Le Grand Vishnu, chef d’œuvre de l’art khmer du 11e siècle, minutieusement restauré à Nantes

Par Epoch Times avec AFP
15 février 2025 11:40 Mis à jour: 15 février 2025 11:49

Combinaison blanche à capuche, masque sur le visage, le conservateur projette une poudre couleur sable sur le buste du Grand Vishnu. Chef d’œuvre de l’art khmer, cette statue monumentale cambodgienne est de passage à Nantes pour une restauration de haute précision.

Dans une cabine de quatre mètres sur trois au cœur du laboratoire Arc’Antique, Stéphane Lemoine, responsable de la restauration du Vishnu, achève la phase de nettoyage.

« Feuilles d’or »

Sur le buste horizontal, appuyé sur deux bras droits – ses deux bras gauches ont disparu – le restaurateur propulse à l’aide d’un fin tuyau une poudre végétale « particulièrement douce » qui agit « comme un gommage ».

Sous la pellicule brune qui avait recouvert la statue, le vert pastel issu de la corrosion du bronze réapparaît. À peine visibles, des fragments dorés de quelques millimètres de large ont aussi refait surface.

« À l’origine, le Vishnu était intégralement doré. Avec la corrosion, les feuilles d’or ont été endommagées. Quant à la couleur brune, elle résulte sûrement de la pollution atmosphérique de Phnom Penh, où elle était exposée depuis de nombreuses années », raconte Stéphane Lemoine.

Un technicien travaille sur Le Vishnu couché du Mébon occidental. (SEBASTIEN SALOM-GOMIS/AFP via Getty Images)

Près de six mètres de long

Découverte en 1936 sur le site d’Angkor, cette sculpture monumentale du « Vishnu du Mébon occidental », datée du XIe siècle, compte parmi les rares représentations de ce dieu de l’hindouisme sous sa forme couchée.

Habituellement conservée au musée national du Cambodge, elle est actuellement restaurée à Nantes avant d’être présentée en mai 2025 au musée Guimet des arts asiatiques, puis aux États-Unis.

La statue y sera montrée sous une forme jamais vue auparavant : le laboratoire Arc’Antique s’apprête, une fois le nettoyage terminé, à apposer au buste des fragments retrouvés au fil des années sur son site d’origine. Sur les 84 morceaux répertoriés, une quinzaine seront rassemblés en trois à quatre blocs placés dans la continuité du buste. D’après les experts, la statue mesurait à l’origine près de six mètres de long.

« Grande décision »

Un tout nouveau soclage sur mesure « discret » mais « primordial » viendra achever la restauration du Vishnu. « Il faut imaginer que l’on décide d’emmener la Vénus de Milo au Cambodge pour la faire restaurer. C’est la même importance pour les Cambodgiens d’accepter de se séparer de cette statue pendant plusieurs mois, voire quelques années. C’était une grande décision politique », a affirmé Yannick Lintz, présidente du musée Guimet, de passage à Nantes en janvier pour la présentation du projet.

(SEBASTIEN SALOM-GOMIS/AFP via Getty Images)

« De grands spécialistes » en France

« La grande compétence de nos collègues cambodgiens est la sculpture en pierre. Le bronze est un matériau qui leur est moins familier, et nous avons la chance en France d’avoir de grands spécialistes », a-t-elle ajouté.

Le plan de restauration élaboré par Arc’Antique a été approuvé fin janvier par le ministère de la Culture cambodgien et la restauration a pu commencer dans la foulée. « Ce laboratoire spécialisé va nous aider à traiter la statue et nous offrir des recommandations pour en prendre soin après son retour au Cambodge. Nous voulons que cette statue unique perdure dans le temps », s’est réjoui Chhay Visoth, directeur du musée national du Cambodge.

(SEBASTIEN SALOM-GOMIS/AFP via Getty Images)

Arrivée en France au printemps 2024, la statue a d’abord fait l’objet d’analyses et d’imageries de pointe au C2RMF, à Paris, centre de recherche et de restauration des musées de France. Probable « œuvre de commande royale » selon Brice Vincent, archéologue de l’École française d’Extrême Orient, le Vishnu pourrait avoir été fabriqué au sein de la fonderie du palais royal d’Angkor, découverte en 2012.

Une fois restaurée, la statue sera au cœur de l’exposition que le musée Guimet consacrera jusqu’au 8 septembre aux bronzes royaux d’Angkor. Elle réunira plus de 210 œuvres, dont 126 prêts du musée national du Cambodge.

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