ÉCONOMIE CHINE

La monnaie chinoise en perte de valeur à cause de la crise de l’emploi

décembre 21, 2015 22:25, Last Updated: décembre 22, 2015 11:51
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De plus en plus, la Chine se tourne vers les taux de change basés sur les paniers monétaires. Après que le Fond monétaire international (FMI) ait ajouté le yuan à son panier de monnaies de réserve, la Chine a décidé d’utiliser un panier monétaire comme référence pour suivre les variations du taux de sa monnaie nationale, plutôt que de se baser seulement sur le dollar américain.

Cela ouvre la porte à de nouvelles dépréciations du yuan, non pas dans le but d’accélérer la croissance, mais de prévenir le chômage en masse.

La monnaie chinoise a suivi le mouvement du dollar jusqu’en 2005, jusqu’à ce que la Banque populaire de Chine (BPC) commence à adopter une indexation plus flexible tout en maintenant le taux de change sous un contrôle strict. L’été passé, la PPC a presque abandonné cette politique et a pris la décision de dévaluer le yuan, à la grande surprise du marché. Depuis lors, le yuan a progressivement baissé par rapport au dollar américain, et c‘est à ce moment que le nouveau panier monétaire a été introduit.

Comme le panier des droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI, l’indice pondéré par le commerce extérieur de la BPC n’est qu’un panier vide. Il ne sert que comme référence de valeur du yuan chinois par rapport aux devises des partenaires commerciaux les plus importants de la Chine.

Variations du dollar américain par rapport au yuan chinois. La courbe descentante signifie l’appréciation du yuan (Google Finance)

Dans des circonstances normales, ces observations ne méritent qu’à peine d’être mentionnées. L’indice du dollar américain ou DXY est calculé de la même façon et cela est normal pour tout le monde.

Ces paniers aident les responsables politiques à voir si leur monnaie est sous-évaluée ou surévaluée par rapport aux devises de leurs partenaires commerciaux les plus importants. Par exemple, dans le cas de la monnaie chinoise, le yuan n’est pas beaucoup surévalué par rapport au dollar américain, mais plus par rapport à d’autres devises.

Le yuan chinois par rapport aux principales devises mondiales (SLJ Macro Partners)

Le Chinese Foreign Exchange Trade System ( CFETS – Système chinois du commerce de monnaies étrangères) qui fait partie de la BPC et s’occupe du nouveau panier, a déclaré dans son premier communiqué de presse : « Par conséquent, le yuan est une monnaie relativement forte parmi les principales monnaies internationales. »

Mark Williams, principal économiste chez Capital Economics, précise : «  En étant lié au dollar qui se renforçait, le yuan s’est fortement apprécié en termes pondérés par le commerce. Toutefois, toute faiblesse prolongée du yuan par rapport au dollar à tendance à être interprétée comme ‘dévaluation’ et déclenche les inquiétudes du marché ».

La petite dévaluation d’août dernier n’a même pas atteint les 3%, ce qui n’a pas empêché les marchés financiers à travers le monde de se détraquer à la fin du mois.

Depuis que le FMI a ajouté le yuan à son panier de DTS, la BPC a laissé le yuan chuter pendant sept jours consécutifs avant le 15 décembre, ce qui fut sa plus importante dévaluation enregistrée et qui a été de nouveau largement suivie par les médias et les marchés financiers.

Par rapport au dollar, le yuan s’est encore déprécié d’un pour cent depuis le 16 novembre, le jour où la Chine était presque certaine que le yuan obtiendrait l’approbation pour être inclu dans le DTS.

Si la Chine veut dévaluer considérablement le yuan par rapport aux monnaies de tous ses principaux partenaires commerciaux, elle devra le dévaluer encore plus par rapport au dollar, qui ne représente que 26 % dans le panier et qui s’appréciait par rapport à d’autres grandes monnaies comme l’euro ou le yen. Le dollar amenait le yuan avec lui dans son ascension.

L’indice CFETS (ainsi que l’indice BIS) du yuan a aussi déprécié ces derniers jours (Goldman Sachs)

Comme « les autorités ont de plus en plus attiré l’attention publique sur la performance du yuan en termes pondérés par le commerce plutôt que tout simplement par rapport au dollar américain, cela renforce la possibilité de sa dépréciation modérée par rapport au dollar, si ce dernier continue à prendre de la valeur», explique une note de Goldman Sachs.

En d’autres termes, selon Goldman Sachs, cela donne à Pékin une excuse pour dire : « Notre devise est très surévaluée et nous avons besoin de la déprécier, en particulier par rapport au dollar américain. »

Les analystes de Macquarie pensent qu’en 2016, le yuan pourrait s’affaiblir à raison de 5 % par rapport au dollar américain. Cependant, la plupart des analystes croient que sur une base commerciale pondérée, le yuan serait surévalué d’environ 15 à 20 %. En prenant en compte que le panier monétaire pourrait être utilisé comme excuse, une dévaluation plus importante par rapport au dollar est bien probable.

Pourquoi en arrive t-on là

Pourquoi est-ce que la Chine cherche-t-elle autant à se justifier de la dévaluation de sa monnaie non seulement par rapport au dollar, mais également par rapport aux devises de ses principaux partenaires commerciaux ?

De nombreux analystes estiment que la raison est que la Chine veut stimuler la croissance par les exportations. Cependant, il s’agit d’une hypothèse peu probable.

« Ils étaient au sommet il y a quelques années. Leurs exportations nettes étaient à 8 % du PIB. Maintenant, ils sont beaucoup plus bas », explique Richard Vague, auteur du livre « The Next Economic Disaster. » Les exportations nettes ne contribuent presque plus à la croissance du PIB chinois.

Selon les données de la Banque mondiale, la part des exportations totales dans le PIB de la Chine a diminué de 25,5% en 2011 à 22,6% en 2014. Alors, que se passe t-il ?

Le pourcentage des exportations totales dans le PIB de la Chine et du monde entier (Banque mondiale)

Le commerce reste toujours très important pour l’emploi en Chine.

« La Chine se préoccupe beaucoup plus des emplois que du profit, il est très important pour le gouvernement de maintenir des emplois », confie l’investisseur milliardaire Wilbur Ross de WL Ross & Co.

Il est particulièrement important de maintenir des emplois lorsque l’économie ralentit et lorsque les coûts de la main d’œuvre deviennent de moins en moins compétitifs. À cet égard, 2015 a été un vrai désastre :

«  De janvier à novembre 2015, les exportations chinoises de produits à forte intensité de main-d’œuvre ont chuté de 6% sur la base annuelle, tandis que les exportations de produits de haute technologie étaient stables. Les exportations chinoises de produits de l’industrie de transformation, qui se basent sur de faibles coûts de main-d’œuvre, ont chuté de 10%, tandis que les exportations ordinaires ont augmenté de 2% », souligne dans sa note la banque d’investissement Macquarie.

Selon un rapport de la Bundesbank, les emplois provenant des exportations était au niveau de 80 millions de personnes en 2009 (10,2% de l’emploi total), en baisse par rapport aux 99 millions de 2007 (12,9% de l’emploi total).

Bien que le rapport ait été publié en 2014, les données pour 2009 sont un peu obsolètes et reflètent elles aussi la baisse de l’emploi en raison de la crise financière.

Selon un rapport de l’Université George Washington, suite à la crise financière plus de 20 millions de Chinois ont perdu leur emploi dans les zones côtières du pays – ce qui fut la raison principale pour laquelle la Chine a commencé son programme d’infrastructure et d’investissement qui a créé du travail mais a aussi créé une surcapacité massive.

Peu de temps après, les exportations ont augmenté pendant quelques années, mais sont retombées pendant les cinq derniers mois de 2015.

Comme les dépenses d’investissement ralentissent également, alors que le consommateur n’a pas jusqu’ici sauvé la situation, les responsables chinois ont de bonnes raisons d’être nerveux.

« La Chine est différente de la Russie. Lors de la dépression en Russie, les travailleurs se saoulent. Mais en Chine, ils font des émeutes et ils détestent le Parti communiste, composé principalement d’ escrocs et de voyous », averti Woody Brock de Strategic Economic Decisions, Inc.

Selon le China Labor Bulletin, en 2015, les grèves et les manifestations en Chine on battu tous les records.

C’est pourquoi le régime chinois stimule sur tous les fronts : le marché boursier, les gouvernements locaux, les dépenses d’investissement et maintenant les exportations. Mais cela va t-il marcher ?

Gordon Chang, auteur du livre « The Coming Collapse of China » (L’effondrement imminent de la Chine) ne le pense pas : « La base principale de la légitimité du Parti communiste a été l’assurance de la prospérité continue … Toutes les choses qu’ils ont essayé de faire sont des techniques qui leur avaient permis de créer de la croissance dans le passé. Ils ne peuvent plus le faire maintenant et cela signifie qu’ils sont vraiment en danger ; dorénavant, vous verrez de plus en plus de protestations ».

 

Version anglaise : Employment Is the Reason for China’s Devaluation, Not Growth

 

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