Traquer ceux qui utilisent des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle est la mission de l’office central dirigé par Lénaïg Le Bail. Avec l’afflux de visiteurs durant les Jeux olympiques de Paris, la commissaire divisionnaire craint « un vrai risque d’augmentation » de la prostitution.
« C’est un sujet de préoccupation. Nous supposons qu’il y aura une augmentation de la demande et potentiellement une augmentation de l’offre. Nous ne savons pas trop comment cela va se matérialiser », souligne dans un entretien à l’AFP Mme Le Bail, à la tête depuis un an de l’Office central pour la répression de la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle (OCRTEH).
L’Office, qui traite de dossiers liés à la « criminalité organisée avec des réseaux plus ou moins structurés », compte 36 effectifs pour quatre groupes d’enquêtes. Son rôle pendant les Jeux sera de collecter des « signalements, d’en faire l’analyse (…) et de venir en appui aux services territoriaux, voire de traiter peut-être certains dossiers ».
L’OCRTEH espère recueillir ces signalements auprès de partenaires comme les plateformes hôtelières ou de location de logements de courte durée, grâce notamment à une campagne de sensibilisation. Mais l’ampleur du phénomène durant ces Jeux reste incertaine.
80% de la prostitution via des annonces en ligne
Mme Le Bail a échangé avec ses partenaires allemands pour la Coupe du monde de football 2006, britanniques pour les JO de Londres 2012 et brésiliens (JO-2016). « Il est difficile d’en tirer des enseignements très précis », glisse-t-elle : ces événements datent et la prostitution s’exerce de moins en moins sur la voie publique.
« La crise sanitaire et l’exploitation en ligne ont changé la donne. Cela rend les choses plus invisibles, plus difficiles à détecter pour les forces de sécurité intérieure et plus faciles à organiser pour les réseaux criminels », insiste Mme Le Bail, précisant qu’aujourd’hui plus de 80% de l’offre prostitutionnelle se fait en ligne via des annonces (35.000 à 40.000 par jour).
« Les réseaux vont sans doute s’adapter à la situation (des JO) en termes de localisation, de prix des hébergements, de saturation des espaces publics. Et (…) de façon générale, on constate une augmentation continue de la prostitution avec notamment ce qu’on appelle le proxénétisme de proximité. Les zones particulièrement touchées par ce type de proxénétisme sont proches de certains sites des Jeux olympiques », souligne-t-elle.
Du proxénétisme de cité pour moitié
Le proxénétisme de proximité – jusque-là appelé proxénétisme de cité – représente la moitié des affaires traitées par les services d’enquête français. « Ce sont des affaires franco-françaises, des réseaux plutôt petits, plus ancrés localement et qui exploitent des victimes pour moitié mineures et pour moitié majeures, mais souvent de jeunes majeures ».
Ce type de proxénétisme est « l’affaire de petits délinquants de proximité qui trouvent des façons variées de gagner de l’argent », explique la commissaire. Contrairement au trafic de stupéfiants, « on prend moins de risques quand on exploite des femmes ». « Quand vous cherchez des personnes à prostituer, vous n’avez pas besoin de mise de départ, donc c’est plus facile à initier. »
Dans les autres types d’affaires, celle concernant les réseaux internationaux, les trafiquants originaires d’Amérique latine et des Caraïbes ont pris une grande ampleur ces deux, trois dernières années, ce qui en fait « la menace principale en France aujourd’hui ». « Ils font venir des victimes directement en France, ponctuellement, mais souvent par des pays de transit, donc par l’Espagne, parfois le Portugal, l’Italie. Ce sont beaucoup de femmes issues du Brésil, de République dominicaine, de Colombie, du Paraguay », énumère Mme Le Bail.
Dans la perspective des JO, quel que soit le type de réseaux, les enquêteurs de l’OCRTEH s’interrogent surtout sur le mode opératoire des trafiquants. « Vont-ils transporter les victimes sur le lieu d’hébergement des clients plutôt que l’inverse ? »
En 2022, 52 réseaux ont été démantelés, avec environ 1000 auteurs et 1000 victimes identifiés. « C’est évidemment une petite part de ce qui existe », précise Madame Le Bail.
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