De récents reportages sur les semailles de printemps dans le comté de Raohe, en Chine, ont attiré l’attention sur les défis auxquels sont confrontés les agriculteurs chinois. En effet, le coût de la culture des céréales augmente et la production agricole diminue en raison du vieillissement de la population du pays.
Le comté de Raohe, dans la province chinoise de Heilongjiang, était autrefois reconnu comme le premier comté producteur de céréales de Chine. En 1993, il a été désigné comme la capitale chinoise de la production de soja. Trente ans plus tard, la production céréalière de Raohe est en baisse et un nombre croissant d’agriculteurs quittent la région pour des emplois plus lucratifs ailleurs.
En avril, le bureau des statistiques de la province de Heilongjiang a publié un rapport d’enquête sur la préparation à l’agriculture de printemps dans le comté de Raohe. L’enquête a été présentée en détail sur le site web de la province et rapportée par les médias d’État chinois.
Selon cette étude, rapportée par le journal numérique chinois The Paper, le coût des fournitures agricoles, de la main-d’œuvre, des terres et des loyers a augmenté, ce qui accroît le coût de la production céréalière. Combinée à d’autres dépenses croissantes, cette hausse rend l’agriculture de moins en moins attrayante. Le revenu annuel d’une famille d’agriculteurs peut ne pas correspondre au revenu d’un seul des nombreux travailleurs migrants constituent la main-d’œuvre des usines urbaines chinoises.
Les problèmes décrits dans le rapport d’enquête ne sont pas propres au comté de Raohe. Dans un article publié le 20 février, le Quotidien du peuple, média d’État chinois, a également reconnu que les rendements céréaliers ruraux de la Chine sont encore faibles et que les loyers fonciers et les prix de la main-d’œuvre restent élevés. Parallèlement, les coûts de production des denrées alimentaires continuent d’augmenter en raison de l’impact de la hausse des prix internationaux de l’énergie et des engrais.
Coûts élevés, faibles rendements
Le bénéfice net moyen des trois principales cultures céréalières chinoises (riz, blé et maïs) n’était que de 47 yuans (6,14 euros) par mu en 2020, selon un rapport de recherche de l’Université agricole de Chine publié en juillet 2022. Le mu est une unité agricole chinoise qui équivaut à environ 0,165 acres (667,7 m2).
Le rapport détaille le cycle de pertes et profits du secteur agricole, alimenté par des mesures d’intervention, au cours des dernières décennies.
Entre 2004 et 2011, le bénéfice net moyen des trois principales céréales chinoises est passé de 196,5 yuans (25,7 euros) par mu à 250,8 yuans (32,8 euros) par mu après la mise en œuvre d’une politique de prix d’achat minimum. Après 2014, les prix d’achat minimum du riz et du blé ont été régulièrement abaissés. En 2016, la Chine a annulé sa politique de stockage du maïs dans des réserves temporaires et le prix a chuté. Avec l’augmentation des coûts de plantation des céréales, les revenus céréaliers de la Chine sont entrés dans une phase de perte. De 2016 à 2019, les bénéfices nets moyens des trois principales céréales chinoises ont tous été négatifs.
En 2020, touchés par la pandémie de Covid-19 et d’autres facteurs, les prix des céréales ont rapidement augmenté, et le bénéfice net moyen des trois principales céréales chinoises s’est redressé pour atteindre 47 yuans (6,14 euros) par mu.
Cette hausse n’a toutefois été que temporaire, et la flambée des coûts a depuis lors lourdement pesé sur les revenus agricoles.
Selon le rapport, entre 2004 et 2020, le coût moyen des intrants (semences, engrais et pesticides) pour les trois principales céréales chinoises a été multiplié par 1,35. Le coût moyen des terres a été multiplié par 3,42 et celui de la main-d’œuvre par 1,92, pour atteindre près de 37% des coûts totaux en 2020. Parallèlement, les coûts des opérations mécaniques ont été multipliés par 3,88 pour atteindre 13,8% des coûts totaux en 2020. Enfin, les frais de drainage et d’irrigation ont augmenté de 59%. Tous ces facteurs ont contribué à réduire les bénéfices des agriculteurs.
Les coûts de production ont grimpé en flèche, rendant l’agriculture non rentable pour les petits exploitants.
Les petits agriculteurs représentent toujours la majeure partie de la production rurale en Chine. Selon le Quotidien du Peuple, « l’individu moyen possède 1,3 mu de terre (868 m2) ; le ménage moyen ne possède pas plus de 10 mu de terre (6677 m2). Cette dépendance à l’égard des petits agriculteurs est une réalité à long terme pour l’industrie agricole chinoise, selon le rapport.
Toutefois, le rapport sur le comté de Raohe avertit que la hausse des coûts n’affecte pas seulement les petits agriculteurs, mais aussi certains grands producteurs de céréales.
Quitter la ferme pour la ville
Le rapport note qu’en raison du faible rendement de l’agriculture, de nombreuses personnes jeunes et d’âge moyen dans la population active rurale quittent la ferme pour la ville. Cela signifie que la main-d’œuvre rurale est de plus en plus âgée. Outre d’autres problèmes liés à l’âge, les agriculteurs plus âgés peuvent avoir du mal à adopter les nouvelles technologies agricoles, ce qui entraîne une baisse des rendements et de la qualité des récoltes, ainsi qu’une diminution des bénéfices.
Selon un rapport de 2021 de l’Académie chinoise des sciences sociales, publié par le Centre chinois de recherche sur le vieillissement, la population rurale chinoise est confrontée à une situation de vieillissement grave, avec plus de 20% de la population âgée de 60 ans ou plus, et près de 14% de 65 ans ou plus. Ce qui répond pleinement aux critères d’une société vieillissante.
Selon un récent rapport de recherche, le vieillissement de la population dans les zones rurales affecte la production et l’exploitation agricoles de la Chine de plusieurs manières.
Selon un article intitulé « Ageing Threatens Sustainability of Smallholder Farming in China (Le vieillissement menace la durabilité des petites exploitations agricoles en Chine) » publié en février dans la revue Nature, la proportion de personnes âgées de plus de 65 ans dans les zones rurales de la Chine a doublé entre 2000 et 2019. Le vieillissement de la population rurale devrait poser des problèmes dans les années à venir.
Les chercheurs ont constaté que le vieillissement de la population rurale chinoise avait réduit la taille moyenne des exploitations agricoles du pays de 4% en 2019, principalement en raison du transfert de la propriété des terres cultivées et de l’abandon des terres, ce qui constitue une menace sérieuse pour la sécurité alimentaire.
Le vieillissement de la population rurale et le changement d’échelle des terres agricoles ont entraîné une diminution de 6% des intrants utilisés avec les machines agricoles, de 2% et de 64% respectivement pour les engrais et les engrais organiques, une baisse de 5% de la production agricole par unité de surface, une baisse de 4% de la productivité du travail et une réduction de 15% des revenus des agriculteurs provenant du secteur agricole. En outre, le vieillissement des zones rurales a également entraîné une augmentation de 3% des pertes d’engrais par ruissellement, ce qui s’est traduit par une pollution accrue de l’environnement.
Le vieillissement de la population agricole pose des défis
L’aggravation du vieillissement des campagnes chinoises posera de graves problèmes de sécurité alimentaire et de pollution environnementale si aucune mesure n’est prise, prédit le rapport, en augmentant le taux d’abandon des terres arables et en réduisant la taille moyenne des exploitations.
Fang Qi, un consultant financier basé au Royaume-Uni qui connaît bien la situation agricole de la Chine, a déclaré à Epoch Times : « Pendant des années, la Chine s’est appuyée sur les importations pour assurer son approvisionnement alimentaire… non seulement à cause de la production, mais aussi à cause du coût de l’importation de denrées alimentaires, comme le maïs, qui est moins cher que la culture elle-même. »
Fang Qi a déclaré que l’amélioration de la production agricole de la Chine nécessitera une approche sur plusieurs fronts au fil du temps afin de corriger les technologies agricoles rétrogrades et de rendre l’agriculture plus rentable. « L’agriculture est un projet systématique. Il ne suffit pas d’un lopin de terre pour produire de la nourriture. »
Toutefois, il prédit que l’époque pendant laquelle il était moins cher d’importer des denrées alimentaires que de les produire est peut-être révolue, ce qui souligne la nécessité de revitaliser l’agriculture chinoise. « Ce qui va arriver ensuite, l’inflation importée, comme l’appelle la Chine, sera en fait une flambée des prix à l’importation des céréales, des denrées alimentaires et de l’énergie. »
Un article d’opinion paru en février dans le quotidien d’État People’s Daily mettait en garde : « Ce n’est que lorsque les agriculteurs pourront gagner de l’argent en cultivant des céréales que le pays sera en sécurité ». La Chine doit augmenter sa propre production de céréales dès que possible, avertissait l’éditorial, en raison du risque croissant d’incertitude dans la chaîne d’approvisionnement de l’industrie céréalière mondiale.
Toutefois, les données montrent que les importations de céréales de la Chine ont continué à augmenter ces dernières années. Selon les chiffres officiels, la Chine a importé 124,7 millions de tonnes de céréales en 2015. En 2021, les importations totales de céréales de la Chine ont atteint le chiffre record de 164,54 millions de tonnes, ce qui représente une augmentation significative. En 2022, les importations de céréales de la Chine ont diminué mais sont restées élevées à 146,87 millions de tonnes.
L’approvisionnement en soja de la Chine est extrêmement dépendant des importations, qui se sont maintenues à plus de 80 millions de tonnes depuis 2015. En 2020, les importations de soja de la Chine ont dépassé les 100 millions de tonnes.
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