« Reflet d’un contrôle poussé à l’extrême » ou « sanction graduée »? Un représentant syndical de l’entreprise de vente à distance La Redoute avait contesté aux prud’hommes de Roubaix (Nord) sa mise à pied pour avoir mangé une clémentine près de son poste de travail.
Le tribunal des Prud’hommes de Roubaix a finalement donné raison à la direction de La Redoute, après avoir été saisi par Smaïl Bella, qui avait été mis à pied un jour pour avoir mangé une clémentine sur son lieu de travail.
Rappel des faits
Le 7 novembre 2017, ce préparateur de commande représentant CGT, entré à La Redoute en 2004, s’est levé à 04H30 pour prendre son poste au site de logistique de Wattrelos à 06H00 et a mangé une clémentine peu avant 09H00.
Il était à son poste de « picking », où les salariés alignés sur une chaîne de production prennent dans des bacs les marchandises importées et les scannent pour les envoyer aux clients – à raison de 600 gestes à l’heure selon la CGT – lorsqu’une « micro-panne » aurait arrêté la chaîne.
La justice déboute le salarié de La Redoute mis à pied pour avoir mangé une clémentine #Roubaix #Wattrelos
https://t.co/j24diuZ9lk— Bruno Renoul (@brenoul) November 14, 2019
Selon son avocate, il s’est alors reculé pour s’asseoir sur un banc et manger son fruit, en dehors du temps de pause prévue de 10H00 à 10H20, puis « faute de poubelle », a pris « diligemment » les épluchures avec lui et les a posées sur son poste. L’agente de maîtrise les repère; il sera mis à pied une journée, perdant 70 euros brut de salaire.
Une sanction disproportionnée selon l’avocate
« Etait-ce proportionné aux faits reprochés? Non », a avancé lors de l’audience son avocate Me Aurélie Bertin, pour qui cette affaire « symbolise » la « déshumanisation » des conditions de travail du nouvel entrepôt de logistique « Quai 30 », depuis la restructuration de l’entreprise et les 1.200 licenciements en 2014.
La direction soutient que le salarié a mangé à son poste, enfreignant le règlement intérieur, et faisant courir le risque, à cause des épluchures et du jus, d’une « détérioration potentielle de la chaîne ».
« Ce n’est pas anecdotique », a souligné l’avocate de l’entreprise Me Noémie Dupuis, pour qui la sanction est « graduée. »
Elle a également rappelé qu’il « s’est permis de quitter son poste le 17 septembre 2017 pour aller chercher des sucreries en salle de pause » pendant ses heures de travail et « fait preuve d’intempérance » envers sa supérieure.
Le verdict du tribunal des Prud’hommes de Roubaix
Mi-juin 2019, ce même conseil des prud’hommes avait condamné La Redoute pour avoir retenu sur salaires le temps de déplacement jusqu’au lieu de pause, distant de 4 à 5 minutes des espaces de production.
Lors de l’audience du 14 novembre, la direction a assuré qu’il avait mangé sa clémentine à son poste, ce qui risquait de détériorer l’outil de travail. Smaïl Bella, qui travaille sur ce site depuis quatorze ans, et qui est également délégué du syndicat CGT, n’a pas obtenu gain de cause devant la justice, qui l’a débouté. La décision a été rendue ce jeudi.J
Contacté par France Bleu, juste après avoir pris connaissance de cette décision, Smaïl Bella a réagi : « Je trouve ça scandaleux, je suis sous le choc. La sanction de la Redoute était déjà complètement disproportionnée, et là j’ai l’impression que la justice n’existe pas ».
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