À plus de 3000 milliards d’euros, le niveau de la dette publique en France atteint des sommets au 1er trimestre 2023. La part imputable à l’État s’élève à près de 80%, faisant ainsi de notre pays un champion de l’interventionnisme. Cette situation se caractérise par un ratio d’endettement et des taux de prélèvements obligatoires parmi les plus élevés de la planète. Bien sûr, la transfusion massive de l’économie durant la crise sanitaire a creusé une dette publique déjà importante. Mais en ne s’engageant pas dans une volonté de réduire les dépenses lors de la période favorable des taux d’intérêt bas, l’économie risque d’en pâtir.
À fin mars de cette année, en s’établissant à 3013,4 milliards d’euros, la dette publique française franchissait pour la première fois le seuil des 3000 milliards d’euros. Pour étudier la soutenabilité de la dette publique, les experts se penchent notamment sur le ratio d’endettement, rapport de la dette publique au produit intérieur brut (PIB). Poursuivant son envol, le ratio d’endettement français s’élève à 112,5% au 1er trimestre de 2023, contre 111,8% (revu à la hausse) à la fin décembre 2022. Parallèlement, les dépenses publiques françaises – financées par la dette – ont également augmenté, passant de 55,4% du PIB en 2019 à 58,1% en 2022.
Bertrand Blancheton, professeur en économie à l’université de Bordeaux, a défini la dette publique comme étant « l’ensemble des engagements financiers des administrations publiques, le total des sommes dues aux créanciers ». Les administrations publiques françaises se composent de l’État, des organismes de Sécurité sociale, des collectivités territoriales, et des ODAC (organismes divers d’administrations centrales).
?Lancement du comité municipal de Gradignan et débat sur la dette publique animé par le Professeur Bertrand Blancheton
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L’État finance par la dette, des infrastructures et des dépenses de recherche et développement. Dans la dette française, la part de l’État est prédominante, s’élevant à 79% en 2021, soit environ 2231 milliards d’euros. Ce chiffre pharaonique symbolise en quelque sorte la monté en puissance de l’interventionnisme français. Dans ce contexte, une question se pose naturellement : est-ce que l’interventionnisme à la française serait responsable de l’augmentation de l’endettement public de la France ?
La France championne du monde de l’interventionnisme d’État
Le rapport de dépenses publiques au PIB est un indicateur clé pour se rendre compte du degré de l’intervention de l’État dans l’économie du pays. Selon l’Insee, les dépenses publiques françaises ont dépassé les 1500 milliards d’euros, soit 58,1% du PIB, en 2022. Ainsi, « la France se place au plus haut niveau mondial, au coude à coude avec la Grèce et la Belgique », à en croire Bertrand Blancheton.
Le taux des prélèvements obligatoires permet également d’évaluer le degré de socialisation d’un pays. A ce titre, la France avec 47% du PIB, est vice-championne d’Europe après le Danemark (48,8% du PIB) selon une étude de l’association Fipeco, citée par le Figaro fin 2022.
En considérant le rapport de dépenses publiques au PIB et le taux des prélèvements obligatoires, le degré de l’intervention de l’État français dans l’économie s’apparente à celui des pays nordiques. En effet, les dépenses publiques représentent 50,8% du PIB au Danemark, et 49,8% en Suède, selon les statistiques de l’année 2018. Cependant, l’interventionnisme à la française se distingue par une dette gigantesque qui représente plus de 100% du PIB depuis des années, alors que les ratios d’endettement du Danemark et de la Suède étaient proches de 32% en 2022 d’après Statista.
Contrairement à la France, les deux pays nordiques sont exemplaires en matière de désendettement. S’élevant à plus de 40% en 2016, leurs taux d’endettement ont continuellement diminué, et cela, malgré la pandémie de Covid-19. À l’inverse, la dette publique française passait de 97,4% du PIB en 2019 à 112,5% au 1er trimestre de 2023.
Une analyse menée par l’économiste Bertrand Blancheton « suggère une nette corrélation positive entre dépenses des administrations publiques et dette (…) Le coefficient de corrélation entre les deux variables est de 0,44 ». En d’autres termes, plus le degré de l’intervention de l’État dans l’économie est important, plus le pays est endetté. Or, « le rapport des dépenses publiques au PIB est passé de 55,4 % en 2019 à 61,4 % en 2020 » avant d’être « revenu à 59,1 % en 2021 puis 58,1 % en 2022 », d’après Fipeco. La comparaison de la situation d’avant-crise sanitaire à celle de l’après-Covid-19, montre une hausse du degré d’interventionnisme en France – de 55,4% à 58,1% : les dépenses publiques françaises progressent ainsi plus rapidement que la croissance économique.
Le « Quoi qu’il en coûte », apogée de l’interventionnisme français
À date, le rapport des dépenses publiques au PIB de la France a atteint son record absolu – 61,4%, en 2020. Cette année là, après avoir déclaré « être en guerre » contre le Covid-19, Emmanuel Macron a décidé que « le gouvernement mobilisera(it) tous les moyens financiers nécessaires pour porter assistance, pour prendre en charge les malades, pour sauver des vies. Quoi qu’il en coûte. »
La facture de la politique « quoi qu’il en coûte » est très lourde. En effet, « entre décembre 2019 et décembre 2020, [la dette publique française] a progressé de 270 milliards d’euros essentiellement pour faire face aux conséquences de la crise du Covid-19. Une économie de guerre sanitaire a été installée à partir de la mi-mars 2020 : chômage partiel, aides aux entreprises (en particulier pour accélérer leur digitalisation), aides sectorielles et fonds de solidarité. Le prolongement de ces mesures a contribué à une nouvelle hausse de la dette de 163 milliards d’euros sur l’exercice 2021 », précise Bertrand Blancheton.
« Attention à l’effet de boule de neige »
Bien qu’il admette que « le Covid-19 a eu un impact économique comparable à celui d’une guerre », Jean-Marie Monnier, professeur émérite à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, se veut rassurant : « La France n’a jamais fait défaut : le Français est un bon contribuable, les marchés financiers le savent. »
Cependant, les banques centrales régulatrices des marchés financiers, pratiquent elles aussi leur propre interventionnisme. Elles resserrent leur politique monétaire en faisant augmenter les taux d’intérêt dans l’espoir de réduire l’inflation. Dans ce contexte, ce ne sont pas les notes de crédit émises par des agences de notation sur la France qui préoccupent le professeur Monnier, mais le risque d’un effet de boule de neige qui serait provoqué par une hausse soudaine des taux après des années de « taux bas ». Notamment, « quand les taux d’intérêt sont supérieurs aux taux de croissance, la dette augmente de façon mécanique ».
Il regrette que le gouvernement français ait fait un mauvais choix au moment où les taux étaient particulièrement bas, voire négatifs : « Quand les taux étaient négatifs, quand la croissance était forte, le gouvernement aurait pu rembourser une partie de la dette, mais il a préféré alléger les impôts en creusant le déficit, donc en augmentant la dette. Ça ne coûtait rien, les taux d’intérêt étaient négatifs. Mais ces baisses d’impôts vont nous coûter de plus en plus cher, puisqu’on va les rembourser avec des taux de plus en plus élevés. »
Il y a un an, dans le Figaro, Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes, avait mis en garde sur l’absence d’efforts de réduction de la dette : « Si la France est le pays qui consent le moins d’efforts sur sa dette, cela va finir par se voir !»
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