes cherchant à empêcher l’enrôlement de l’un des leurs.
Les ultra-orthodoxes observent strictement les règles du judaïsme dans tous les aspects de la vie quotidienne et spirituelle. Ils considèrent la conscription comme une source de tentations pour les jeunes, sortis du monde fermé de la prière et de l’étude religieuse, de plus le sixième commandement est, faut-il le rappeler, » Tu ne tueras point ».
Le chef de file de Yesh Atid, Yaïr Lapid, membre du précédent gouvernement de M. Netanyahu, a salué sur sa page Facebook la décision de la Cour suprême.
La conscription est faite « pour tout le monde, pas juste pour les imbéciles qui n’ont pas de parti dans la coalition », a-t-il écrit.
La décision a en revanche provoqué un déchaînement de réactions hostiles de la part de responsables ultra-orthodoxes.
Le ministre de la Santé Yaacov Litzman a accusé sur la radio publique la Cour suprême de tenter de renverser le gouvernement et un de ses juges « d’être tout le temps » contre les ultra-orthodoxes.
Le ministre de l’Intérieur Arié Déry a estimé sur Twitter que la Cour suprême était « complètement déconnectée de nos traditions ».
Selon la radio publique, les principaux responsables des partis ultra-orthodoxes devaient se rencontrer mercredi dans la journée pour définir une stratégie commune.
Mais une crise gouvernementale est improbable, spéculent les commentateurs. Le quotidien Jerusalem Post écrivait que M. Netanyahu avait déjà eu maintes occasions de trancher dans des crises touchant à la conversion, à la prière mixte au Mur des Lamentations ou au travail le jour de shabbat, et qu’il avait « toujours choisi (le camp des) ultra-orthodoxes ».
La Cour suprême a par ailleurs spécifié que sa décision n’entrerait en vigueur que dans un an, ce qui laisse au gouvernement ou à sa majorité parlementaire le temps de se retourner.
« Je suis persuadé que la ministre de la Justice Ayelet Shaked (..) a déjà un projet de loi qui passera l’examen de la Cour suprême », écrivait un éditorialiste du quotidien Maariv.
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.