La fabrique de Luxe

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24 janvier 2019 19:14 Mis à jour: 24 janvier 2019 23:35

Jusqu’au 27 janvier le musée Cognac-Jay présente La fabrique de luxe – Les marchands merciers parisiens au XVIIIe siècle.

Les merciers constituaient l’une des plus importantes corporations parisiennes au XVIIIe siècle. Des marchands comme Lazare Duvaux ou Dominique Daguerre ou encore Simon Philippe Poirier ont contribué à l’évolution des modes ainsi qu’à la réputation du luxe à la parisienne.

Jean Ducrollay Tabatière, 1756-1759. Ors de deux tons, porcelaine de Sèvres Musée du Louvre © RMN-GP (Musée du Louvre)

C’est à Dominique Daguerre que la reine Marie Antoinette confie sa collection de laques du Japon quand la Révolution éclate, ce qui en effet a permis de conserver cette collection.

À la fois négociant, importateur, collecteur, designer et décorateur, le marchand mercier occupe un rôle majeur dans l’essor de l’industrie du luxe du XIIIe siècle. Chargé de satisfaire tout désir de luxe de la haute aristocratie, il cherche les meilleurs artisans, près ou loin, à Paris à Lyon et jusqu’en…Chine. Son stock peut comprendre des objets d’ameublement, textiles et jusqu’à objets d’art. La fabrication d’un objet en vogue ou la décoration intérieure exige parfois un grand réseau d’artisans, c’est à lui de les trouver. Le marchand mercier a le droit de monter les objets qu’il trouve pour en créer d’autres mais jamais de les fabriquer.

Manufacture royale de porcelaine de Sèvres Assiette à décor de palmes et d’oiseaux sur un fond vert, faisant partie du « petit service vert » acheté par Louis XV le 9 mars 1758 au marchand mercier Lazare Duvaux Portant la lettre-date D pour les années 1756-1757. Châteaux de Versailles et Trianon © RMN-GP (Château de Versailles)

Trois ans d’apprentissage sont nécessaires pour devenir maître et avoir le droit de posséder un stock varié ainsi que le droit de commercer les pièces « de provenance orientale ». Le rôle du marchand mercier est d’enjoliver les objets, c’est ainsi que le motif des fleurs ou le « fleurissement » voit son essor. Les fleurs en porcelaine de Vincennes deviennent un élément de base pour décorer ou monter n’importe quel objet à partir d’énormes bouquets à taille humaine comme le bouquet commandé par Marie Josèphe de Sax qu’elle fait livrer à son père, et jusqu’aux candélabres. D’une fleur initiale les marchands ont pu composer des objets insolites et déclencher des modes.

Candélabre à deux branches garni d’un oiseau et de fleurs. Bronze ciselé et doré, porcelaine de Saxe. Entre 1715-et 1774. Paris, musée Cognacq-Jay. Manufacture de Meissen et manufacture de Vincennes © Musée Cognacq-Jay / Roger-Viollet

 

Anonyme, Cage à oiseaux, vers 1750-1751. Fer peint et porcelaine Musée des Arts Décoratifs © MAD, Paris

La fleur, que la forme comme le motif rattachent à l’esthétique rocaille, est l’ornement parfait pour un objet de luxe utile ou décoratif.

Les marchands merciers font également évoluer le « marketing », les noms de leurs boutiques le concept de leurs enseignes ainsi que leurs étiquettes et publicités. L’un des marchands mercier emblématiques dans ce domaine est Charles-Raymond Grancher spécialiste d’importation anglaise qui a beaucoup investi dans sa propre publicité et de celle de sa boutique Au petit Dunkerque.

Attribuée à l’atelier blanc et vert (actif vers 1660) Coupe en jade en forme de coquille, 1687. Achetée par Louis XIV au marchand Danet en 1687. Musée du Louvre © RMN-GP (Musée du Louvre)

Hébert est l’un des merciers les plus importants de sa génération. il livre près de 120 objets à la famille royale entre 1737 et 1750. Il fait réaliser trumeaux, porcelaines et chinoiseries montées ou mobilier combinant des techniques multiples ; il serait ainsi l’un des premiers à imaginer d’associer des panneaux de laque orientale à des meubles.

Estampillée Matthieu Criaerd Encoignure, 1743. Livrée par Thomas-Joachim Hébert en 1743 pour la chambre bleue au château de Choisy. En 1791, restaurée par Guillaume Benneman afin de servir dans le cabinet de Mme Élisabeth à Fontainebleau. Bâti de chêne, placage de bois fruitier, vernis martin, bronze argenté, marbre Musée du Louvre © RMN-GP (Musée du Louvre)

Cette pièce complète, une commode livrée par Hébert l’année précédente pour Mme de Mailly, maîtresse de Louis XV, au château de Choisy. La chambre « bleue » était tendue d’étoffes alternant raies bleues et blanches, une inspiration directement tirée d’une soie tissée par la favorite. L’ameublement commandé à Hébert suivait les goûts de cette amatrice de chinoiseries : la bichromie et les motifs exotiques évoquent directement la porcelaine chinoise. Estampillée Matthieu Criaerd Encoignure, 1743. Livrée par Thomas-Joachim Hébert en 1743 pour la chambre bleue au château de Choisy. En 1791, restaurée par Guillaume Benneman afin de servir dans le cabinet de Mme Elisabeth à Fontainebleau.

 

 

Martin Carlin Encoignure livrée par Darnault pour le grand cabinet de Mme Victoire au château de Bellevue, 1785. Ébène, laque du Japon Musée du Louvre © RMN-GP (Musée du Louvre)

Si les adresses prestigieuses des merciers évoluent au cours du XVIIIe siècle, le secteur couvrant la rue Saint-Honoré, les boutiques du Palais-Royal et les quais conservent la prédilection tant de la noblesse parisienne que des touristes.

 

Dissoute durant la révolution avec la suppression des privilèges, cette corporation est au cœur des recherches menées par les historiens de l’art et les universitaires pour mieux comprendre les mécanismes de la consommation du luxe ou pour identifier une pièce d’art.

 

À travers une scénographie évoquant le foisonnement des projets de décors intérieurs parisiens du XVIIIe siècle, le parcours de l’exposition introduit les caractéristiques de cette profession si particulière.

 

Michal Bleibtreu Neeman

 

 

 

 

 

 

 

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