Le Premier ministre du Conseil des affaires de l’État chinois, Li Qiang, entame lundi son premier déplacement à l’étranger en Allemagne, partenaire de plus plus en critique de Pékin, avant une visite officielle en France.
Reçu lundi matin par le président allemand Frank-Walter Steinmeier, l’émissaire de Pékin participera ensuite à Berlin aux consultations gouvernementales sino-allemandes avec l’équipe du chancelier Olaf Scholz. Li Qiang, nommé en mars, enchaînera avec une visite officielle en France où il assistera au Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, qui a pour objectif de réformer l’architecture de la finance mondiale afin de mieux répondre aux défis du réchauffement climatique.
Ce dialogue avec Paris et Berlin intervient alors que les relations entre Pékin et Washington sont particulièrement tendues. Le secrétaire d’État Antony Blinken est depuis dimanche en Chine pour tenter d’amorcer un dégel diplomatique.
Durcissement de ton vis-à-vis de Pékin
Le déplacement en Allemagne du dirigeant du Conseil des affaires de l’État chinois s’annonce plus mouvementé qu’en France, après la publication le 14 juin par Berlin d’un document qui décrit la Chine comme une force hostile. La Chine, bien que « partenaire » de l’Allemagne, agit « à l’encontre de nos intérêts et valeurs », accuse notamment le gouvernement allemand dans sa « Stratégie de sécurité nationale ». Pour Berlin, avec l’action de Pékin, « la stabilité régionale et la sécurité internationale sont de plus en plus sous pression » et « les droits de l’homme ne sont pas respectés ».
Il faut certes « faire en sorte que l’intégration de la Chine dans le commerce mondial et dans les relations économiques mondiales ne soient pas entravée », a assuré M. Scholz lors de la présentation de cette revue des priorités stratégiques de l’Allemagne. La première économie européenne est aussi consciente que le défi de la lutte contre le réchauffement ne peut être relevé sans l’engagement de Pékin. « Mais il faut en même temps tenir compte des questions de sécurité qui se posent à nous », a prévenu M. Scholz.
Premier partenaire commercial de l’Allemagne et marché vital pour son puissant secteur automobile, la Chine a longtemps été ménagée par Berlin. Sous les mandats d’Angela Merkel, jusque fin 2021, ce format de consultations sino-allemandes était régulier et tourné vers la coopération économique.
L’Allemagne a ouvert les yeux
L’Allemagne a toutefois durci le ton face aux menaces visant Taïwan et aux accusations de persécutions contre les Ouïghours. La pandémie de Covid-19 et la perturbation des échanges internationaux qu’elle a entraînée a aussi ouvert les yeux des Allemands sur la trop grande dépendance à la Chine. Le mot d’ordre est désormais à la diversification des partenariats économiques. Enfin, l’absence de condamnation par Xi Jinping de l’invasion russe de l’Ukraine a fini de creuser le fossé entre la Chine et l’Europe occidentale, l’Allemagne en particulier.
Les difficultés rencontrées par l’économie chinoise, qui peine à surmonter l’après pandémie de Covid-19, motivent toutefois la visite en Allemagne de Li Qiang, personnalité moins politique que le chef d’État Xi Jinping. Li Qiang est « le tsar de l’économie de M. Xi et il est chargé de redresser l’économie, qui est en difficulté », explique à l’AFP Ian Johnson, spécialiste de la Chine au sein du groupe de réflexion américain Council on Foreign Relations.
« Pour la Chine, l’Allemagne est l’acteur le plus important en Europe et, à mesure que les relations avec les États-Unis se détériorent, Pékin a intérêt à montrer qu’elle entretient des relations constructives avec le plus grand acteur en Europe », confirme Thorsten Brenner, de l’Institut global des politiques publiques (GPPI).
« La question est de savoir », selon M. Brenner, si les Allemands « continuent à jouer le jeu en prétendant qu’il y a un large accord avec Pékin » ou s’ils « choisissent une nouvelle voie en parlant franchement et en limitant la déclaration finale aux domaines où il y a une véritable voie à suivre pour la coopération ».
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