Loi martiale : le Président sud-coréen Yoon Suk Yeol a présenté « excuses sincères » sans démissionner

Par Epoch Times avec AFP
7 décembre 2024 11:25 Mis à jour: 7 décembre 2024 11:30

Le Président sud-coréen Yoon Suk Yeol a présenté samedi ses « excuses sincères » pour avoir brièvement imposé la loi martiale mais n’a pas démissionné, à quelques heures d’un vote sur sa destitution au Parlement, devant lequel une manifestation a commencé.

Dans une courte adresse télévisée à la nation, M. Yoon a annoncé qu’il confiera à sa formation, le Parti du pouvoir au peuple (PPP), le soin de prendre « des mesures visant à stabiliser la situation politique, y compris concernant mon mandat ». « Je ne fuirai pas mes responsabilités légales et politiques concernant la déclaration de la loi martiale », a-t-il dit.

Le chef du PPP, Han Dong-hoon, a aussitôt affirmé qu’« une démission anticipée du président est inévitable », l’exercice normal de ses fonctions étant selon lui « impossible dans ces circonstances ». L’Assemblée nationale doit se prononcer à 17h00 locales (8h00 GMT) sur la motion de destitution. Une majorité qualifiée de 200 députés sur 300 est nécessaire pour démettre le président.

Le PPP de M. Yoon dispose de 108 députés et l’opposition de 192. Celle-ci a donc besoin de rallier à sa cause au moins huit députés du camp présidentiel pour l’emporter. À l’issue d’une réunion dans la nuit de vendredi à samedi, une majorité de députés du parti ont réaffirmé la ligne officielle selon laquelle ils feront échec à la destitution, alors que M. Han avait demandé la « suspension rapide » de M. Yoon.

« Sentiment de trahison »

M. Han était visé par un des ordres d’arrestation lancés par M. Yoon contre des dirigeants politiques la nuit du coup de force, et les soldats qui avaient fait irruption dans le Parlement avaient cherché à s’emparer de lui, a affirmé vendredi un député d’opposition, Jo Seung-lae, en disant fonder ces propos sur les images des caméras de surveillance.

« Actuellement, le plus gros risque en Corée du Sud est l’existence même du président. Les seules solutions sont une démission immédiate ou un départ anticipé par destitution », a déclaré samedi le chef du Parti démocrate, la principale force d’opposition, Lee Jae-myung. La déclaration du président est « très décevante » et « ne fait qu’exacerber le sentiment de trahison et de colère parmi les citoyens », a-t-il ajouté devant la presse.

Des personnes participent à une manifestation appelant à la destitution du Président sud-coréen Yoon Suk Yeol devant l’Assemblée nationale à Séoul, le 7 décembre 2024. (JUNG YEON-JE/AFP via Getty Images)

En milieu de journée, une manifestation a débuté devant le Parlement, tandis que d’autres sont prévues dans le centre-ville de Séoul. Les organisateurs ont dit prévoir 200.000 participants et la police « des dizaines de milliers ». Un rassemblement pro-Yoon a également commencé sur la place centrale de Gwanghwamun. Des manifestants y brandissaient des affiches « Arrêtez Lee Jae-myung », le chef de l’opposition, d’autres agitaient des drapeaux américains.

« La population ne lui pardonnera pas »

L’impopulaire président conservateur est accusé par l’opposition et par une partie de son propre camp d’avoir ébranlé la jeune démocratie sud-coréenne en imposant par surprise la loi martiale, avant de faire marche arrière six heures plus tard sous la pression des députés et de la rue. « La population ne lui pardonnera pas », assure à l’AFP Lee Wan-pyo, retraité de 63 ans qui a regardé l’allocution du président dans la principale gare de Séoul.

La Corée du Sud « doit empêcher de tels événements de se reproduire », appelle Jeon Yeon-ho, 19 ans, en référence à la loi martiale, utilisée pour la dernière fois en 1980 avant d’être réactivée par M. Yoon.

Craignant un nouveau coup de force nocturne du président, qui n’était pas apparu en public depuis mercredi, les députés de l’opposition ont campé toute la nuit à l’intérieur de l’Assemblée nationale. Des autobus et d’autres véhicules ont été garés sur les esplanades autour du bâtiment pour empêcher les éventuels hélicoptères des forces spéciales d’atterrir. Dans son allocution samedi matin, M. Yoon a cependant assuré qu’« il n’y aura jamais de deuxième loi martiale ». « Je présente mes excuses pour avoir causé des craintes au peuple », a-t-il conclu, avant de s’incliner.

Une enquête pour « rébellion »

Dans la nuit de mardi à mercredi, environ 280 soldats avaient fait irruption dans le Parlement, où l’opposition avait convoqué une séance d’urgence après l’instauration de la loi martiale par M. Yoon.

Les assistants parlementaires les avaient empêchés de pénétrer dans l’hémicycle en bloquant les portes à l’aide de meubles, pendant que les 190 députés qui avaient réussi à se faufiler dans le bâtiment adoptaient à l’unanimité une motion réclamant la levée de la mesure d’exception. M. Yoon avait obtempéré peu après, comme la Constitution l’y oblige, abrogé la loi martiale et renvoyé les soldats dans leurs casernes.

Si la destitution est votée, M. Yoon sera suspendu de ses fonctions jusqu’à ce que la Cour constitutionnelle valide ou non la décision des députés. Dans l’affirmative, une élection présidentielle anticipée devra avoir lieu sous 60 jours. Outre la procédure de destitution, Yoon Suk Yeol est visé par une enquête de police pour « rébellion », un crime théoriquement passible de la peine de mort (qui n’a plus été appliquée dans le pays depuis 1997).

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