En proie à une crise économique et à la politique souvent qualifiée de liberticide du régime du président Kaïs Saïed, la Tunisie semble de plus en plus fragile. De nombreux Tunisiens cherchent à quitter leur pays, situé non loin des côtes italiennes. La situation en Tunisie peut-elle entraîner à nouveau un afflux massif de réfugiés vers l’Europe ?
Une crise économique inquiétante
Depuis le début de l’année 2022, la Tunisie s’enfonce dans une grave crise économique et financière. Le taux de chômage et tout particulièrement celui des jeunes (15-24 ans) ne cesse d’augmenter. Selon l’Institut National de la Statistique (INS) de Tunisie, au deuxième trimestre de l’année 2022, 37,2 % des jeunes étaient demandeurs d’emploi. Ils étaient 38,8 % à la fin de cette même année. Le pays subit aussi les conséquences économiques du conflit russo-ukrainien, avec une inflation dépassant les 10 % en 2022 sur des produits tels que la viande ou les œufs ou encore les céréales. La croissance économique tunisienne a été divisée par deux entre 2021 et 2022, passant de 4,3 % à 2,4 %.
Au niveau financier, la situation s’est aussi très rapidement dégradée. Des données publiées mi-avril par le ministère des Finances tunisien indiqueraient que la dette publique atteindrait presque les 140 milliards de dinars, l’équivalent de 120 % du produit intérieur brut. On note une augmentation de 25 milliards de dinars par rapport à 2022. Malgré un accord conclu avec le FMI en octobre pour l’obtention d’un prêt d’1,7 milliard d’euros, le pays pourrait se retrouver en situation de défaut de paiement. Par ailleurs, la crise économique profonde qui traverse le pays a pour conséquence une augmentation de l’économie noire et de la contrebande. Selon un reportage mis en ligne par nos confrères de TV5 monde en mars 2023, à la frontière entre la Tunisie et la Libye, le commerce informel de marchandises libyennes se serait considérablement développé.
La dérive autoritaire de Kaïs Saïed
Au-delà de la forte crise économique, la Tunisie est victime d’une dérive autoritaire progressive du pouvoir en place depuis 2021, deux ans après l’élection du président de la République Kaïs Saïed. En effet, en juillet 2021, après des manifestations contre le gouvernement tunisien, le président a décidé de geler les activités du parlement et de limoger le chef du gouvernement Hichem Mechichi. Deux mois plus tard, il promulgue des dispositions exceptionnelles renforçant le pouvoir du président au détriment de celui du parlement, fragilisant ainsi la toute récente démocratie tunisienne. En février 2022, pour renforcer davantage son pouvoir, il dissout le Conseil de la magistrature et le parlement. C’est au tour du parlement d’être dissout en mars 2022, sans engagement sur la tenue d’élections législatives anticipées comme le prévoit la Constitution. Depuis des mois, des avocats, des journalistes et des opposants sont poursuivis à cause de déclarations et sont accusés de complot contre l’État. À la fin du mois d’avril, le chef du principal parti d’opposition Rached Ghannouchi a été arrêté et emprisonné.
L’Europe face à un afflux de réfugiés tunisiens ?
La crise économique majeure ainsi que la dérive du pouvoir tunisien pourraient engendrer une crise migratoire frappant l’Europe. Plusieurs hautes personnalités européennes sont très inquiètes de la situation en Tunisie. Réunis à Bruxelles le 20 mars, les ministres des Affaires étrangères des vingt-sept États membres déclaraient craindre un « effondrement de la Tunisie » et une éventuelle crise migratoire. « Si la Tunisie s’effondre, cela risque de provoquer des flux migratoires vers l’UE et entraîner une instabilité dans la région ANMO (Afrique du Nord et Moyen-Orient). Nous voulons éviter cette situation », a déclaré le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell.
De son côté, la cheffe du gouvernement italien, Giorgia Meloni, a alerté sur la situation financière et le défaut de paiement qui favoriserait un afflux massif de réfugiés dont l’Italie serait la première ligne.
L’afflux d’immigrés tunisiens a déjà commencé. Sur le réseau social Twitter, le 24 avril, l’entrepreneur et président du club Italie-France Edoardo Secchi indiquait que 90 % des jeunes Tunisiens souhaiteraient quitter leur pays, ajoutant qu’au cours des trois premiers mois de l’année 2023, « la Garde nationale tunisienne a intercepté et ramené 14.406 migrants, contre 2532 l’année dernière ». Et sur la même période, 18.893 migrants sont arrivés sur les côtes italiennes, dont 2764 avaient des passeports tunisiens.
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