« Honte », « scandale »… le vote de plusieurs eurodéputés LFI, dont Rima Hassan, contre une résolution du Parlement européen demandant la libération de l’écrivain Boualem Sansal incarcéré en Algérie, suscitait un tollé vendredi, LFI se justifiant en affirmant ne pas vouloir attiser les tensions avec Alger.
« C’est une honte ! Franchement, s’abstenir ou voter contre un tel texte factuel où il n’y a rien d’idéologique, rien d’historique qui soit contestable, c’est simplement cautionner l’emprisonnement d’un immense écrivain dans des geôles et c’est profondément scandaleux », s’est indigné Raphaël Glucksmann, qui siège avec les socialistes.
Les députés européens ont voté jeudi à une écrasante majorité (533 voix pour, 24 contre et 48 abstentions) une résolution pour demander la libération « immédiate et inconditionnelle » de l’écrivain franco-algérien. La résolution condamne également « les arrestations de tous les autres militants, prisonniers politiques, journalistes, défenseurs des droits de l’homme » dont « le journaliste Abdelwakil Blamm et l’écrivain Mohamed Tadjadit ».
Boualem Sansal, âgé de 75 ans, est incarcéré depuis la mi-novembre en Algérie et poursuivi en vertu de l’article 87 bis du Code pénal, qui sanctionne « comme acte terroriste ou subversif, tout acte visant la sûreté de l’Etat, l’intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions ». Selon le quotidien français Le Monde, le pouvoir algérien aurait mal pris des déclarations de M. Sansal au média français Frontières, reprenant la position du Maroc selon laquelle le territoire du pays aurait été tronqué sous la colonisation française au profit de l’Algérie.
4 votes contre et 2 abstentions
La délégation de La France insoumise s’est partagée entre 4 votes contre et 2 abstentions. Rima Hassan a ainsi voté contre, tandis que Manon Aubry, qui était tête de liste aux dernières élections, s’est abstenue.
L’ancien Insoumis François Ruffin s’est dit en « désaccord complet » avec le vote de ses anciens camarades. « La place d’un écrivain n’est pas en prison, qu’on soit d’accord ou pas avec ce qu’il écrit. Évidemment qu’il faut tout faire pour la libération d’un écrivain », a-t-il réagi.
Tollé également à droite. « Cette résolution demandait la libération immédiate d’un homme malade. Et Mme Rima Hassan dit ‘‘non, je refuse, je vote contre’’. C’est inhumain, c’est politiquement scandaleux », a renchéri le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, qualifiant Mme Hassan de « suppôt du régime algérien ».
Bien que ce texte ait été co-signé par cinq groupes du Parlement européen, dont les socialistes et les écologistes, Manon Aubry, qui « soutient la libération de Boualem Sansal », a justifié son vote à l’AFP en « dénonçant l’instrumentalisation faite par l’extrême droite de ce cas pour attiser les tensions avec l’Algérie et alimenter leur agenda xénophobe ».
Soutenir plutôt la cause palestinienne
Même argumentation pour Rima Hassan qui a expliqué à l’AFP vouloir s’opposer à « une instrumentalisation de ce vote pour nourrir une escalade diplomatique, ce texte est un fourre-tout de tout ce qui nous dérange avec l’Algérie ». Et l’égérie controversée de la cause palestinienne d’inviter sur X « les défenseurs de Sansal à déployer autant d’énergie à défendre les droits humains des Palestiniens ».
Le cas de l’écrivain, naturalisé français en 2024, a de fait envenimé les relations entre la France et son ancienne colonie qui se sont détériorées depuis l’été dernier avec l’annonce de l’appui de Paris au plan d’autonomie marocain pour le territoire disputé du Sahara occidental.
M. Retailleau, qui a lui-même multiplié les déclarations véhémentes contre Alger, a admis que Boualem Sansal était « sans doute l’otage de cette relation tendue entre les deux pays ». Et il a demandé « au régime algérien un geste humanitaire ».
Pour M. Glucksmann, ce vote est en tout cas un argument supplémentaire pour justifier la rupture en France entre socialistes et Insoumis intervenue sur la censure du gouvernement Bayrou. « Notre vision du monde, nos principes ne sont pas les mêmes, notre rapport au débat public n’est pas le même. Arrêtons l’hypocrisie », a-t-il plaidé.
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