Cet article reprend les éléments du discours tenu publiquement par David Matas à l’Université d’Australie-Méridionale, à Adélaïde, le 28 juin 2015.
- L’Organisation mondiale de la santé
L’Organisation mondiale de la santé a passé une résolution en janvier 2015 qui stipule que : « le Conseil exécutif [de l’OMS], ayant examiné le rapport du Secrétariat sur les produits sanguins et les autres produits médicaux d’origine humaine, (3) a reconnu que la protection du donneur est une condition préalable pour répondre aux besoins des patients en termes d’accès à des produits médicaux d’origine humaine, lequel est d’une grande importance dans le contexte de la couverture sanitaire universelle ; (5) a reconnu qu’il faut parvenir, sur la base de bons mécanismes de gouvernance, à un consensus mondial sur le don et la gestion des produits médicaux d’origine humaine, destinés à une application clinique chez l’homme pour protéger les droits fondamentaux des donneurs ; (6) a reconnu enfin que des normes communes garantissant la qualité et la sécurité des produits médicaux d’origine humaine et assurant la traçabilité, la vigilance, la surveillance, ainsi que l’accès équitable à ces produits, sont essentielles pour le bien des receveurs ; (7) prie le Directeur général d’organiser des consultations avec les États membres et les partenaires internationaux afin de soutenir la création d’un consensus mondial sur des principes directeurs d’éthique concernant le don et la gestion des produits médicaux d’origine humaine mentionnés, la mise au point de bons mécanismes de gouvernance et l’élaboration d’instruments communs assurant la qualité, la sécurité et la traçabilité, ainsi que l’accès équitable et la disponibilité, le cas échéant, et de présenter un document dans ce sens qui sera soumis à la soixante-dixième assemblée mondiale de la santé pour examen. »
La soixante-dixième assemblée mondiale de la santé est prévue en mai 2017 à Genève (Suisse). Nous devrons être en mesure de tracer le cheminement d’un organe et d’identifier son donneur dans le but de déterminer si le don a été volontaire ou non. La traçabilité devrait nous permettre de réaliser cela.
- Le Conseil de l’Europe
Les Nations Unies et le Conseil de l’Europe ont tous deux des traités sur le trafic humain qui interdisent l’ablation sans consentement d’un organe destiné à la vente. Le Conseil de l’Europe a, de plus, une Convention spécifique sur le trafic d’organes. Le traité des Nations Unies est un Protocole additionnel à la Convention contre la criminalité transnationale organisée. Le protocole est entré en vigueur en décembre 2003. La convention du Conseil de l’Europe est entrée en application en décembre 2005.
La Convention du Conseil de l’Europe contre le trafic d’organes humains est beaucoup plus récente. Elle a été ouverte à la signature cette année en mars 2015. Elle n’est pas encore entrée en vigueur.
La première Convention du Conseil de l’Europe mentionne simplement dans son article 5 : « Chaque partie prend les mesures législatives et autres mesures nécessaires pour ériger en infraction pénale, conformément à son droit interne, lorsque l’acte a été commis intentionnellement, l’utilisation d’organes prélevés de manière illicite, telle qu’elle est décrite à l’article 4 ».
L’article 4 définit le trafic, en incluant le trafic d’organes. Cette clause est similaire à celle du Protocole des Nations Unies. Le Protocole mentionne dans l’article 5 au premier paragraphe : « Chaque État partenaire adopte les mesures législatives et autres mesures nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale aux actes énoncés à l’article 3 du présent Protocole, lorsqu’ils ont été commis intentionnellement. »
La Convention du Conseil de l’Europe relative au trafic d’organes peut être signée par les États membres du Conseil de l’Europe, de l’Union européenne et par les États non membres ayant un statut d’observateur. Selon l’article 28, elle peut aussi être signée par tout État non-membre du Conseil de l’Europe sur invitation du Comité des Ministres.
Il se peut que tous les aspects du tourisme de transplantation n’aient pas été cernés par les deux Conventions du Conseil de l’Europe et par le Protocole des Nations Unies. Cependant, je suis confiant, toutes ces mesures encadrent les déplacements visant une transplantation, ce qui implique l’achat d’un organe provenant d’un prisonnier de conscience tué pour cet organe.
La Convention du Conseil de l’Europe relative au trafic d’organes est beaucoup plus spécifique que les traités sur le trafic humain en ce qui concerne les infractions qui doivent être décrétées. La convention relative au trafic d’organes stipule : « Article 4 – Prélèvement illicite d’organes humains, a. Chaque partie prend les mesures législatives et autres mesures nécessaires pour ériger en infraction pénale, conformément à son droit interne, lorsque l’acte a été commis intentionnellement, le prélèvement d’organes humains de donneurs vivants ou décédés : b. si, en échange du prélèvement d’organes, le donneur vivant, ou une tierce personne, s’est vu offrir ou a obtenu un profit ou un avantage comparable ; c. si, en échange du prélèvement d’organes sur un donneur décédé, une tierce personne s’est vue offrir ou a obtenu un profit ou un avantage comparable.
« Article 7 – Sollicitation et recrutement illicites, offre et demande d’avantages indus, 1. Chaque partie prend les mesures législatives et autres mesures nécessaires pour ériger en infraction pénale, conformément à son droit interne, lorsque l’acte a été commis intentionnellement, la sollicitation et le recrutement d’un donneur ou d’un receveur d’organes en vue d’un profit ou d’un avantage comparable pour la personne qui sollicite ou recrute ou pour une tierce personne.
« 2. Chaque Partie prend les mesures législatives et autres mesures nécessaires pour ériger en infraction pénale, lorsque l’acte a été commis intentionnellement, la promesse, l’offre ou le don, direct ou indirect, par toute personne, d’un avantage indu à des professionnels de la santé, à ses fonctionnaires ou à des personnes qui, à quelque titre que ce soit, dirigent ou travaillent pour une entité du secteur privé, afin que ces personnes procèdent à un prélèvement ou à une implantation d’un organe humain ou facilitent un tel acte, quand un tel prélèvement ou une telle implantation sont effectués dans des circonstances décrites à l’article 4, paragraphe 1 (…)
« 3. Chaque partie prend les mesures législatives et autres mesures nécessaires pour ériger en infraction pénale, lorsque l’acte a été commis intentionnellement, le fait, pour des professionnels de la santé, ses fonctionnaires ou des personnes qui, à quelque titre que ce soit, dirigent ou travaillent pour une entité du secteur privé, de solliciter ou de recevoir un avantage indu visant à ce que ces personnes procèdent à un prélèvement ou une implantation d’un organe humain ou facilitent un tel acte, quand un tel prélèvement ou une telle implantation sont effectués dans les circonstances décrites à l’article 4, paragraphe 1 (…)
Les Conventions du Conseil de l’Europe traitent spécifiquement de l’aspect extraterritorial du sujet. Cependant, elles limitent l’extraterritorialité aux citoyens. Elles ne précisent pas de juridiction universelle aux infractions.
À propos de l’extraterritorialité, la Convention des Nations Unies et son Protocole additionnel diffèrent. Les Conventions du Conseil de l’Europe l’exigent, en employant le terme « voudrait ». La Convention et le Protocole des Nations Unies le permettent mais ne l’exigent pas, utilisant le mot « pourrait ».
La Convention du Conseil de l’Europe contre le trafic d’organes humains, de mon point de vue, nécessite deux modifications. L’une est l’obligation de rapport. Comme je l’ai indiqué, la législation taïwanaise exige des rapports. Les propositions de lois française et canadienne parlent aussi d’obligation de rapport.
La deuxième modification que je proposerais à la Convention du Conseil de l’Europe concernerait l’article 10 (1) pour y ajouter (f) « par une personne qui est présente sur son territoire » et dans 10 (6) supprimer les termes « seulement sur la base de son ou sa nationalité ». Ces changements feraient du trafic d’organes un crime sous une juridiction internationale ou universelle, pour que toute personne physiquement présente sur le territoire puisse être poursuivie, qu’elle soit citoyenne ou non.
Cette question de la création d’une juridiction universelle d’infraction internationale dans l’ébauche de la Convention, a provoqué la division à l’intérieur du Conseil, à l’étape de l’ébauche, avec 18 voix pour la suppression des termes cités et 20 contre. Comme la suppression n’a pas obtenu le soutien de la majorité, je suggère à la Convention de soumettre un protocole optionnel avec la suppression des mots cités et l’ajout des mots proposés. Les États qui le souhaitent pourront alors signer le protocole.
L’ensemble de ces amendements que je propose sont d’après moi essentiels pour lutter contre le tourisme de transplantation. C’est frappant que le second doive être si controversé, divisant l’Europe en deux. Le clivage illustre un fossé dans un champ. Ce n’est pas seulement en Europe – excepté l’Espagne – que la législation n’est pas en place. En principe il ne devrait même pas y avoir de traité à mettre en place.
Conclusion
Concernant l’Australie, quels sont ses points d’actions qui résultent de ces faits nouveaux ? Le premier est la législation de l’Australie-Méridionale, et de tous les autres États australiens basés sur le modèle proposé au Parlement du New South Wales par David Shoebridge, membre du Parlement.
La seconde action découlant de ces faits nouveaux est de continuer une pratique de non-contact et de non-coopération entre les professionnels chinois et étrangers de la transplantation, jusqu’à ce que les critères établis soient atteints. Je note que l’australien Jeremy Chapman est l’ancien président de la Société de transplantation et que l’australien Philip O’Connell en est son président actuel.
Le troisième point pour l’Australie est de se joindre aux consultations tenues par l’Organisation mondiale de la santé, dans le but de promouvoir des principes éthiques forts sur la transplantation d’organes, des procédures de bonne gouvernance et des outils courants pour assurer la traçabilité des organes.
Un quatrième point est l’adhésion de l’Australie à la Convention du Conseil de l’Europe contre le trafic d’organes. L’Australie devrait solliciter une invitation du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe pour se joindre à cette Convention.
Les répercussions sur le parti communiste en Chine peuvent sembler, depuis la perspective d’Adélaïde, une tâche intimidante. Nous devons rappeler que notre public principal dans nos efforts n’est pas le parti communiste chinois, mais plutôt les familles, les amis et les victimes collatérales des pratiquants. Peu importe ce que arrivons à accomplir, nous devrions faire tout notre possible pour faire savoir à ces familles, amis et victimes collatérales que nous sommes au courant de leur statut de victimes et que nous faisons tout notre possible pour le faire reconnaitre. Si nous pouvons faire cela, nous aurons au moins accompli quelque chose.
David Matas est un avocat international en droit de la personne, basé à Winnipeg, Manitoba (Canada). Il est co-auteur, avec David Kilgour, de Prélèvements meurtriers : des prélèvements forcés d’organes sur des pratiquants de Falun Gong en Chine.
Le point de vue dans cet article appartient à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celui d’Epoch Times.
Article original : The Killing of Falun Gong for Their Organs: Recent Developments
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