Coup de filet spectaculaire dans les milieux indépendantistes en Nouvelle-Calédonie : le chef de l’organisation CCAT soupçonnée par les autorités d’avoir orchestré les émeutes contre la réforme électorale a été arrêté mercredi avec dix autres personnes.
Le responsable de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), Christian Tein, et les dix autres interpellés ont été placés en garde à vue, a confirmé le procureur de Nouméa, Yves Dupas.
La CCAT soupçonnée d’être l’instigatrice des violences
Ces suspects sont interrogés dans le cadre d’une enquête visant « les commanditaires présumés des exactions commises à compter du 12 mai 2024 » dans l’archipel, a précisé le magistrat. Elle vise notamment des faits d’association de malfaiteurs, vols avec armes en bande organisée, complicité par instigation de meurtres ou tentatives de meurtre sur personnes dépositaires de l’autorité publique, a-t-il ajouté.
Comme l’a rappelé le procureur de Nouméa, les gardes à vue entamées mercredi peuvent se prolonger pendant 96 heures « s’agissant de faits relevant de la criminalité organisée ». M. Tein a lui-même contacté la gendarmerie pour être conduit devant les enquêteurs « dans le but de s’expliquer sur les faits reprochés », selon Yves Dupas.
Depuis les premières violences le 13 mai dernier, la CCAT est soupçonnée par les autorités d’être l’instigatrice des violences. C’est une « organisation mafieuse, qui veut manifestement instaurer la violence » avait affirmé le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin. Le ministre la distingue du FLNKS (Front de libération nationale kanak et socialiste) et des loyalistes, avec lesquels on peut engager un « dialogue ». Le haut-commissaire de la République Louis Le Franc l’avait qualifié d’« organisation de voyous ».
La structure née en novembre 2023 rassemble des représentants d’organisations syndicales, de structures politiques ou de mouvements associatifs indépendantistes. L’Union calédonienne (UC) qui constitue la partie la plus radicale du FLNKS, est l’une des organisations ayant œuvré pour la création du CCAT.
Neuf morts, dont deux gendarmes, des centaines de blessés et des dégâts considérables
L’opération déclenchée mercredi dès 6h00 heure locale, intervient cinq semaines après le début des violences qui agitent le territoire français du Pacifique Sud, les plus graves depuis celles des années 1980. Résultant de la contestation d’un projet de loi constitutionnel visant à élargir le corps électoral calédonien pour le scrutin provincial prévu fin 2024, ces émeutes ont fait neuf morts, dont deux gendarmes, des centaines de blessés et des dégâts considérables, d’un coût estimé à 1,5 milliard d’euros, selon le dernier bilan. Le camp indépendantiste s’oppose à ce texte, qu’il accuse de vouloir rétrécir son poids politique.
La réforme, qui devait encore être approuvée par l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en Congrès, a été suspendue par la dissolution de l’Assemblée décidée par Emmanuel Macron après la victoire du Rassemblement national (RN) aux élections européennes du 9 juin.
« Provocation »
Le collectif indépendantiste, dont le chef Christian Tein devait tenir une conférence de presse mercredi matin, a toujours démenti être à l’origine des troubles.
Dans un communiqué, la CCAT a déploré l’opération des forces de l’ordre mercredi, qualifiée de « provocation » qui « vient créer plus de doutes et de tensions au sein de la population ». Elle a demandé à ses militants de « rester mobilisés » dans l’attente de nouvelles consignes. L’Union calédonienne a pour sa part dénoncé des « arrestations abusives alors que des responsables locaux anti-indépendantistes et des miliciens criminels se pavanent en toute liberté ». Des bureaux de la CCAT, situés dans un bâtiment qui abrite également le siège de l’UC, ont fait l’objet d’une perquisition, a confirmé le procureur.
Dans le camp des anti-indépendantistes, deux mouvements, Les Loyalistes et le Rassemblement LR, ont « pris acte » de l’opération visant la CCAT, rappelant que le retour à l’ordre constituait « la seule condition de retour à un dialogue sincère et constructif ». « Nous avons été entendus », s’est pour sa part réjoui Nicolas Metzdorf, le député Renaissance sortant. « Après un mois de désarroi, le retour à l’État de droit apparaît possible », a-t-il ajouté.
Si l’intensité des violences s’est réduite ces derniers jours, permettant la réouverture de l’aéroport et d’écoles lundi, de nombreux barrages perturbent encore l’activité sur le Caillou, malgré le renfort de 3500 policiers et gendarmes. Dans un courrier envoyé mardi aux habitants de l’archipel, le chef de l’État a une nouvelle fois exigé « la levée ferme et définitive de tous les barrages » et la « condamnation des violences sans faux-semblant ».
Le début de la nuit de mercredi à jeudi était plutôt tranquille dans l’agglomération de Nouméa, selon une journaliste de l’AFP sur place. Fabrice, qui tient une « barrière de protection » contre d’éventuelles exactions menées par des indépendantistes, témoigne cependant d’une légère reprise des tensions. « Il y a un peu de grabuge, des jeunes sont venus tirer des tôles, brûler des branchages pour faire un barrage. Ca faisait un bout de temps qu’on n’avait pas eu ça », assure-t-il.
À cent mètres de là, des policiers tirent des grenades lacrymogènes détonantes. La route d’accès à l’aéroport international est toujours bloquée par les forces de l’ordre à 5 km du col de la Pirogue, l’un des points les plus chauds de la contestation. Les quelques civils qui tentent de passer sont contraints de faire demi-tour.
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