Le classement en « quartier prioritaire » accroît l’évitement scolaire des collèges publics et tend à accentuer la ségrégation sociale entre établissements publics et privés avoisinants, selon une étude de l’Institut des politiques publiques publiée mercredi.
Dans cette étude, qui porte sur 2010 à 2019, les chercheuses en économie de l’éducation Manon Garrouste et Miren Lafourcade se sont intéressées aux effets sur les collèges de la réforme de la géographie des quartiers classés prioritaires de la politique de la ville (QPV) intervenue en 2014.
« Véhiculer un signal négatif »
Plus de cinq millions de personnes vivent dans les quartiers prioritaires. L’entrée en QPV (qui se distingue de l’entrée d’un établissement scolaire en Réseau d’éducation prioritaire) permet à certains quartiers de bénéficier de subventions publiques pour réduire la ségrégation urbaine, améliorer les conditions de vie et les opportunités économiques des habitants.
Paradoxalement, ce classement a été « contre-productif » pour les collèges publics, car il peut « véhiculer un signal négatif », qui « peut pousser les parents à éviter » un collège, « soit en déménageant avant l’entrée en 6e, soit en optant pour un collège privé, soit en demandant une dérogation », écrivent-elles.
Cette étude montre qu’à l’entrée en 6e, la proportion d’élèves scolarisés dans ces collèges nouvellement labellisés a diminué en moyenne de 3,5 points de pourcentage.
« Des effets d’évitement »
Cette baisse, immédiate et qui a persisté jusqu’à cinq ans après la réforme, « est due à des effets d’évitement généralisés », mais « qui sont différenciés selon le statut socio-économique ou la profession du parent référent », souligne par ailleurs l’étude.
L’entrée en « quartier prioritaire » a ainsi augmenté de 3,6 points de pourcentage la propension des familles issues de catégories favorisées à mettre leur enfant dans le privé. Les catégories défavorisées, elles, se sont davantage reportées vers les autres collèges publics (+4,8 points de pourcentage). Ces effets « tendent donc à accentuer la ségrégation sociale entre les établissements publics et privés avoisinants », constate l’étude.
Cette hausse de l’évitement s’accompagne aussi d’une légère baisse des résultats au brevet pour la première cohorte des 6e affectée par la réforme, illustrant la « recomposition sociale » et scolaire de ces établissements.
L’étude ne constate en revanche aucun regain d’attractivité pour les collèges qui sont sortis du périmètre de la politique de la ville. Pour les autrices, ces résultats conduisent à « poser la question des politiques ‘zonées’ ».
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