Nos ancêtres savaient tailler des outils à partir d’os il y a 1,5 million d’années, révèlent les chercheurs

Par Epoch Times avec AFP
6 mars 2025 14:36 Mis à jour: 6 mars 2025 15:45

Des homininés, les premiers représentants de la lignée humaine, façonnaient des outils en os il y a déjà 1,5 million d’années, bien plus tôt qu’on ne le soupçonnait jusqu’ici, selon une étude dans Nature mercredi.

On sait que certains de ces lointains ancêtres, par exemple les Australopithèques robustes, utilisaient des fragments d’os pour fouiller des termitières ou déterrer des tubercules. Comme aujourd’hui encore nos cousins chimpanzés manient des baguettes pour atteindre les termites dans leur refuge.

Il y a plus de deux millions d’années, les homininés est-africains de la gorge d’Olduvaï, en Tanzanie, un des sites préhistoriques les plus importants au monde, produisaient des outils de pierre grossiers. Mais jusqu’ici on ne connaissait pas d’exemple de production systématique d’outils en os au-delà de 500.000 ans avant notre ère, juste quelques exemplaires disparates en Afrique.

La découverte d’une équipe internationale bouleverse ce scénario en faisant reculer l’horloge d’un million d’années. L’étude signée par Ignacio de la Torre, à l’Institut espagnol d’Histoire à Madrid, a identifié 27 outils fabriqués à partir des fémurs, tibias et humérus de gros animaux, essentiellement éléphants et hippopotames.

« C’est la première fois qu’on trouve un assemblage de ces outils provenant de la même surface à Olduvaï », précise à l’AFP l’archéologue Francesco d’Errico, de l’Université de Bordeaux, qui a supervisé l’étude avec Angeliki Theodoropoulou, de l’Institut espagnol d’Histoire.

Des capacités cognitives remarquables

L’œil du néophyte n’y verrait que de gros morceau d’os. Pour l’anthropologue, ils sont le témoin de capacités cognitives remarquables. Supposant la maîtrise de « schémas mentaux » sur l’objet qu’on souhaite obtenir, le choix du matériau idoine, et la stratégie utilisée pour se le procurer.

En l’occurrence, l’analyse des outils montre que leurs concepteurs privilégiaient l’utilisation de fémurs, fraîchement prélevés sur une carcasse dans le cas de l’hippopotame. Mais aussi d’éléphants, pourtant rares à cet endroit, laissant penser qu’ils avaient été obtenus ailleurs.

Ces os étaient alors taillés avec des pierres servant de marteau, pour obtenir un outil allant de 20 à 40 centimètres de long, et pesant jusqu’à plus d’un kilo.

« On voit vraiment une volonté de modifier la morphologie de l’os, de produire des outils qui soient très lourds et allongés, et même dans certains cas de créer une sorte d’encoche au milieu de l’os, peut-être pour pouvoir le tenir mieux dans la main », décrit M. d’Errico.

Massifs, dotés d’une extrémité pointue, ils devaient servir à des activités de boucheries de gros mammifères. Dans un temps où les outils de pierre, dans cette culture dite de l’Olduwalien, – du nom du site d’Olduvaï -, sont encore taillés de façon rudimentaire.

Une technique disparue puis réapparue après un million d’années

De surcroît, « il y a très peu d’outils de grande dimension » en pierre sur le site d’Olduvaï, remarque l’archéologue, et celle-ci, une sorte de quartz, se prête mal à des opérations brutales de dépeçage de grandes proies. C’est la culture de l’Acheuléen, alors naissante au même moment, qui invente la taille des pierres en biface, et permettra de trancher les chairs du gibier et racler ses peaux.

« L’hypothèse de l’étude est que cette taille des os à Olduvaï soit une sorte d’invention originale, dans un moment de transition vers les bifaces », explique Francesco d’Errico. « L’autre possibilité est que cette tradition ait continué mais que ces ossements n’ont pas encore été vraiment identifiés dans d’autres sites archéologiques », poursuit-il.

La technique inaugurée à Olduvaï aurait ainsi « disparu », pendant un million d’années, avant de réapparaître plus tard. Comme dans la région de l’actuelle Rome, dépourvue de silex de bonne taille, dont les occupants tailleront des os d’éléphants en forme de biface.

L’utilisation des os suivra l’évolution de la lignée humaine. Ses représentants passant du taillage de fémurs d’éléphants il y a 1,5 million d’années, à celui d’objets sophistiqués. Comme les aiguilles munies d’un chas, « inventées en Chine et en Sibérie et qui arrivent en Europe seulement à partir de – 26.000 ans », raconte l’archéologue. Mais ça, comme le dit le scientifique, c’est une autre « très longue histoire ».

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