Deux mois après, le mystère demeure sur le mobile du meurtre à Paris d’une octogénaire juive, Mireille Knoll, rapidement qualifié d' »antisémite » par la justice et qui avait soulevé l’indignation internationale. De nouvelles auditions des deux suspects ces derniers jours n’ont pas permis de déterminer si l’antisémitisme a joué ou non un rôle dans le crime dont a été victime cette femme âgée de 85 ans, selon une source proche du dossier.
Le 23 mars, le corps de Mireille Knoll, atteinte de la maladie de Parkinson, avait été retrouvé lardé de onze coups de couteaux et partiellement carbonisé dans son appartement parisien. Un an après le meurtre d’une autre femme juive à Paris, Sarah Halimi, le drame avait suscité une « marche blanche » de milliers de personnes et relancé le débat sur un « nouvel antisémitisme » lié à l’islamisation de certains quartiers.
Mme Knoll a été « assassinée parce qu’elle était juive », avait affirmé le président Emmanuel Macron, avant que trois cents personnalités ne signent un manifeste retentissant, suscitant l’émoi de responsables musulmans. L’indignation avait été partagée à l’étranger, face au sort de cette femme qui avait fui Paris en 1942 pour échapper aux rafles antisémites, pour finalement y être victime d’un « assassinat révoltant », selon les mots du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu au fils de Mireille Knoll.
Ce crime « nous rappelle les luttes qui sont devant nous », avait ajouté M. Netanyahu. « Les Juifs Sont Assassinés à Paris. De nouveau », s’était indigné le New York Times dans un éditorial. Deux suspects, qui s’étaient connus en prison et s’accusent mutuellement du crime, ont été vite identifiés: Yacine Mihoub, 28 ans, fils d’une voisine, et Alex Carrimbacus, un marginal de 21 ans.
S’appuyant notamment sur les déclarations de Carrimbacus, le Parquet a rapidement retenu la qualification antisémite. En garde à vue, il avait affirmé que Mihoub « avait reproché aux juifs d’avoir les moyens financiers et une bonne situation » lors d’une conversation avec la victime. Mais mi-avril, il a nuancé : « J’ai cru entendre ça, on peut croire entendre des choses qu’on n’entend pas », « j’étais sous le choc », a-t-il déclaré aux magistrates qui l’entendaient pour la première fois depuis les inculpations des deux suspects pour « homicide volontaire » et « vol », avec la circonstance aggravante de l’antisémitisme, selon une source proche du dossier.
« Ils ont juste parlé de la guerre 39-45 avec l’extermination des juifs. Et ça n’a même pas duré cinq minutes. C’était juste une discussion », assure le jeune homme, qui dit s’être rendu à l’appartement après que Yacine Mihoub lui eut proposé par téléphone « un plan thunes » mais ne pas avoir su que Mme Knoll était juive. Il maintient avoir entendu son comparse dire « Allah Akbar » en égorgeant l’octogénaire, ce que ce dernier conteste.
Yacine Mihoub a-t-il tué sa voisine en raison de sa judéité? « Je ne pense pas », a répondu aux juges Alex Carrimbacus. « On nous dit depuis le début que le mobile antisémite repose sur les déclarations de notre client, alors qu’elles démontrent que le mobile est ailleurs », souligne auprès de l’AFP Karim Laouafi, un de ses avocats.
Son client a répété aux juges croire à une vengeance personnelle: selon lui, Mihoub, ivre, s’était disputé avec sa voisine, l’accusant d’être la cause de sa détention pendant laquelle sa sœur était décédée. « Il lui disait +tu vas me le payer, j’ai pas été à l’enterrement de ma soeur+ », affirme Carrimbacus. Condamné après l’agression sexuelle de la fille de 12 ans de l’aide à domicile de Mireille Knoll, Mihoub était sorti de prison en septembre 2017.
Entendu à son tour mardi, ce dernier a accusé son camarade d’avoir poignardé l’octogénaire et tenté de mettre le feu à l’appartement, selon une source proche du dossier. Du côté de la famille de Mireille Knoll, on invite à « ne pas opposer crime crapuleux et crime antisémite », deux mobiles qui peuvent s’additionner.
L’avocat des enfants de l’octogénaire Gilles-William Goldnadel souligne pour sa part qu’il « accorde plus de foi à des déclarations spontanées qu’à une volte-face des semaines plus tard après d’éventuelles concertations ». Le nombre d’actes antisémites en France a reculé pour la troisième année consécutive en 2017 (-7%), mais les faits les plus graves ont eux augmenté (+26% des violences, incendies, dégradations, tentatives d’homicide…) Et la communauté juive, qui représente moins de 1% de la population française, est la cible d’un tiers des actes haineux recensés.
DC avec AFP
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