Les Chiliens aux urnes pour élire leur président deux ans après le soulèvement social

Par Epoch Times avec AFP
21 novembre 2021 14:45 Mis à jour: 21 novembre 2021 15:32

Le Chili a ouvert dimanche ses bureaux de vote pour l’élection d’un nouveau président, deux ans après un soulèvement social sans précédent contre les inégalité sociales et en plein processus de rédaction d’une nouvelle Constitution.

Dans un pays en plein doute, 15 millions d’électeurs sont appelés depuis 08H00 et jusqu’à 18H00 locales (de 11H00 à 21H00 GMT) à désigner parmi sept candidats le successeur du président conservateur Sebastian Piñera, 71 ans, qui après deux mandats ne peut pas se représenter et quitte le pouvoir sur une cote de popularité au plus bas (12%). Les résultats sont attendus dans la soirée.

« Je vais exercer mon droit de vote dans un pays démocratique », a déclaré à l’AFP José Casanova, un militant chaviste de 74 ans, avant de déposer son bulletin dans une école du gigantesque quartier de Petare.

Deux candidats situés aux extrêmes du paysage politique

« Chaque élection est pour le bien du pays, qui est un pays béni, avec tous ses problèmes, mais nous méritons d’être respectés », a-t-il déclaré.

Le candidat chilien à la présidentielle Jose Antonio Kast, du parti Parti Republicain, vote dans un bureau de vote à Paine, au sud de Santiago, le 21 novembre 2021. Photo d’Ernesto BENAVIDES / AFP via Getty Images.

Parmi les deux favoris des derniers sondages, crédités d’environ un quart des intentions de vote, on trouve deux candidats situés aux extrêmes du paysage politique et en dehors des coalitions de droite et de centre gauche qui ont gouverné le pays depuis la fin de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990).

D’un côté, Gabriel Boric, 35 ans, ancien leader étudiant et candidat de la coalition de gauche « Apruebo dignidad » qui comprend notamment les communistes ; de l’autre, José Antonio Kast, avocat de 55 ans et chef du mouvement d’extrême droite Parti républicain, qui surfe sur l’impopularité du gouvernement sortant.

« Ceux qui n’ont jamais été favoris apparaissent désormais comme des favoris », constate pour l’AFP Raul Elgueta, politologue à l’Université de Santiago. « Ce sont les dernières élections de l’ancien cycle et elles pourraient avoir une issue différente de ce que nous avons eu » jusqu’à présent, ajoute l’universitaire.

La participation des jeunes, fortement mobilisés dans la rue

Juste derrière les deux favoris se détachent deux anciens ministres, la démocrate-chrétienne (centre-gauche) Yasna Provoste, 51 ans, et le libéral de droite, Sebastian Sichel, 44 ans.

Mais la faible fiabilité des sondages — démontrée lors de récents scrutins –, leur interdiction deux semaines avant l’élection, conjuguée à une forte proportion d’indécis et une augmentation des cas de Covid-19, rendent difficile toute prédiction sur les qualifiés pour le second tour du 19 décembre.

Autre inconnue, la participation des jeunes, fortement mobilisés dans la rue depuis le soulèvement de fin 2019 pour plus de justice sociale, mais qui expriment régulièrement leur peu d’intérêt envers les propositions des candidats.

Selon une étude de l’Institut national de la Jeunesse, 77% des jeunes iront « probablement » ou « assurément » voter dimanche.

Ce scrutin particulièrement ouvert intervient deux ans tout juste après une crise sociale inédite dans le pays sud-américain pour réclamer une société plus juste après des décennies de politiques ultra-libérales.

« Un Etat qui garantisse les droits, la dignité et l’égalité »

Gabriel Boric pourrait profiter de l’aspiration de très nombreux Chiliens à plus d’égalité sociale, une réforme du régime privé des retraites et une présence accrue de l’Etat dans les secteurs de la santé et de l’éducation.

« Il est extrêmement important (…) de construire un Etat qui garantisse les droits, la dignité et l’égalité, la seule façon d’avoir de la stabilité », a fait valoir vendredi le plus jeune candidat présidentiel de l’histoire du Chili, lors de son dernier meeting.

Mais les analystes ont également observé une récente montée de l’extrême droite face aux actions violentes des protestataires les plus radicaux et nourrie par les préoccupations croissantes des électeurs concernant l’immigration illégale et la criminalité.

« Le président élu affrontera une période difficile »

D’autant que la pandémie a fait monter le chômage, creusé la dette et que l’inflation avoisine désormais 6%, une nouveauté dans le pays.

« Deux modèles de société s’affrontent. Celui que nous représentons, de liberté et de justice, et (…) un pays dont nous ne voulons pas et qui tomberait dans le chaos, la faim et la violence », a déclaré José Antonio Kast, à la clôture de sa campagne, aux côtés de son épouse et de huit de ses neuf enfants.

Quel qu’il soit « celui qui sera élu président affrontera une période difficile », prédit Claudia Heiss, professeure de sciences politiques à l’Université du Chili, soulignant les risques de « conflit social » lorsque les aides ayant permis de soutenir l’économie pendant la pandémie prendront fin.

Autre incertitude, la Constitution qui sortira des travaux entamés en juin par l’Assemblée constituante. Le texte, qui pourrait revoir les prérogatives du président et du Parlement, sera soumis aux Chiliens par référendum au cours du mandat à venir.


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