Une vieille blague soviétique commence par une question : Quel a été l’événement historique le plus important dans le monde en 1875 ? La réponse : Vladimir Lénine a eu 5 ans.
Comme l’indique la blague, Lénine était tenu en grande vénération dans toute l’Union soviétique — comme en témoignent les nombreux lieux et institutions qui étaient nommés à sa gloire dans différentes républiques de l’ex-URSS : Léningrad en Russie, Léninsk au Kazakhstan, Léninogorsk au Tatarstan, etc. Le mausolée où le corps embaumé de Lénine est conservé au centre de la place Rouge à Moscou est toujours le lieu de culte le plus vénéré de Russie. Sa stature est si emblématique que lors du soulèvement ukrainien de 2013-2014 contre le gouvernement pro-russe de Viktor Ianoukovytch, la colère populaire s’est exprimée par un « Léninopad » — un renversement massif de quelque 5500 statues de Lénine en Ukraine.
Le 21 janvier a marqué le 100e anniversaire de la mort de Lénine, ce qui a naturellement inspiré dans de nombreux médias des commentaires sur ses idées, ses actions et son influence. La plupart de ces commentaires ont été réfléchis et bien informés, tandis que d’autres choquaient par leur légèreté et leur ignorance.
Pour illustrer ce dernier point, je citerai une discussion sur YouTube — prétendument en l’honneur de Lénine – entre trois jeunes femmes membres du Parti du socialisme et de la libération américain. Ces trois femmes, qui portaient toutes des keffiehs palestiniens à carreaux, ont discuté pendant plus d’une heure. Il s’agissait d’un échange extraordinairement superficiel, essentiellement consacré au dénigrement de l’Amérique et de l’Occident en général et à l’autosatisfaction d’être du bon côté de l’histoire – et ce, accompagné d’un nombre de tropes marxistes-léninistes, prononcés comme des antiennes, mais jamais développés de manière cohérente.
On ne peut comprendre Lénine, disait l’une d’elles, que si l’on est dans un Parti marxiste-léniniste. Une fois dans ce parti, on doit « se débarrasser de son ego ». On doit « lutter ». On doit « comprendre le contexte ». Les trois femmes ont chanté les louanges au soutien de Lénine à l’opprimé et à sa croyance en la libération des peuples opprimés comme les Palestiniens. Le Hamas et son attaque sanglante du 7 octobre ne devaient donc pas être « condamnés ».
C’était surtout du charabia, mais j’ai tenu bon pendant une heure en pensant que cela pourrait mettre en lumière un écart entre les opinions de la génération Z (personnes nées entre 1996 et 2010) et des générations plus âgées vis-à-vis de l’attaque terroriste du Hamas dans le sud d’Israël. Un récent sondage, par exemple, montre que 95% des Américains de plus de 65 ans soutiennent Israël. Mais parmi les jeunes de 18 à 24 ans, près de la moitié — 48% — soutiennent le Hamas. Quel est alors l’avenir d’une culture dans laquelle la moitié de la population ne peut pas faire la distinction entre une protestation politique légitime et une soif de sang hystérique ?
Il est révélateur qu’en aucun moment de la conversation de ces trois femmes sur leur gourou vénéré Lénine, les mots « terreur » simulacre de procès » ou « camps de concentration » n’ont été prononcés. Bien que ces termes caractéristiques du régime soviétique soient habituellement associés au règne de Joseph Staline — un autre tyran communiste qui a succédé à Lénine — ces termes ont tous été inaugurés par Lénine.
Peut-être peu consciente de ce fait, l’organisatrice de la discussion a lancé une remarque : « Lénine est tellement mal compris qu’il est facile de mal interpréter ce qu’il disait. » Elle n’a donné aucun exemple. Pourquoi l’a-t-elle dit ? Lénine maîtrisait parfaitement l’art de se présenter comme le champion de la justice pour le prolétariat, mais il n’a jamais caché ses moyens préférés pour parvenir au pouvoir au nom du prolétariat. Vladimir Nabokov, l’éminent auteur né en Russie, a donné une parfaite caractéristique de la personnalité de Lénine en le comparant à « un seau de lait de bonté humaine avec un rat mort au fond ».
Les régimes précédant les dictatures communistes ont eu recours au terrorisme pour soumettre d’autres tribus et d’autres peuples. Le régime communiste des Soviets se distinguait par la terreur qu’il faisait régner sur son propre peuple. Lénine a fondé la tristement célèbre police politique de la Tchéka immédiatement après le coup d’État bolchevique. C’est vrai que de nombreux tsars russes avaient été cruels et arbitraires, mais le nombre de personnes qu’ils avaient exécutées était dérisoire par rapport au nombre de personnes qui avaient été assassinées par centaines de milliers et par millions par la Tchéka de Lénine et son successeur – le NKVD (prédécesseur du KGB) sous Staline. Comme l’a formulé un jour Staline : « La mort d’un homme est une tragédie. La mort d’un million d’hommes est une statistique. »
Il est estimé que Lénine a massacré au total plus d’un million de personnes pour des raisons politiques ou religieuses. Il a présidé à la mort de quelque deux millions de résidents du Goulag et de plus de huit millions d’autres victimes de la famine ou de maladie. À cela s’ajoutent 700.000 victimes du génocide des Cosaques lors de la Terreur rouge, plus de 240.000 hommes, femmes et enfants lors de la rébellion de Tambov en 1920, plus de 3000 marins et civils lors de la rébellion de Kronstadt en 1921, ainsi que des milliers et des milliers de travailleurs qui ont osé se mettre en grève ou qui n’ont pas été en mesure de travailler.
Dans L’Archipel du Goulag, le célèbre écrivain russe Alexandre Soljenitsyne constate que les protagonistes tragiques de Shakespeare se contentaient d’assassiner une poignée de personnes. Et lorsqu’ils le faisaient, ils se tourmentaient par la suite à cause de leur crime, parce qu’ils avaient une conscience. Ils cessaient de tuer, explique Soljenitsyne, car « ils n’avaient pas d’idéologie ». On comprend tout de suite le sens et la véracité de cette affirmation. Il y a une énorme barrière de mal et de cruauté entre les Macbeths de Shakespeare d’un côté et les Hitlers, Stalines, Mao Zedongs, Che Guevaras et Oussama ben Ladens, de l’autre.
Lénine savourait le terrorisme comme une fin en soi. On peut sentir la soif de sang derrière plusieurs directives qu’il a données à ses subordonnés. Par exemple, dans sa réponse à un épisode de résistance à la confiscation par les bolcheviks des produits agricoles des « koulaks » — ces paysans prospères que Lénine surnommait la « bourgeoisie de village » : « Le soulèvement koulak dans [vos] cinq districts doit être écrasé sans pitié (…) 1) Pendez (et je veux dire pendez de manière à ce que les gens puissent voir) pas moins de 100 koulaks connus, les hommes riches, les sangsues. 2) Publier leurs noms. 3) Retirez-leur toutes leurs céréales. 4) Identifiez les otages (…) Faites cela de manière à ce que, sur des centaines de kilomètres, la population puisse voir, trembler, savoir et pleurer (…) Bien à vous, Lénine. P.S. Trouvez [pour le faire] des gens les plus durs. » Lénine a appliqué les mêmes méthodes de « libération » dans toute la Russie.
Dans son analyse bien pertinente intitulée Leninthink (PenserLénine) et publiée dans New Criterion, Gary Saul Morson, l’expert renommé de la littérature slave, cite Lénine qui, en 1908, recommandait « une véritable terreur à l’échelle nationale qui revigorerait le pays ». Il recommandait régulièrement que les gens soient fusillés « sans pitié » ou « exterminés impitoyablement ». Bien avant que les nazis n’en viennent à qualifier les Juifs de « vermine », Lénine appelait à « nettoyer le sol de la Russie de tous les insectes nuisibles, des canailles, des puces, des punaises – des riches, etc. » Lénine a même insisté – une première dans l’histoire – pour que la terreur et l’usage arbitraire du pouvoir soient inscrits dans le code juridique des Soviets. « La loi ne doit pas abolir la terreur », a-t-il écrit. « Elle doit être justifiée et légalisée en principe, sans évasion ni embellissement. »
En juillet dernier, l’éditorialiste David Volodzko a été renvoyé du comité éditorial du Seattle Times pour avoir critiqué la statue de Lénine de 5 mètres de haut érigée dans la ville de Seattle. Un jour, raconte M. Volodzko, quand il était en compagnie de son patron du Seattle Times et d’un stagiaire, ce dernier a déclaré : « La Russie soviétique était le meilleur pays de l’histoire. » Lorsque le stagiaire a été informé que les Soviétiques ont massacré des membres de la famille de M. Volodzko, le jeune homme « a souri, m’a regardé en face et m’a dit : ‘Je pense que certaines de ces violences étaient nécessaires’ ».
Si la conversation avait eu lieu aujourd’hui, le stagiaire aurait probablement porté un keffieh et aurait expliqué pourquoi les atrocités commises par le Hamas le 7 octobre étaient « nécessaires » et ne devaient donc pas être condamnées. Lénine est mort il y a 100 ans, mais le léninisme est bien vivant en Occident parmi d’innombrables « idiots utiles » — une expression dont l’origine est souvent attribuée aussi à Lénine.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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