L’influence de la Chine au Panama interroge, après les propos de Donald Trump sur le canal

Le président panaméen Jose Raul Mulino a répondu en déclarant que "chaque mètre carré du canal de Panama" appartient au Panama

Par Frank Fang
26 décembre 2024 19:17 Mis à jour: 27 décembre 2024 06:05

Les propos tenus en début de semaine par le président élu Donald Trump, à savoir que les États-Unis pourraient reprendre le contrôle du canal de Panama, ont ravivé l’attention sur l’influence croissante de la Chine communiste dans ce pays d’Amérique latine.

Le canal de Panama, ouvert en 1914 après 10 ans de construction par les États-Unis, a été restitué au Panama en vertu d’un accord signé en 1977 par le président Jimmy Carter. En 1999, le Panama a repris le contrôle total du canal, qui est aujourd’hui l’une des voies maritimes les plus fréquentées au monde, reliant l’océan Pacifique à la mer des Caraïbes.

Le 21 décembre, Donald Trump est passé pur son compte Truth Social pour critiquer le Panama qui impose des « prix et des taux de passage exorbitants » aux navires militaires et commerciaux américains passant par le canal, tout en exprimant ses inquiétudes quant à l’influence croissante du régime chinois sur la voie d’eau.

« C’est le Panama qui devait le gérer, et non la Chine ou qui que ce soit d’autre », a-t-il écrit.

Si le Panama ne peut pas garantir « un fonctionnement sûr, efficace et fiable » de la voie navigable, les États-Unis « exigeront que le canal de Panama leur soit rendu, dans son intégralité et sans discussion », a-t-il ajouté.

Le président panaméen José Raúl Mulino a répondu aux commentaires de M. Trump en affirmant que le canal n’est contrôlé ni par la Chine, ni par l’Europe, ni par les États-Unis, ni par aucune autre puissance que son pays.

« Chaque mètre carré du canal de Panama et de sa zone adjacente appartient au PANAMA, et continuera de l’être », a écrit Mulino sur la plateforme de médias sociaux X le 22 décembre.

Donald Trump a réagi à la réfutation de Mulino sur Truth Social le même jour, en écrivant : « Nous verrons cela ! ».

Une autre façon d’avancer

L’accord de 1977 comprend deux traités : le traité relatif à la neutralité permanente et au fonctionnement du canal de Panama, également baptisé traité de neutralité, et le traité relatif au canal de Panama.

Le traité de neutralité stipule que les États-Unis peuvent utiliser leur force militaire pour protéger le canal de Panama contre toute menace à sa neutralité, ce qui signifie essentiellement que les États-Unis peuvent utiliser perpétuellement la voie navigable.

Brent Sadler, chercheur principal à la Heritage Foundation, a écrit dans un billet X le 22 décembre que « les inquiétudes des États-Unis concernant l’accès sécurisé à cette voie d’eau vitale sont fondées ».

« Après tout, ce n’est un secret pour personne que la Chine contrôle les ports situés aux deux extrémités du canal », a déclaré M. Sadler.

L’ancien député Matt Gaetz (Parti républicain de Floride) a écrit sur X : « Nous ne reprenons pas le canal au Panama, nous le reprenons à la Chine. »

Le stratège politique conservateur Joey Mannarino a déclaré sur X que Donald Trump « offre une voie différente » pour ce qui est du canal.

« C’est pourquoi j’ai apprécié le choix de [Marco] Rubio comme secrétaire d’État », a-t-il ajouté.

Le mois dernier, M. Trump a nommé Marco Rubio, un faucon de longue date à l’égard de la Chine, au poste de secrétaire d’État.

M. Rubio, qui s’est rendu au Panama en mai 2018, a déjà fait part de ses préoccupations concernant l’influence du Parti communiste chinois (PCC) sur le canal.

Le canal est « une voie de transit importante pour intercepter les activités illicites, mais il est entouré d’entreprises du #PCC », a écrit Rubio sur X en août 2022.

« Nous devons continuer à affirmer clairement que le Panama est un partenaire important et à dénoncer les tentatives du PCC de s’implanter dans cette région », a-t-il écrit.

Liens entre le PCC et le Panama

Le PCC a commencé à s’implanter au Panama avant même que le canal construit par les États-Unis ne passe entièrement sous contrôle panaméen le 31 décembre 1999.

En 1997, le Panama a accordé une concession à Hutchison Ports PPC, une division de la société Hutchison-Whampoa basée à Hong Kong, pour exploiter le port de Balboa du côté Pacifique et le port de Cristóbal à l’entrée Atlantique du canal. Après une fusion en 2015, Hutchison-Whampoa est désormais connue sous le nom de CK Hutchison Holdings.

En 2021, sous la présidence de Laurentino Cortizo, l’Autorité maritime du Panama a renouvelé la concession avec Hutchinson Ports PPC pour 25 années supplémentaires.

Le prédécesseur de M. Cortizo, Juan Carlos Varela, qui a occupé le poste de président de 2014 à 2019, a pris plusieurs décisions visant à renforcer les liens du pays avec le régime chinois.

En juin 2017, le Panama a rompu ses liens diplomatiques avec Taïwan, une île autonome que le PCC considère comme faisant partie de son territoire. Cette décision a suscité des critiques du ministère taïwanais des Affaires étrangères, qui a accusé M. Varela d’avoir succombé aux pressions économiques de Pékin.

Cinq mois plus tard, le Panama est devenu le premier pays d’Amérique latine à adhérer à l’initiative controversée « la Ceinture et la Route » (BRI) du PCC, une stratégie d’infrastructure mondiale qui, selon ses détracteurs, place les pays en développement dans des « pièges à dettes » avec le régime.

Un consortium composé d’entreprises publiques chinoises s’est vu attribuer un contrat de 1,42 milliard de dollars pour la construction d’un quatrième pont sur le canal de Panama en 2018, dans le cadre de l’initiative BRI, ont indiqué les médias d’État chinois.

En décembre 2018, lors d’un voyage à l’étranger, le dirigeant du PCC Xi Jinping a rencontré M. Varela au Panama. Les deux leaders ont signé plusieurs accords de coopération portant sur le commerce, les infrastructures, le secteur bancaire, l’éducation et le tourisme.

Le géant chinois de la technologie Huawei, dont les équipements de communication ont été interdits aux États-Unis pour des raisons de sécurité nationale, a établi un centre de distribution régional dans la zone de libre-échange de Colón, à l’entrée atlantique du canal, en 2015.

Lorsque M. Varela s’est rendu en Chine en 2017, l’ancien président panaméen a également rencontré le fondateur de Huawei, Ren Zhengfei, selon le site web de l’entreprise.

M. Ren est l’ancien directeur de l’Académie d’ingénierie de l’information relevant du département de l’état-major général de l’Armée populaire de libération.

En avril, la Commission de supervision et d’administration des actifs publics du Conseil d’État chinois a indiqué sur son site web que le terminal de croisière Amador du Panama avait récemment commencé ses activités.

Le terminal, construit par China Harbour Engineering Co. sur l’île de Perico, à l’entrée Pacifique du canal, pourrait devenir une « plaque tournante vitale pour la rotation des navires de croisière et le transit des passagers en Amérique centrale et en Amérique du Sud », a déclaré la Commission.

La générale de l’armée américaine Laura Richardson, ancienne commandante de l’U.S. Southern Command, a déclaré en mars que les entreprises d’État chinoises « continuent de faire des offres pour des projets relatifs au canal de Panama ».

L’avocat panaméen Alonso Illueca, spécialiste du droit international, a écrit que le contrôle exercé par la Chine sur les ports de Balboa et de Cristóbal « n’est qu’une partie de l’influence exercée par un acteur perturbateur ».

« Actuellement, la Chine et le PCC ont un niveau d’influence significatif sur le plan politique et exercent même des pressions actives sur les valeurs et les principes de la politique étrangère », a-t-il écrit dans un rapport de 2023 analysant l’influence du régime chinois dans ce pays d’Amérique latine.

Pour M. Illueca, le Panama devrait reconnaître ses intérêts stratégiques, réévaluer ses relations avec Pékin et comprendre que le PCC « est un acteur qui a tendance à profiter des faiblesses stratégiques des autres nations et à les exploiter ».

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