L’Assemblée générale des actionnaires de TotalEnergies s’est ouverte vendredi à Paris, sous pression des militants du climat, massés à l’extérieur, mais aussi du gouvernement, qui l’appellent à se détourner des énergies fossiles.
Le PDG du groupe a ouvert comme prévu à 10h00 son assemblée annuelle, que quelques centaines de manifestants ont tenté de bloquer, en vain après avoir été repoussés par les gaz lacrymogènes des forces de l’ordre. « Nous le regrettons, nous avons dû prendre des mesures exceptionnelles tant dans l’appel aux forces de l’ordre que d’un contrôle strict d’accès à cette assemblée », a déclaré Patrick Pouyanné en ouvrant la séance devant 200 à 300 personnes, dans une salle de concerts parisienne protégée depuis la veille par vigiles et barrières.
Quatre personnes interpellées « à ce stade »
Dès l’aube, des dizaines de manifestants ont tenté de pénétrer dans le tronçon de rue passant devant la salle Pleyel, dans les beaux quartiers parisien. Une dizaine d’entre eux, assis devant l’entrée, ont été délogés par les forces de l’ordre qui ont fini par projeter du gaz lacrymogène au milieu du groupe. Les manifestants sont néanmoins restés à proximité, environ une centaine de chaque côté du segment de rue, bloqué par des camions de police et gendarmerie. Quatre personnes ont été interpellées « à ce stade », selon la police.
Au même moment, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher a appelé TotalEnergies à « mettre le paquet » sur les énergies renouvelables. « Total investit dans les énergies renouvelables, mais l’enjeu, c’est d’aller plus vite, plus fort et surtout plus rapidement », a déclaré sur FranceInfo la ministre, pour qui les entreprises pétro-gazières « doivent se réinventer, sortir des énergies fossiles ».
« On ne les lâchera pas »
Arrivés au compte-gouttes, les actionnaires ont été accueillis par les cris des protestataires. L’un d’eux, Jean-Paul (qui ne veut pas donner son nom) a expliqué à l’AFP avoir une « sensibilité écologique » : « On est tous concernés par les phénomènes climatiques, mais il y a aussi des aspects économiques, d’emploi. C’est plus compliqué que ça ». « Assassins ! Criminels ! », lançaient certains manifestants.
« On ne les lâchera pas », assurait de son côté Marie Cohuet, porte-parole de l’association Alternatiba, pour qui l’entreprise « incarne le pire de ce qui se fait en termes d’exploitation des populations et de la planète ». Le blocage est organisé avec d’autres associations dont Amis de la Terre, ANV-COP21, Attac, Greenpeace, Scientifiques en rébellion et Extinction Rebellion.
Cette réunion arrive à la fin d’une saison d’AG houleuses, au cours de laquelle les actions se sont multipliées contre les grands groupes sur fond de profits faramineux : ensemble, BP, Shell, ExxonMobil, Chevron et TotalEnergies affichent plus de 40 milliards de dollars de bénéfices ce trimestre, après une année 2022 grandiose.
Des plaques en plexiglas de deux mètres de haut
À l’intérieur, TotalEnergies a interdit aux actionnaires et aux journalistes d’utiliser leurs téléphones portables, les obligeant à laisser certains effets personnels à l’entrée. Du jamais vu, des plaques en plexiglas de deux mètres de haut ont été dressées entre la scène où ont pris place les dirigeants, et le public.
Les quelque 1,5 million d’actionnaires individuels, présents ou en ligne, seront appelés à voter deux fois sur le climat : une sur la stratégie climat du groupe, qui devrait être adoptée, et une autre, consultative, émanant de l’organisation d’actionnaires activistes Follow This, qui demande à TotalEnergies d’aligner ses objectifs de réduction d’émissions sur l’Accord de Paris de 2015, pour limiter le réchauffement planétaire à +1,5°C par rapport à l’ère pré-industrielle.
Un tiers des investissements du groupe prévu dans les énergies bas carbone
Parmi ces 17 investisseurs, qui détiennent près de 1,5% de TotalEnergies, figurent La banque PostaleAM, Edmond de Rotschild AM, La Financière de l’Échiquier. Même si le groupe n’envisage pas de baisser significativement ses émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre dans la décennie, il entend consacrer un tiers de ses investissements dans les énergies bas carbone et atteindre 100 GW de capacités d’électricité renouvelable d’ici 2030.
Son PDG Patrick Pouyanné, dans une interview à La Croix mercredi, récuse les critiques, et explique qu’il doit notamment répondre à la demande croissante des pays en développement. « Non, TotalEnergies ne peut pas tout seul faire diminuer la demande de pétrole », martèle-t-il, appelant à se concentrer sur « la fin du charbon ».
Une hausse de 10% de la rémunération du PDG à l’ordre du jour
TotalEnergies est présent dans de nombreux projets de gaz naturel liquéfié et de pétrole, aux Émirats arabes unis, en Irak, en Papouasie ou encore en Ouganda, avec le projet controversé de l’oléoduc chauffé Eacop devenu un symbole médiatisé de la lutte anti-pétrole. Cette polémique s’ajoute à bien d’autres pour la major, critiquée pour son bénéfice record de 20,5 milliards de dollars (19,12 milliards d’euros) en 2022, ses impôts en France ou le salaire du PDG. Une hausse de 10% d’une partie de sa rémunération pour 2023 est d’ailleurs à l’ordre du jour de l’AG.
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