En Papouasie se situe la plus grande zone de forêt tropicale jusque là épargnée. Plus de 300 tribus indigènes vivent ici, comprenant certaines ayant très peu de contact avec la civilisation moderne. Mais le nombre de plantations d’huile de palme a plus que quadruplé au cours de la dernière décennie, au détriment de la forêt et de ses habitants.
Un groupe environnemental appelé Mighty a publié le 1er septembre 2016 une enquête sur l’un des producteurs d’huile de palme de Papouasie, la compagnie coréenne Korindo. Les allégations contre Korindo révèlent toutes les marques de l’industrie sauvage de l’huile de palme : elle a outrepassé les standards des droits de l’homme et environnementaux – brûlant même illégalement de larges parcelles de forêt équatoriale – et s’en est sortie principalement grâce à la corruption du gouvernement.
Les deux principaux clients de Korindo ont pourtant arrêté de lui acheter de l’huile de palme suite à cette enquête, un signe porteur de l’espoir d’un changement dans l’industrie.
Il est estimé qu’on retrouve de l’huile de palme dans près de la moitié de tous les produits emballés dans les supermarchés.
L’huile de palme fait partie de notre vie quotidienne. Il est estimé qu’on la retrouve dans près de la moitié de tous les produits emballés dans les supermarchés, selon la Worl Wildfire Fund. Cette huile se retrouve dans les margarines, dans les céréales, dans les shampooings et plus encore. L’usage de l’huile de palme devrait doubler d’ici 2020, en raison d’une augmentation de la demande mondiale et de son affluence grandissante dans certaines régions, menant à plus de consommation de produits manufacturés contenant l’huile.
Les problèmes de l’industrie
De 2013 à 2015, près de 900 zones sensibles ont été rapportées dans les frontières de la concession de Korindo, selon Mighty. Avec des données satellites, des photographies aériennes et des investigations au sol, Mighty a découvert « un usage systématique et abondant du feu durant les processus de nettoyage du terrain ».
Cette pratique est illégale. Les feux ont dévasté l’Indonésie, détruisant les récoltes des fermiers et créant un brouillard mortel de fumée, sans mentionner la menace à la diversité de la faune et de la flore dans la forêt tropicale. Les concessions de Korindo comptent pour seulement 0,7 % des 122 568 feux détectés dans le pays en 2015. L’industrie de l’huile de palme en général est d’un banditisme sans limite.
Korindo opère en Indonésie depuis 1993, et a défriché un total de plus de 50 000 hectares. (Pour le mettre en perspective, cela fait à peu près la taille de Séoul en Corée du Sud.) Depuis 2013 seulement, la compagnie a défriché une zone d’approximativement 30 000 hectares, comprenant 12 000 hectares de forêt primaire.
Le rapport de Mighty indique : « La direction de Korindo considère certainement comme moindre la chance d’être tenue coupable par l’opinion publique ou d’avoir une sanction légale. Les groupes d’indigènes locaux ont peu accès aux médias pour rapporter les pratiques illégales, et Korindo est en bons termes avec les forces armées locales. »
Korindo n’a pas donné de réponse aux questions lui ayant été adressées par Epoch Times à l’heure de la rédaction de cet article.
La compagnie a pourtant subi un revers en 2015. Une de ses concessions d’huile de palme a reçu six mois de suspension pour avoir brûlé une partie de la forêt. Mais la suspension a été levée, et le gouvernement a permis la reprise des opérations après trois mois.
Le gouvernement détourne le regard
La Commission Nationale des Droits de l’Homme indonésienne a rendu public en mars 2016 un communiqué de presse sur la corruption du gouvernement aggravant les conflits entre les populations indigènes et les compagnies comme Korindo : « Le problème devient plus compliqué lorsque des fonctionnaires du gouvernement, y compris la police, sont impliqués dans ce conflit et manquent à rester neutres dans la plupart des cas … Différents conflits impliquant des territoires indigènes sont étendus et de plus et plus compliqués. Ils ne peuvent pas être résolus par les ministères ou institutions de l’État existants, en raison de conflits d’intérêts. »
Human Rights Watch a rapporté en 2015 qu’il existe« des restrictions vieilles de plusieurs décennies non seulement sur les journalistes étrangers, mais également sur les officiels de l’ONU, les représentants de groupes d’aide internationaux et autres cherchant à travailler en Papouasie. »
Mighty allègue que Korindo aurait induit en erreur des tribus locales en leur faisant signer des accords pour céder leur terrain forestier, et que la compagnie aurait généralement mal traité les indigènes.
Un rapport de 2008 de l’ONG du Conseil œcuménique des Églises par son Conseil international des Missions relate : « Les conflits entre la compagnie [Korindo] et les propriétaires terriens habituels de Papouasie sont courants, interdisant l’accès et des compensations à ces derniers, et augmentant les tensions entre les clans sur les frontières de terrains et à l’intérieur des clans sur le partage des compensations. »
Moins de 10 % des employés de l’huile de palme en Papouasie viennent de la population locale.
« Des effets collatéraux additionnels sont la forte présence militaire et policière. Les villageois, les visiteurs, les politiciens locaux et les fonctionnaires sont étroitement surveillés et constamment harcelés et intimidés. »
Tandis que Korindo emploie près de 20 000 personnes en Indonésie, le rapport du Conseil note que moins de 10 % des employés de l’huile de palme en Papouasie viennent de la population locale.
Un changement récent
De nombreuses compagnies d’huile de palme ont adopté la politique de No Deforestation, No Peat, and No Exploitation (NDPE) [Non déforestation, Non tourbe, et Non exploitation]. ces dernières années, comprenant deux clients de Korindo, Musim Mas et Wilmar. Les deux ont arrêté d’acheter à Korindo après l’enquête de Mighty jusqu’à ce que la compagnie améliore ses pratiques.
Le 9 août, Korindo a annoncé un moratoire de trois mois sur trois de ses concessions, période durant laquelle elle « se préparera pour l’application d’une politique NDPE cohérente ».
La porte-parole de Musim Mas Carolyn Lim a écrit : « Nous sommes engagés à bâtir une chaîne logistique traçable et transparente… Depuis juin 2015 nous avons annoncé être 100 % traçable sur nos fabriques. »
Elle a noté que Korindo avait fait un premier pas vers le changement, et que Musim Mas continuerait d’encourager sa réforme.
Musim Mas est certifiée par le label Roundtable on Sustainable Palm Oil (RSPO) [Table ronde sur l’huile de palme durable]. Les consommateurs peuvent trouver une étiquette RSPO sur certains aliments et autres produits contenants de l’huile de palme produit avec un impact environnemental minimal.
Lim déclare : « L’industrie reconnaît que l’impact réel implique l’abattage total de comportements sociaux-économiques, et s’oriente vers des dialogues sur la traçabilité pour se concentrer sur la création d’un réseau de bénéfices sociaux-environnementaux. »
Les problèmes rencontrés chez les fournisseurs de Musim Mas sont listés sur son site internet. Par exemple : « Deux des plantations d’huile de palme appartenant à Indofood ont été découvertes avoir les problèmes suivants : travail des enfants, travailleurs exposés à des pesticides à haut risque, des salaires en dessous du revenu minimum, une utilisation à long terme de travail temporaire pour remplir des tâches clés, et l’utilisation de syndicats soutenus par la société. »
Mais le changement n’arrive pas du jour au lendemain, et Lim remarque que tandis qu’ « un changement transformateur est nécessaire sur le long terme, arrêter la relation commerciale immédiatement et totalement pourrait ne pas être le plus pratique. »
Le président de l’Indonésie Joko Widodo a pris l’année dernière publiquement partie en faveur des demandes de droits de l’homme et d’autres problématiques, particulièrement dans l’industrie de l’huile de palme. Les groupes des droits environnementaux et humains ont exprimé leur espoir pour l’engagement de Widodo, tempéré par les réalités de la résistance de nombreux officiels du gouvernement et la lenteur d’un changement majeur.
Dans le même temps, la pression des consommateurs pour des standards plus durables a créé des incitations économiques pour les compagnies comme Korindo afin de s’améliorer, comme en témoigne la récente perturbation des opérations de Korindo.
Version anglaise : Consumers Help Change Notorious Palm Oil Industry
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