La CPI demande un mandat d’arrêt contre deux dirigeants talibans

Le procureur général Karim Khan a déclaré que Hibatullah Akhunzada et Abdul Hakim Haqqaniare étaient "pénalement responsables des persécutions infligées aux filles et aux femmes afghanes"

Par Chris Summers
25 janvier 2025 14:25 Mis à jour: 25 janvier 2025 15:12

Le procureur général de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a demandé des mandats d’arrêt à l’encontre de deux chefs talibans pour « persécution » des femmes et des jeunes filles afghanes, a-t-il annoncé jeudi.

Karim Khan a déclaré qu’il avait demandé aux juges de la CPI d’approuver des mandats d’arrêt contre le chef suprême du groupe, Hibatullah Akhunzada, 64 ans, et le président de la Cour suprême d’Afghanistan, Abdul Hakim Haqqani, 57 ans.

Dans une déclaration publiée sur le site web de la CPI, M. Khan a déclaré : « Mon bureau a conclu que ces deux ressortissants afghans sont pénalement responsables de la persécution des filles et des femmes afghanes, ainsi que des personnes que les talibans perçoivent comme ne se conformant pas à leurs attentes idéologiques quant à l’identité ou à l’expression du genre, et d’autres qu’ils considèrent comme des alliés des filles et des femmes. »

M. Khan, un avocat britannique qui occupe depuis juin 2021 le poste de procureur général de la CPI, a déclaré que les crimes commis par les deux hommes remontaient au 15 août 2021 et se poursuivaient encore aujourd’hui.

Les talibans se sont emparés de Kaboul le 15 août 2021, le jour même où le président Ashraf Ghani, soutenu par les États-Unis, a pris le chemin de l’exil.

Au cours de leur seconde période à la tête de l’Afghanistan – ils ont dirigé le pays entre septembre 1996 et novembre 2001 -, ils ont interdit aux femmes d’occuper des emplois, de fréquenter la plupart des lieux publics et d’aller à l’école au-delà du CM2.

L’année dernière, les talibans ont interdit aux femmes de parler et de se montrer à visage découvert en public, en vertu des nouvelles lois adoptées pour lutter contre le vice et promouvoir la vertu en Afghanistan.

Par ailleurs, M. Akhunzada a publié un décret interdisant toute fenêtre donnant sur un espace où une femme pourrait s’asseoir ou se tenir debout.

Les talibans prétendent que la promotion de la vertu repose sur la prière, l’alignement du caractère et du comportement des musulmans sur la charia, l’encouragement des femmes à porter le hijab et l’invitation à se conformer aux cinq piliers de la religion.

La charia ne « justifie » pas

Cependant, M. Khan a souligné que « mon bureau fait valoir que l’interprétation de la charia par les talibans ne doit pas et ne peut pas être utilisée pour justifier la privation des droits de l’homme fondamentaux ou la perpétration de crimes relevant du Statut de Rome ».

Selon lui, ce ne sont pas seulement les femmes et les jeunes filles, qui sont la cible des talibans, mais aussi leurs « alliés ».

Dans un document de 51 pages détaillant les charges retenues contre M. Akhunzada, M. Khan mentionne que « les alliés présumés des filles et des femmes sont souvent détenus arbitrairement et au secret, et soumis à la torture et à d’autres actes de violence sexuelle ».

Ces accusations concernent également le traitement des lesbiennes, des gays et des bisexuels afghans, a précisé M. Khan.

« Ces demandes reconnaissent que les femmes, les filles afghanes et la communauté LGBTQI+ sont confrontées à une persécution sans précédent, inacceptable et permanente orchestrée par les talibans. »

C’est la première fois dans l’histoire de la CPI que la persécution des homosexuels ou des bisexuels est considérée comme un crime contre l’humanité.

En 2022, le tribunal, dont le siège est à La Haye, a approuvé une demande de M. Khan visant à ouvrir une enquête sur les activités des talibans en Afghanistan, mais cette requête a été classée sans suite lorsque le gouvernement de Kaboul a déclaré qu’il pouvait lui-même mener à bien l’enquête.

Mais jeudi, M. Khan a fait savoir qu’il souhaitait réouvrir cette enquête et délivrer des mandats d’arrêt dans la mesure où il n’y avait « plus de perspectives pour mener des enquêtes nationales authentiques et efficaces » en Afghanistan.

Les juges de la CPI ne disposent d’aucun délai pour statuer sur une demande de mandat.

Déportation d’enfants

En 2023, trois semaines après l’invasion de l’Ukraine, la CPI a délivré un mandat d’arrêt à l’encontre du président russe Vladimir Poutine, pour « crimes de guerre présumés de déportation d’enfants des territoires ukrainiens occupés vers la Fédération de Russie ».

En novembre de l’année dernière, la Cour a émis un mandat d’arrêt à l’encontre du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.

Au début du mois, la Chambre des représentants des États-Unis a adopté un projet de loi qui sanctionne la CPI pour le mandat délivré à l’encontre de M. Netanyahou et de l’ancien ministre israélien de la défense, Yoav Gallant.

Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) Karim Khan s’exprime lors d’une conférence de presse au Palais San Carlos à Bogota, le 25 avril 2024. (LUIS ACOSTA/AFP via Getty Images)

Il est peu probable que les chefs talibans soient arrêtés, à moins qu’ils ne s’aventurent hors des frontières de l’Afghanistan pour se rendre dans un pays qui reconnaît la CPI.

Le gouvernement taliban d’Afghanistan n’a pas commenté l’action de M. Khan.

Avec Associated Press

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