ARTS ET CULTURE

La Vérité et son jumeau, partie 2 : Mendacium (le Mensonge) en grand

janvier 30, 2025 21:50, Last Updated: janvier 31, 2025 5:42
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Dans la première partie, nous avons examiné les origines mythologiques de la Vérité (Veritas) et du Mensonge (Mendacium). Nous avons établi qu’ils étaient comme des jumeaux : parfois très difficiles à distinguer l’un de l’autre. Nous avons également souligné que Mendacium, parce qu’elle n’avait pas de pieds, était immobile et déséquilibrée.

Si nous réfléchissons à la signification de cette imagerie – en gardant à l’esprit que les mythes nous disent des vérités psychologiques ou même des vérités spirituelles profondes – nous nous rendons compte que le fait d’être sans pieds, d’être immobile, signifie que nous ne sommes pas libres. L’essence de la liberté est que nous sommes libres de nous déplacer, où et quand nous le voulons. Si, à un moment ou à un autre de notre vie, nous ne pouvons pas bouger, on ne peut pas vraiment dire que nous sommes libres.

Si la vérité et le mensonge peuvent sembler identiques, ils sont comme des jumelles, qui peuvent vraiment être très différentes, comme le suggère le tableau Les jumelles, portraits de Kate et Grace Maud Hoare (1876), de John Everett Millais. Kate (à g.) tient une cravache et sa sœur réservée, un chapeau. Musée Fitzwilliam. (PD-US)

Au niveau religieux, par exemple, le Christ a dit qu’en connaissant la vérité, la vérité nous rendrait libres, et cette idée s’est accompagnée de sa guérison des infirmes physiques – dont certains ne pouvaient même pas se déplacer. En guérissant, et pas seulement en soignant leur corps, il les a libérés. La vérité a cette qualité remarquable : elle nous libère.

En guérissant un paralytique, Jésus a rendu manifeste le principe selon lequel la vérité rend libre. La guérison du paralytique à la piscine de Béthesda, 1643, par Pieter van Lint. Huile sur panneau. Kunsthistorisches Museum (Musée d’Histoire de l’art de Vienne). (Domaine public)

Mais ce n’est pas seulement vrai au niveau spirituel, c’est aussi vrai au niveau politique. Si nous ne pouvons pas nous déplacer, par exemple lors d’un confinement, d’un couvre-feu, d’un embargo et ainsi de suite, nous ne sommes pas libres politiquement. Il ne faut pas se méprendre : il peut y avoir de bonnes raisons de restreindre la liberté dans le cadre d’un confinement, par exemple pour des raisons de santé publique, mais il n’en reste pas moins que cette restriction prive l’individu de sa liberté.

Cette question est donc vraiment importante. D’une certaine manière, ce que je dis, c’est que l’acceptation de Mendacium – le mensonge ou l’erreur – est le précurseur de la perte de liberté. Il n’est pas nécessairement ni immédiatement apparent que nous perdons notre liberté, mais si un nombre suffisant de personnes souscrivent collectivement à Mendacium, alors aussi sûrement que la nuit suit le jour, nos libertés sont érodées et nous devenons esclaves d’idéologies fausses et mensongères.

Règles de Mendacium

Aujourd’hui, nous sommes assaillis de toutes parts par une telle idéologie mensongère, Mendacium, qui menace de saper toutes nos libertés. Pour l’identifier, l’écrivain anglais Theodore Dalrymple en a peut-être saisi l’essence même lorsqu’il a écrit : « Il [Stefan Zweig] aurait vu avec horreur la cacophonie des monomanies – sexuelles, raciales, sociales, égalitaires – qui marque la vie intellectuelle de nos sociétés, chaque monomaniaque exigeant une restriction législative de la liberté des autres au nom d’un soi-disant plus grand bien collectif. »

Remarquez la force du sentiment dans cette déclaration : non pas des personnes, mais des monomaniaques exigeant quoi ? Notre liberté au nom d’un « prétendu plus grand bien collectif ».

Et nous ne devrions pas penser que le danger ne peut venir que de monomaniaques évidents (et de communistes avoués) – aussi visibles que soient certains d’entre eux, manifestant agressivement dans nos rues – le danger de Mendacium peut être beaucoup plus subtil. Il peut s’agir d’un mensonge généré par une contradiction interne difficile à déceler.

Camille Paglia commente, dans son livre Sexual Personae, le libéralisme moderne et son lien avec le féminisme : « Le libéralisme moderne souffre de contradictions non résolues. Il exalte l’individualisme et la liberté et, dans son aile radicale, condamne les ordres sociaux comme oppressifs. D’un autre côté, il attend de l’État qu’il subvienne aux besoins matériels de tous, ce qui n’est possible qu’en élargissant l’autorité et en gonflant la bureaucratie […]. En d’autres termes, le libéralisme définit le gouvernement comme un père tyrannique, mais exige qu’il se comporte comme une mère nourricière […] Le féminisme a dépassé sa mission propre – qui était de rechercher l’égalité politique pour les femmes – et a fini par rejeter la contingence, c’est-à-dire la limitation de l’être humain par la Nature ou le destin. »

La chercheuse Camille Paglia en 2015.( Fronteiras do Pensamento/CC-SA BY 2.0)

N’est-ce pas là l’essence même de Mendacium ? C’est si proche de Veritas. Certes, nous sommes tous d’accord pour dire qu’il est juste que les femmes soient traitées sur un pied d’égalité avec les hommes, mais en cours de route, cette « vérité » s’est transformée – par le biais du libéralisme moderne – en un mensonge. Un mensonge qui nie les « limites humaines », c’est-à-dire la différence réelle entre les hommes et les femmes, ou leur nature.

Le féminisme moderne a également nié le destin. On peut vouloir utiliser un autre mot pour cela – le destin, la providence, le Tao. Mais quel que soit le mot que nous utilisons, nous nous rendrions compte, si nous le comprenions, que les conditions, ou résultats de la vie n’ont jamais été et ne seront jamais égaux. La recherche de l’égalité des résultats est utopique, futile et, en fin de compte, contraire à la liberté.

Car que signifie être libre ? Cela signifie que nous assumons notre propre responsabilité et que, par conséquent, nous obtenons chacun des résultats différents pour nous-mêmes. Au niveau individuel, c’est évidemment vrai, mais nous avons vu dans l’histoire de nombreux efforts collectifs pour renverser cette situation. Comme l’a dit Jordan B. Peterson, « s’il y avait une excuse pour être marxiste en 1917, il n’y en a absolument et définitivement plus aujourd’hui ».

L’empiètement de Mendacium sur le domaine de Veritas semble souvent commencer par de petites choses. Au Royaume-Uni, par exemple, l’homme politique et historien militaire Robert Oulds, dans son livre Moralitis, commente les syndicats d’étudiants qui « garantissent la liberté de se protéger de l’expression par le biais de l’interdiction de s’exprimer et d’espaces sécurisés ». Remarquez l’astuce : « liberté à l’égard de l’expression », et non « liberté d’expression ». Cela semble presque drôle jusqu’à ce que l’on se rende compte qu’il s’agit des jeunes de cette génération universitaire, dont on pensait qu’ils allaient à l’université – comme nous l’avons fait – pour élargir et développer leur esprit.

Alors que les utopies promettent un paradis fondé sur l’égalité terrestre, elles nous offrent des enfers dystopiques. Escaping the Dome, 2014, photomontage d’images d’Eric Perrone et yumikrum. (Yumikrum/CC SA-BY 2.0)

Les universités n’étaient-elles pas des lieux de débats célèbres ? Il semble que ce ne soit plus le cas. Aujourd’hui, la plupart des étudiants ne supportent pas une idée qui va à l’encontre de leurs préjugés mal informés. Pire, cette intolérance est comme un cancer insidieux, qui se propage de telle sorte que bientôt tout le corps en est atteint.

En citant à nouveau Dalrymple, nous aboutissons à « une société de “menteurs émasculés” qui sont très faciles à contrôler ».

Notre chemin vers la vérité

Comment résister à ce travail de sape insidieux de tout ce qui nous est cher ? Il est clair qu’il n’y a pas de réponse facile, car s’il y en avait une, le problème ne se poserait pas. Mais je fais deux suggestions qui me semblent pertinentes.

L’une d’entre elles est un journalisme honnête du type de celui que le journal Epoch Times préconise. Il faut résister aux « fake news » et au contrôle des médias sociaux qui prévalent actuellement. D’une certaine manière, il s’agit d’une question immédiate et de première ligne.

Statue de Veritas (la Vérité), par Walter Seymour Allward. À l’extérieur de la Cour suprême du Canada, à Ottawa, Ontario, Canada. (D. Gordon E. Robertson/CC BY SA 3.0)

Mais les choses plus profondes et à plus long terme sont liées au type de culture dans laquelle nous vivons et aux valeurs qu’elle adopte, ou qu’elle prétend adopter, car il arrive fréquemment que les actions contredisent les valeurs adoptées. En particulier, je pense que nos arts sont d’une importance primordiale dans cette bataille pour les cœurs et les âmes des gens, en particulier de la jeune génération. Pourquoi ? Parce que ce sont les arts – la littérature, le théâtre, la musique et les arts visuels – qui influencent le plus nos émotions. En l’absence de toute tradition spirituelle ou religieuse omniprésente, notre sens de la création ne peut provenir que de ces sources.

Le problème, c’est qu’une grande partie de l’« art » d’aujourd’hui, soit est entièrement nihiliste, soit n’est pas de l’art du tout ! John Habgood (ancien archevêque de York) a observé il y a quelque temps : « Le fait que peu d’œuvres d’art semblent aujourd’hui inspirées par des thèmes explicitement religieux peut cependant être le reflet de la banalisation et de la désorientation de l’art lui-même. »

L’art inspiré par le divin, comme il l’était dans le passé, peut nous affecter profondément. John Habgood, ancien archevêque d’York, pensait que le fait qu’une grande partie de l’art d’aujourd’hui soit séparée de la religion pourrait refléter la « banalisation et la désorientation de l’art lui-même ». Mains en prière, vers 1508, d’Albrecht Dürer. (Musée d’art Albertina à Vienne, Autriche. PD-US)

Le problème, c’est que les gens ne croient plus en rien, même pas en quelque chose d’aussi fondamental que la forme elle-même. En poésie, nous avons maintenant des « vers libres », c’est-à-dire, en général, des poèmes sans aucune structure. Et sans forme, très peu de beauté – ou de vérité. Ce qui est vrai pour la poésie d’aujourd’hui l’est aussi pour les autres formes d’art. Nous savons tous cela à propos des arts mais, comme pour les nouveaux vêtements de l’empereur, nous aimons prétendre le contraire.

C’est pourquoi nous devons insister pour que l’art redécouvre les mythes d’antan, mais pour une génération contemporaine. Le grand critique Northrop Frye a dit : « Un mythe est conçu non pas pour décrire une situation spécifique, mais pour la contenir d’une manière qui ne limite pas sa signification à cette seule situation. Sa vérité se trouve à l’intérieur de sa structure, pas à l’extérieur. »

C’est la vraie jumelle, Veritas, qui oblige à l’assentiment parce que sa vérité est intérieure, interne, et qu’elle est la seule qui puisse vraiment tenir debout.

La première partie de « La vérité et son jumeau » explique le mythe de Veritas et de Mendacium ∼ La vérité et son jumeau , partie 1 : où est le vrai ?

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