La décision d’exploiter l’un des plus grands gisements d’uranium au monde, dans le nord du Niger, sera prise en 2028 après des essais qui doivent débuter en 2024, a annoncé à l’AFP Matthieu Davrinche, directeur d’Imouraren SA, coentreprise du groupe français Orano (ex-Areva) et de l’État nigérien. L’exploitation d’Imouraren, situé à 80 km au sud d’Arlit et dont les réserves ont été estimées à environ 200.000 tonnes, aurait dû débuter en 2015, mais la chute des prix de l’uranium sur le marché mondial après la catastrophe nucléaire de Fukushima en 2011 a gelé le projet.
Question : Où en est aujourd’hui le projet d’exploitation du gisement d’Imouraren ?
Matthieu Davrinche : C’est un projet majeur pour Orano. Nous le relançons à la suite de plusieurs études hydrogéologiques qui nous permettent de penser que la méthode ISR (In situ recovery – extraction de l’uranium par pompage) peut être très intéressante pour l’exploitation de ce gisement.
Il a été arrêté alors que les prix étaient de 35 à 40 dollars la livre d’uranium. Ils sont ensuite passés par un point bas en 2016, aux alentours de 18 à 20 dollars la livre. Là, on est à des niveaux d’environ 50 dollars la livre, mais on n’a pas d’assurance que c’est une augmentation pérenne. Dans la planification que nous envisageons, nous continuons à mettre en place ces études hydrogéologiques qui doivent aboutir à un Go-no go (lancement ou non) d’un pilote fin 2023 début 2024.
Un pilote, ce sont des essais à petite échelle portant sur différents aspects du gisement (rendement, consommation de réactifs…) et permettant d’évaluer ce que sera l’exploitation à grande échelle. On envisage un pilote à partir de 2024 qui va nous valider le comportement du gisement, puis un deuxième. L’idée, c’est en 2028, de pouvoir faire un Go-no go industriel et de lancer idéalement l’exploitation grâce à cette méthode ISR. C’est une décision qui sera prise à l’issue de tous les résultats des essais. Notre priorité est la préservation de la nappe d’eau potable du Teloua : on compte vérifier qu’on ne pollue pas cette nappe importante dans le nord Niger.
Au départ, Imouraren devait être une mine à ciel ouvert, pourquoi avoir décidé de changer de méthode d’extraction ?
Le changement de méthode fait suite à des considérations économiques, le prix de l’uranium n’étant pas certain pour les années qui viennent. Ensuite, il y a des considérations environnementales, le groupe Orano s’est engagé à diminuer de façon importante ses émissions de CO2 et les mines à ciel ouvert émettent beaucoup de CO2, basiquement sur la consommation en gasoil des engins miniers.
La méthode par pompage, c’est l’injection d’une solution directement dans la partie minéralisée. L’idée c’est de dissoudre de l’uranium dans l’eau et de la pomper. On fonctionne en boucle fermée avec une consommation d’eau extrêmement réduite. Cette technique est particulièrement adaptée aux gisements de faible teneur (d’uranium par tonne de minerai) comme Imouraren. C’est un point de discussion avec nos collègues nigériens (…) parce qu’ici, au Niger, on a deux autres types de mine souterraine et à ciel ouvert, et ce nouveau type d’exploitation par l’ISR est peu connu. Mais 51% de l’uranium dans le monde est extrait par cette méthode.
Où en est le partenariat avec le Niger ? Fait-il encore le poids face à d’autres pays producteurs comme le Kazakhstan ?
Cela fait plus de 50 ans qu’on est au Niger, on a un vrai partenariat à long terme avec le pays et aussi des engagements sociétaux. Le Niger n’est pas très loin de l’Europe et reste une priorité parce que les actions qu’on lance pour les essais pilote, cela nous engage à hauteur de 85 millions d’euros, c’est quand même une somme assez conséquente. On ne fait pas ça pour rien, ce n’est pas de l’affichage, c’est vraiment du concret.
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