Les autorités de Hong Kong ont déployé de nombreux policiers dimanche dans un parc de la ville à l’occasion du 34e anniversaire de la répression sanglante de la place Tiananmen, après une journée tendue et des arrestations visant à mettre un terme aux tentatives de commémoration.
En Chine continentale, les autorités ont toujours interdit toute commémoration des événements du 4 juin 1989. Ce jour-là, les troupes et les chars avaient écrasé le mouvement pro-démocratie qui, depuis des semaines, exigeait un changement politique et la fin de la corruption. Plus d’un millier de manifestants pacifiques étaient tombés sous les balles.
Indicateur-clé des libertés
Hong Kong, restituée à la Chine par le Royaume-Uni en 1997, a longtemps été la seule ville chinoise à organiser une veillée aux chandelles en mémoire de Tiananmen. C’était d’ailleurs un indicateur-clé des libertés et du pluralisme politique que lui conférait son statut de territoire semi-autonome. Mais en 2020, Pékin a imposé une loi sur la sécurité nationale dans l’ex-colonie britannique pour museler toute contestation, après les gigantesques manifestations pro démocratie de 2019. Depuis, les autorités ont mis fin à ces veillées qui réunissaient des dizaines de milliers de personnes chaque année dans le parc Victoria, dans le quartier central de Causeway Bay.
Cette année, le rassemblement géant du parc a été remplacé par une foire commerciale consacrée à des produits en provenance de la Chine continentale, et organisée jusqu’à lundi par des groupes pro-Pékin. « Hong Kong est une ville différente aujourd’hui », estime Mme Wong, 53 ans, qui n’accepte de donner que son nom de famille.
« N’oubliez pas le 4 juin ! »
Samedi, la police a également massivement pris position dans le parc Victoria et ses alentours, arrêtant plusieurs artistes de rue dont certains ne semblaient rien faire de particulier. Comme l’artiste performeuse Chan Mei-Tung, fouillée et interpellée alors qu’elle se promenait dans le quartier. Ou un autre artiste, Sanmu Chen qui a, lui, choisi une méthode moins discrète et chanté en boucle : « N’oubliez pas le 4 juin ! Peuple de Hong Kong, n’ayez pas peur d’eux ! » Quatre personnes ont été arrêtées pour « conduite désordonnée sur la voie publique » et pour « actes à des fins séditieuses », et quatre autres pour « trouble à l’ordre public », a annoncé la police samedi soir.
Artist Sammu Chan was among several activists bundled away by police on Saturday in Causeway Bay, on the eve of the #Tiananmen crackdown anniversary. Whilst being apprehended, he shouted « down with tyranny, » « don’t forget June 4, » and » Hongkongers don’t be afraid. »
HKFP has… pic.twitter.com/j9cbBB8XHy
— Hong Kong Free Press HKFP (@hkfp) June 3, 2023
En Chine continentale, toute trace des événements de Tiananmen a été effacée par les autorités. Les manuels d’histoire n’en font pas mention, les discussions en ligne sur ce sujet sont systématiquement censurées. Cette année, la police chinoise surveille également un site emblématique du rare mouvement d’hostilité envers le régime de Xi Jinping qui a éclaté à l’automne dernier. Un important dispositif policier a ainsi été déployé autour du pont Sitong de Pékin, théâtre d’une manifestation fin novembre où une banderole réclamant plus de liberté y avait été déroulée.
À Hong Kong, la plupart des figures du mouvement pro-démocratie ont été arrêtées ou se sont réfugiées à l’étranger depuis l’entrée en vigueur de la loi sur la sécurité nationale. C’est notamment le cas des responsables de l’association qui organisait la veillée du parc Victoria, Hong Kong Alliance. Pour autant, les autorités semblent toujours en état d’alerte maximal face aux possibles expressions de dissidence.
« L’étincelle est toujours dans nos cœurs »
Debby Chan, ancienne conseillère de district désormais propriétaire d’une boutique, a indiqué que la police l’avait appelée la semaine dernière pour lui demander ce qu’elle avait prévu de faire dimanche. Et ce après que Mme Chan a annoncé sur sa page Facebook qu’elle distribuerait gratuitement des bougies le 4 juin. « Je remercie les autorités de faire tant d’efforts chaque année pour nous rappeler que nous ne devons pas oublier », a-t-elle brocardé sur Facebook.
Par ailleurs, le réseau public RTHK a retiré une lettre datant du 6 juin 1989 qui avait été affichée dans ses locaux, laquelle remerciait ses journalistes de l’époque d’avoir couvert la répression meurtrière de Tiananmen, a indiqué un employé sous couvert d’anonymat. Le chef de l’exécutif de la ville, John Lee, a rappelé que chaque résident de Hong Kong devait respecter la loi et se tenir « prêt à en assumer les conséquences » en cas de violation.
Ailleurs dans le monde, des commémorations du 4 juin auront lieu au Japon, à Sydney, à New York et à Londres, où une reconstitution des événements de Tiananmen se tiendra à Trafalgar Square. À Taïwan, une pièce de théâtre de l’auteure hongkongaise Candace Chong, intitulée « Le 35 mai », sera également jouée ce dimanche dans un théâtre de la capitale. « L’histoire et la mémoire ne s’effaceront pas facilement », estime le Hongkongais Sky Fung, secrétaire général de l’ONG Hong Kong Outlanders basée à Taipei. « L’étincelle est toujours dans nos cœurs ».
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