Pour les praticiens en médecine traditionnelle chinoise, le principe directeur est l’équilibre.
Un patient qui es froid et faible a naturellement besoin de chaleur et de force. Dans la médecine traditionnelle chinoise, le principal remède pour cette affliction est appelée la moxibustion, ou moxa.
Selon le Dr. Tracy Stuardi, acupunctrice, l’utilisation du moxa permet à la chaleur de pénétrer profondément, ce qui résout les symptômes dits froids.
« Le froid se dépose dans l’utérus ou dans le bas de l’abdomen ou dans le tractus gastro-intestinal. Parfois vous pouvez le sentir en palpant ces zones froides qui ne devraient pas l’être. Le moxa amène facilement la chaleur dans ces régions », explique-elle.
Le nom «moxa» est une version anglicisée du mot japonais mogusa qui signifie «combustion d’herbes». La pratique consiste à brûler des bâtonnets ou cônes médicinaux sur ou près du corps.
On dit que le moxa est originaire du nord de la Chine et qu’il a au moins 3.000 ans. Il était utilisé sur les points d’acupuncture bien avant l’avènement des aiguilles. Aujourd’hui, le moxa est utilisé pour traiter un large éventail de dysfonctionnements, tels que les troubles digestifs chroniques, les problèmes menstruels, la fertilité, les maladies comme la tuberculose, la maladie de Lyme et le cancer.
«Il est très puissant contre la douleur», explique le Dr. Stuardi. « Nous voyons beaucoup de patients arriver avec de fortes douleurs et parfois les aiguilles seules ne suffisent pas. »
Le Dr. Stuardi reste une exception, car beaucoup de praticiens occidentaux en médecine chinoise n’utilisent pas le moxa, préférant se concentrer sur l’acupuncture.
« Il est regrettable que tant de praticiens ne l’adoptent pas », confie-t-elle. « Je pense que beaucoup de gens sont freinés par le temps, le moxa prend plus de temps qu’une séance d’acupuncture. »
En Chine, au Japon et en Corée, le moxa joue un rôle majeur dans le traitement ; mais chez nous, la technique a un peu de mal à s’implanter. Le moxa est enseigné dans les écoles de médecine chinoise, mais de nombreux acupuncteurs abandonnent cette technique une fois leur diplôme obtenu.
Selon le Dr. Stuardi, le gros problème du moxa est son odeur. La moxibustion crée une fumée aromatique que beaucoup de gens confondent avec la marijuana.
« Les gens se demandent si cette odeur est normale, à quoi je réponds que l’essentiel est que cette technique est très efficace », raconte-t-elle.
En médecine interne
Le moxa n’a pas été étudié comme l’acupuncture mais la littérature disponible montre des effets positifs sur le sang, l’immunité et la régénération des tissus. Une étude de 1998, publiée dans le Journal of the American Medical Association, a démontré que pour 75 % des femmes enceintes dont le fœtus se présentait par le siège, un moxa brûlé sur un point d’acupuncture situé sur le petit orteil permettait au bébé de se retourner en position normale.
Si le moxa n’est pas considéré comme une part intégrante de la médecine chinoise en Occident, les anciens médecins l’avaient en haute estime. Dans le Nei Jing –un texte fondamental de la médecine chinoise – on peut lire que le moxa «fait ce que l’aiguille ne peut pas faire».
Certains praticiens modernes prennent cette notion ancienne à cœur. Daniel Silver, acupuncteur et professeur au National College of Natural Medicine à Portland, en Oregon, décrit le cas complexe d’une femme qu’il a récemment traité avec la moxibustion. Elle avait eu plusieurs accidents de voiture et avait été traitée par l’acupuncture par divers praticiens pendant des mois avec peu d’amélioration. Les effets d’une seule séance de moxa ont changé sa vie.
«J’ai vu tant d’excellents résultats avec mes patients», précise le docteur Silver. «De par l’expérience que je retire de mon travail au quotidien, je suis vraiment convaincu des avantages de cette méthode et j’espère que plus de gens pourront l’expérimenter».
Le docteur Silver pense que de nombreux acupuncteurs n’utilisent pas le moxa, car ils craignent de brûler accidentellement un patient. Il encourage les praticiens à surmonter cette peur.
L’armoise magique
Le moxa est fabriqué à partir d’une herbe prolifique appelée armoise (Artemisia vulgaris). Cette herbe est souvent prescrite en phytothérapie pour des douleurs utérines, telles que celles de l’accouchement, des menstruations accompagnées de saignements abondants, ainsi que pour les problèmes digestifs, les troubles hormonaux et circulatoires.
Avant d’être utilisée pour la moxibustion, l’armoise est transformée en un matériau spongieux appelé laine de moxa.
Selon Lorraine Wilcox, auteur de deux ouvrages sur la moxibustion pour l’usage clinique, les anciens médecins chinois ont choisi l’armoise parce qu’elle avait toutes les qualités requises.
La fumée de l’armoise a un effet calmant sur le système nerveux. Quand le patient s’habitue à cette drôle d’odeur, il peut réellement en profiter.
« Certains patients se détendent dans un agréable repos euphorique au cours de leur traitement », a exprimé Dr Stuardi.
Le moxa peut est bénéfique dans de nombreux cas, mais il est déconseillé en cas de fièvre, d’infection, d’eczéma et d’autres signes d’excès de chaleur. Les points sur l’abdomen doivent être évités dans les premiers mois de grossesse.
Des techniques directes et indirectes
Les techniques de moxa sont divisées en deux catégories: directes et indirectes. La méthode directe, qui exige un praticien qualifié, propose une combustion directement sur la peau. Avec la méthode indirecte, une braise de moxa diffuse la chaleur à environ 3 centimètres du corps.
La méthode indirecte est facile à apprendre et souvent, le praticien peut donner au patient un bâtonnet de moxa et le point d’acupuncture sur lequel il faut le maintenir afin de poursuivre le traitement à domicile.
On place la chaleur au-dessus du point prescrit et on la retire quand il fait trop chaud pour que la région refroidisse quelques secondes, puis on reprend le traitement.
Le Dr. Stuardi explique à ses patients qu’il faut supporter la chaleur jusqu’à ce qu’elle pénètre profondément dans les tissus. « Une fois que vous avez ressenti la chaleur pénétrer, vous savez que vous avez fait du bon travail et vous pouvez éteindre le bâton », indique-t-elle. Une séance dure habituellement entre 5 à 10 minutes.
On trouve le matériel pour le moxa sur Internet et dans les écoles d’acupuncture, dans une diversité de formes et de tailles : des cigares aux cônes avec un embout adhésif, à laine de moxa.
Il existe aussi un bâton de moxa, sans fumée, axé sur le charbon de bois pour ceux qui veulent éviter la fumée et l’odeur. Le Dr. Stuardi estime cependant que ceux-ci sont moins efficaces.
« J’essaie de ne pas utiliser le moxa sans fumée, à moins que, pour une raison quelconque, ce soit le seul produit disponible », confie-t-elle.
Ndlr. Le recours à un praticien expérimenté à la technique de moxibustion reste incontournable.
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