Les Arméniens de souche de la région azerbaïdjanaise du Haut-Karabakh continuent d’affluer par milliers en Arménie, une semaine après l’offensive azerbaïdjanaise qui pourrait redessiner la carte politique du Caucase du Sud.
Plus de 28.000 résidents arméniens de l’enclave seraient arrivés en Arménie, pays voisin, depuis que Bakou a mené une offensive réussie en 24 heures pour affirmer son contrôle sur la région.
Les Arméniens de souche qui quittent le pays disent craindre d’être persécutés par les autorités azerbaïdjanaises.
Bakou, pour sa part, s’est engagé à respecter les droits de la population arménienne du Karabakh, rejetant les allégations selon lesquelles il envisage de procéder à un « nettoyage ethnique » de la région.
Même si la plupart des quelque 120.000 habitants du Karabakh sont d’origine arménienne, la région est internationalement reconnue comme faisant partie de l’Azerbaïdjan.
Le secrétaire d’État américain Antony Blinken s’est entretenu avec le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev au moins deux fois cette semaine pour lui faire part de l’inquiétude de Washington face à la situation humanitaire.
Selon le porte-parole du département d’État, Matthew Miller, M. Blinken a demandé « une protection inconditionnelle et la liberté de mouvement pour les civils […]. [et] un accès humanitaire sans entrave au Haut-Karabakh ».
Lors d’une conférence de presse tenue le 26 septembre, M. Miller a déclaré que M. Aliyev « aurait indiqué qu’une nouvelle action militaire ne serait pas engagée, et nous attendons de lui qu’il s’y tienne ».
M. Aliyev doit s’entretenir avec le premier ministre arménien Nikol Pashinyan le 5 octobre dans la ville espagnole de Grenade afin de discuter d’un éventuel traité de paix entre les deux antagonistes de longue date.
Le 19 septembre, l’Azerbaïdjan a lancé une offensive éclair pour désarmer les groupes séparatistes arméniens du Haut-Karabakh et exercer un contrôle total sur la région.
L’opération a pris fin 24 heures plus tard, lorsque les dirigeants séparatistes ont accepté de déposer les armes, conformément à un accord de cessez-le-feu négocié par Moscou.
Selon des sources arméniennes, au moins 200 Arméniens de souche ont été tués au cours de l’offensive.
L’Azerbaïdjan affirme que 192 de ses soldats ont été tués.
Le dirigeant turc visite l’enclave
En début de semaine, le président turc Recep Tayyip Erdogan s’est rendu dans l’enclave autonome du Nakhitchevan, en Azerbaïdjan, où il a rencontré M. Aliyev.
« Je félicite l’armée azerbaïdjanaise victorieuse pour son succès historique et son approche humaine envers la population civile », a déclaré le président Erdogan lors d’une conférence de presse conjointe avec son homologue azerbaïdjanais.
« Avec cette victoire, une nouvelle fenêtre d’opportunité s’ouvre pour une normalisation globale de la région. »
Au cours de la brève visite du président Erdogan, les deux dirigeants ont signé un protocole d’accord portant sur la construction d’un projet ferroviaire reliant le Nakhitchevan à la ville de Kars, dans le nord-est de la Turquie.
La Russie, qui entretient de bonnes relations avec la Turquie, membre de l’OTAN, et l’Azerbaïdjan (avec lequel elle partage une frontière), a salué cette rencontre.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a exprimé l’espoir que la rencontre entre les deux dirigeants « contribuera à assurer la sécurité régionale et à normaliser la situation dans le Haut-Karabakh ».
« Nous savons que Bakou et Ankara ont des relations très étroites », a indiqué M. Peskov, ajoutant que les liens de Moscou avec les deux capitales « ne sont pas moins étroits ».
La Turquie partage des liens ethniques et culturels profonds avec l’Azerbaïdjan, dont la population est ethniquement turque et parle un dialecte turc.
En 2020, l’Azerbaïdjan, avec le soutien de la Turquie, a remporté une guerre de six semaines contre l’Arménie sur la question du Karabakh. Ce conflit s’est également terminé par un cessez-le-feu négocié par Moscou, qui a laissé l’Azerbaïdjan maître de la région.
Depuis lors, les forces russes de maintien de la paix sont restées déployées le long de la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, où la violence a continué d’éclater par intermittence.
Le corridor de Zangezur
À son retour d’Azerbaïdjan, le président Erdogan a appelé à l’ouverture du « corridor de Zangezur », un projet de route terrestre reliant l’Azerbaïdjan au Nakhitchevan. Niché entre la Turquie, l’Iran et l’Arménie, le Nakhitchevan est internationalement reconnu comme faisant partie de l’Azerbaïdjan.
Toutefois, compte tenu de la complexité de la situation géopolitique de la région, l’Azerbaïdjan ne dispose pas actuellement d’une voie terrestre pour accéder à l’enclave.
S’il est réalisé, le corridor de Zangezur offrirait une liaison routière et ferroviaire entre l’est de la Turquie et l’Azerbaïdjan proprement dit, en passant par le Nakhitchevan et le sud de l’Arménie.
L’itinéraire proposé pourrait être étendu à l’Iran et, éventuellement, aux cinq républiques d’Asie centrale, dont les populations sont également ethniquement turques.
« Nous espérons réaliser le corridor de Zangezur et établir des liaisons routières et ferroviaires ininterrompues avec l’Azerbaïdjan en passant par le Nakhitchevan », a déclaré le président Erdogan lors d’une réunion du cabinet le 26 septembre.
Il a également exprimé l’espoir de transformer le Caucase du Sud en un « bassin de paix et de prospérité » grâce à des projets communs avec les États de la région, dont l’Iran.
Erevan (Capitale de l’Arménie), pour sa part, a déjà exprimé son opposition au projet de route terrestre traversant son territoire. Toutefois, si l’Arménie refusait de participer au projet, la route pourrait passer « par l’Iran », selon le président Erdogan.
Dans le passé, l’Iran s’est méfié de la route terrestre proposée, craignant qu’elle n’entrave ou ne bloque sa frontière internationale avec l’Arménie, bien que Téhéran ait réagi « positivement » à la dernière proposition, selon le dirigeant turc.
Interrogé sur le projet de corridor terrestre, M. Miller a répondu : « Nous nous sommes engagés avec le gouvernement turc sur cette question ».
Selon le porte-parole, M. Blinken a discuté de la proposition avec son homologue turc en marge de la réunion de l’Assemblée générale des Nations unies la semaine dernière.
« Nous espérons que tous nos alliés et partenaires pourront jouer un rôle constructif dans la conclusion d’un accord durable [dans la région], ce qui inclut bien sûr la Turquie », a indiqué M. Miller.
« Mais je n’ai pas de commentaire à faire sur une proposition spécifique. »
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