Le côté obscur des investissements et des prêts chinois au Sri Lanka

Les investissements chinois ont été financés par des banques publiques chinoises à des taux d'intérêt élevés et sans transparence, laissant le Sri Lanka lourdement endetté auprès de Pékin

Par Panos Mourdoukoutas
23 décembre 2024 16:11 Mis à jour: 23 décembre 2024 17:35

Les investissements et les prêts de la Chine au Sri Lanka ont fait de cette nation insulaire une semi-colonie moderne, plaçant l’avenir de son économie entre les mains des entrepreneurs et banquiers publics de Pékin et du Fonds monétaire international.

Les relations étroites entre le Sri Lanka et la Chine, qui ont conduit le pays dans cette situation désastreuse, ont débuté en 2007 lorsque Pékin a fourni au président Mahinda Rajapaksa une assistance militaire et diplomatique pour lutter contre les Tigres tamouls. Au fil du temps, les deux pays se sont rapprochés grâce aux investissements chinois très médiatisés dans les projets de construction du Sri Lanka, notamment le projet de port en eau profonde de Hambantota, le complexe portuaire de Colombo et l’aéroport international de Mattala Rajapaksa (MRIA).

En théorie, la construction d’infrastructures est indispensable pour permettre aux pays en voie de développement comme le Sri Lanka de mettre en place une économie de marché, de stimuler leur croissance économique et de devenir un centre commercial régional.

Toutefois, ce n’est pas ainsi que les investissements chinois dans les infrastructures de cette petite nation insulaire ont fonctionné concrètement.

La construction de ces projets a d’abord stimulé la croissance économique par l’« effet multiplicateur ». La croissance du PIB du Sri Lanka est passée d’un pourcentage à un chiffre en 2009 à 16,12 % en 2012, mais elle a diminué pendant le reste de la décennie.

Il y a une bonne explication à ce schéma. Les trois grands projets d’infrastructure ont été menés selon des critères politiques plutôt qu’économiques, servant les intérêts de Pékin, qui souhaite étendre sa présence dans l’océan Indien et encercler l’Inde, et non les intérêts de l’économie locale.

En conséquence, les investissements chinois n’ont pas eu l’effet d’accélérateur nécessaire pour stimuler la croissance économique en construisant des projets d’infrastructure durables.

Certains projets ne sont économiquement pas viables, car ils ne desservent pas un marché suffisamment important pour justifier les ressources qui leur sont allouées, comme l’aéroport MRIA. Par conséquent, ils finissent par gaspiller les précieuses ressources du pays.

D’autres projets sont économiquement viables mais sont construits par des entreprises de construction publiques chinoises à des coûts excessivement élevés, au lieu d’être confiés à des entrepreneurs privés au terme d’appels d’offres transparents et concurrentiels.

En outre, les investissements chinois se sont transformés en pièges à dettes, puisqu’ils ont été financés par des prêts accordés par des banques publiques chinoises à des taux d’intérêt élevés et sans transparence, laissant le Sri Lanka lourdement endetté auprès de Pékin.

La dette publique du Sri Lanka s’élevait à 103 % du PIB en 2023, dont une part croissante due à la Chine. En outre, les déficits budgétaires du gouvernement sri-lankais s’élèvent à 10,51 % de son PIB, aggravant ainsi son endettement.

La dette croissante du pays est apparue alors que le Sri Lanka vivait déjà au-dessus de ses moyens, comme en témoignent les déficits persistants des finances publiques et de la balance courante.

Pour faire face à l’augmentation de sa dette envers la Chine, le Sri Lanka a signé des accords avec la Chine qui prévoient l’échange de prêts contre des participations, transformant ainsi la Chine en propriétaire de projets d’infrastructure importants comme le principal port du Sri Lanka et un avant-poste clé dans l’océan Indien pour Pékin.

« En 2016, une entreprise publique chinoise a acheté l’actif du port de Hambantota, suscitant des inquiétudes quant à la souveraineté du Sri Lanka et aux ambitions navales chinoises à Delhi et à Washington », écrivent Meg Rithmire et Yihao Li dans un document de recherche de la Harvard Business School. « Cette étude explore la dynamique de l’ambitieuse initiative chinoise Ceinture et Route, un projet d’infrastructure et de connectivité à grande échelle lancé sous la houlette de son puissant dirigeant, Xi Jinping, ainsi que la politique et l’économie des emprunts souverains à l’ère des prêts chinois. »

Toutefois, ces accords n’ont pas suffi à empêcher le pays de demander un allègement de sa dette au Fonds monétaire international (FMI).

En mars 2023, l’institution basée à Washington, connue pour ses conditions de prêt strictes, a accordé un prêt de 2,9 milliards de dollars pour atténuer la crise de la balance des paiements. Cette crise a rendu difficile l’importation de produits essentiels tels que la nourriture, le carburant et les médicaments, provoquant des troubles sociaux.

Mais le prêt était assorti de conditions, comme le fait de dicter l’orientation future de la politique économique du pays.

« Le maintien de la stabilité macroéconomique et le rétablissement de la viabilité de la dette sont essentiels pour assurer la prospérité du Sri Lanka et nécessitent de poursuivre une politique budgétaire responsable », a déclaré le FMI dans une transcription définissant les termes et conditions du prêt. « Des efforts continus de mobilisation des recettes et de restriction des dépenses sont nécessaires pour préparer le budget 2025 conformément aux paramètres du programme. »

Les investissements de la Chine sont censés aider le Sri Lanka à croître et à se développer. Au lieu de cela, ils ont plongé l’économie sri-lankaise dans une tempête parfaite, plaçant le Sri Lanka dans une situation qu’aucun pays ne souhaite : compter sur le FMI et la Chine pour sa survie.

Cet article est le second de la série « Le côté obscur des investissements chinois ».

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