On entendait des voix partout. Des voix appelant à l’aide, et des voix qui pleuraient. Ce 25 avril, après la chute d’un bâtiment sur sa maison, suite au premier tremblement de terre de magnitude 7,8 qui a frappé et brisé le Népal, Avi Shrestha, un résident de Katmandou, âgé de 30 ans, creuse frénétiquement à mains nues dans les débris. Mais tout seul, il était incapable de déplacer les blocs de béton. Il ne pouvait pas atteindre les voix qu’il entendait.
Toute la nuit, les habitants de Katmandou ont entendu les voix de ceux qui étaient enterrés vivants, comme des fantômes en route vers l’au-delà.
Le lendemain, les secouristes envoyés par le gouvernement sont arrivés avec les équipements nécessaires pour retirer l’épave que Shrestha avait désespérément essayé de déplacer tout seul la veille. Ils y ont trouvé quatre cadavres.
Dans un échange via Facebook, avec Epoch Times, Shrestha déclarait: «Il y a un sentiment d’impuissance général». Et d’ajouter: «il y a tellement de choses à faire… et rien n’est fait. Les quatre victimes étaient des gens que je rencontrais probablement tous les jours».
Les chiffres officiels du gouvernement népalais parlent de milliers de victimes et augmentent chaque jour. Mais jusqu’à présent, le gouvernement n’a pris en compte que les victimes dans les grandes villes. Le New York Times a rapporté les estimations fournies par le géophysicien Max Wyss, aux organismes d’aide d’urgence avoisineraient les 7.000 morts en tout.
Pourtant, près d’une semaine plus tard, les équipes de secours internationales commencent seulement à arriver dans les villages les plus reculés, en raison de la détérioration des infrastructures et des restrictions imposées par le gouvernement népalais. D’après les sources sur le terrain, nombre de professionnels de la santé et les travailleurs internationaux qui apportent l’aide médicale d’urgence ne savent pas où aller une fois au Népal, à cause de la lenteur du gouvernement.
Dans ce contexte, les applications type Facebook et autres réseaux sociaux qui ont mobilisé les jeunes du Népal et du reste du monde, sont d’autant plus importants. Ces jeunes ont ainsi pu coopérer et démarrer des initiatives locales pour prodiguer des secours dans les zones qui en avaient le plus besoin, en échappant au contrôle gouvernemental.
L’espoir est dans les réseaux sociaux
L’espoir de nombreux Népalais repose désormais sur les médias sociaux.
Le 28 avril, Jolly Amatya, une jeune femme népalaise qui vit à New York, a posté sur sa page Facebook qu’un de ses amis partait au Népal pour apporter des gants, des masques, du paracétamol (pour soulager les douleurs et la fièvre), des comprimés de chlorure (pour désinfecter l’eau), des serviettes hygiéniques, du Dettol (antiseptiques) et des aliments déshydratés.
Dans ce simple message, elle a envoyé un messsage à son ami et a demandé à ses contacts au Népal de prendre contact avec lui.
Amatya est coprésidente de l’Assemblée de la jeunesse de l’ONU et dispose donc d’un bon réseau de connaissances. Très rapidement, son post a attiré plus de deux douzaines de commentaires de gens qui souhaitaient faire des dons ou aider son ami au Népal.
L’ami voyageur se nomme Nehaal Mayur, un garçon de 27 ans originaire de Mumbai, en Inde. Dans un entretien téléphonique, il confirme être parti bénévolement au Népal avec 20 purificateurs d’eau, des fournitures médicales et 15.000 paquets de biscuits.
Mayur qui est titulaire d’une maîtrise dans le social, est aussi un représentant de la jeunesse du Département de l’information publique de l’ONU.
Même s’il est bénévole, il envoie toujours ses observations à ses associés de l’ONU. Son équipe continuera à collecter et à lui envoyer plus de choses bien après son arrivée au Népal.
À bord de son 4×4 de location, Mayur accède aussi bien aux grandes villes qu’aux villages reculés.
L’accès aux villages est très dangereux en voiture. La plupart des routes se sont effondrées ou sont bloquées par les décombres.
Depuis le tremblement de terre initial, le Népal a enregistré plus d’une centaine de répliques. Une de plus et plusieurs nouveaux bâtiments et des routes risquent de s’effondrer à nouveau.
Mais cela n’a pas découragé Mayur.
«Si les routes ne sont pas praticables, nous utiliserons des vélos», répond-il.
En quelques jours, Mayur est entré en contact avec une vingtaine de personnes de différentes régions du Népal. Il a rencontré 15 d’entre elles sur Facebook.
«C’est un travail d’équipe», explique Mayur. «De meilleures équipes font du meilleur travail».
L’un des plus importants contacts qu’il a rencontrés sur Facebook se nomme Pradeep Sapkota. Il a 25 ans et est ingénieur logiciel. Sapkota a fondé une ONG locale du nom de Change Nepalese Mission, qui enseigne aux femmes et aux jeunes les technologies de l’information.
Sapkota vit à Bharatpur, la cinquième plus grande ville du Népal, situé dans la région centre-sud du pays.
Dans une interview téléphonique, Sapkota expliquait que «Bharatpur était une ville plus sûre. Nous n’y avons pas besoin de dons».
Les dégâts dans sa ville étaient moins importants qu’ailleurs. Dès le mercredi, les gens sont retournés dormir dans leurs maisons.
C’était plaisant de pouvoir dormir à nouveau à l’intérieur, convient-il. Mais son esprit n’avait pas de répit. Il pensait à ses amis coincés dans un village à proximité de la montagne. Les villages de sa circonscription ont été durement touchés.
Il se dit chanceux d’avoir trouvé du soutien dans les médias sociaux. Maintenant, il attend l’arrivée des provisions.
Facebook a facilité la rencontre de Sapkota et Mayur. Amatya a beaucoup de contacts et est occupée avec son travail à l’ONU. Si elle devait faire les présentations individuellement, cela prendrait beaucoup plus de temps.
Sapkota explique: «Cela fait trois jours que j’ai pris contact avec [Mayur], et maintenant il est en route. Ils ne traînent pas !», se réjouit-il. «À son arrivée, nous irons ensemble voir les endroits sinistrés du village».
Les jeunes se mobilisent
Amatya était sur son ordinateur portable dans son appartement à New York lorsqu’elle a reçu un message d’un ami au Népal à 2 heures du matin. Le tremblement de terre venait de frapper. Elle a été l’une des premières personnes à obtenir des informations de première main.
C’est par Viber, une application gratuite qui permet des appels et des textes internationaux gratuits, qu’elle a eu le message.
Amatya et ses frères et sœurs, qui vivent aussi aux États-Unis, ont immédiatement commencé une collecte de fonds pour le Népal via le site de financement participatif Indiegogo. Leur campagne se nomme «Rebuilding Nepal-Immediate Relief Fund ’15».
En cinq jours, ils ont récolté 18.802 dollars. «Dix dollars de nourriture et d’eau subviennent aux besoins hebdomadaires d’une famille», dit-elle.
Les fonds seront gérés sur place par des groupes locaux de confiance qui sont prêts à commencer immédiatement les efforts de secours.
Les organisations internationales comme la Croix-Rouge, Oxfam, et les Nations unies aident certainement à une grande échelle.
«Nous ne finançons pas les grandes organisations qui reçoivent déjà l’aide internationale», clarifie-t-elle. «Nous donnons aux structures locales, celles qui sont prêtes à aller dans les zones rurales».
Les jeunes comme Amatya sont aussi en contact avec des médecins qu’ils orientent vers les organisations locales qui ont des fonds dont elles disposent à volonté, sans attendre l’approbation du gouvernement.
Elle est en contact avec Ritesh Kumar, un médecin au Népal. Il a une équipe en partance pour la région de Nuwakot, au nord-ouest de Katmandou, pour y fournir des services de santé essentiels. Une autre équipe se dirigera vers Dhauladhar, une région dans les montagnes, un peu au-dessus de Sindhupalchowk.
Shrestha constate que «sur une note plus légère, beaucoup de jeunes se sont mobilisés, organisant des centres d’expédition et coordonnant tout cela à grâce aux réseaux sociaux».
Shrestha connaît deux camps dans sa région qui font du bon travail.
Le premier est géré par la Fédération Népalaise des Chambres du Commerce et de l’Industrie. Le second est géré par des particuliers, des jeunes volontaires qui se sont rencontrés au Yellow House, un célèbre hôtel de Katmandou.
«Les gens publient ce qu’ils font et ce dont ils disposent… tous les posts sont partagés plusieurs fois de sorte que la bonne personne finit par les voir», estime Shrestha.
«Cela simplifie nos efforts personnels pour atteindre les zones nécessaires et permet de réduire les doublons dans les efforts de secours».
Ce serait dommage de dupliquer les efforts. Jusqu’ici, Shrestha a dépensé environ 3.000 dollars de sa poche en équipements de secours, nourriture, tentes, et médicaments.
À Katmandou, il y a rupture de bâches, du coup, avec sa petite amie, ils achètent des matériaux flexibles et en font des tentes.
«Les tentes de secours sont en route. Seulement on ignore quand elles vont arriver et s’il y en aura assez», fait-il remarquer tout en restant positif.
Juste avant l’interview de Shrestha avec Epoch Times, il a ressenti une réplique. Une secousse de cinq secondes.
«Maintenant, on s’y est finalement habitué», dit-il. «Les trois premiers jours, on pouvait compter jusqu’à 50 secousses en une journée. À présent, c’est à peine trois à quatre fois par jour. Parfois, on ne s’en rend même plus compte».
Pour Shrestha, «Katmandou n’est pas aussi dévasté que les photos le laissent croire».
Version originale: How One Young Nepali Woman in NYC Unexpectedly Started a Grassroots Aid Network
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.