Poussés dehors par les « obstructions » de la junte au pouvoir à Bamako, la France et ses alliés européens ont officialisé ce jeudi leur retrait militaire du Mali au terme de neuf ans de lutte antidjihadiste menée par Paris.
« En raison des multiples obstructions des autorités de transition maliennes, le Canada et les états Européens opérant aux côtés de l’opération (française) Barkhane et au sein de la Task Force Takuba estiment que les conditions ne sont plus réunies pour poursuivre efficacement leur engagement militaire actuel dans la lutte contre le terrorisme au Mali et ont donc décidé d’entamer le retrait coordonné du territoire malien de leurs moyens militaires respectifs dédiés à ces opérations », soulignent-ils dans une déclaration conjointe.
Paris et ses partenaires souhaitent toutefois « rester engagés dans la région » sahélienne et « étendre leur soutien aux pays voisins du Golfe de Guinée et d’Afrique de l’Ouest » pour contenir la menace djihadiste. Les « paramètres » de cette réorganisation seront arrêtés « d’ici juin 2022 ».
Emmanuel Macron devait tenir à l’Élysée une conférence de presse à 08H00 GMT, notamment aux côtés du président du conseil européen Charles Michel, pour annoncer les décisions actées mercredi soir lors d’un sommet réunissant plusieurs dirigeants européens et africains.
Le Président français Emmanuel Macron « récuse complètement » l’idée d’un échec français au Mali. « Que se serait-il passé en 2013 si la France n’avait pas fait le choix d’intervenir ? Vous auriez à coup sûr un effondrement de l’État malien », a-t-il fait valoir, en ajoutant qu’« ensuite nos militaires ont obtenu de nombreux succès », dont l’élimination de l’émir d’Al Qaïda au Maghreb Islamique (Aqmi) en juin 2020.
25.000 hommes déployés au Sahel
La France est militairement présente depuis 2013 au Mali, proie des groupes djihadistes qui sévissent aussi dans d’autres États sahéliens. Paris est intervenu pour enrayer la progression des groupes islamistes radicaux menaçant Bamako et a ensuite mis sur pied une vaste opération régionale, Barkhane, déployant des milliers de soldats pour lutter contre les franchises locales d’Al-Qaïda et du groupe État islamique (EI).
Mais malgré des victoires tactiques, le terrain n’a jamais été véritablement repris par l’État malien et ses forces armées. Facteur aggravant, le gouvernement malien a été renversé lors d’un double coup d’État en 2020 et en 2021, aboutissant à l’arrivée au pouvoir d’une junte qui refuse d’organiser des élections avant plusieurs années et qui surfe sur un sentiment antifrançais croissant dans la région.
Mises au ban par les États ouest-africains, les autorités maliennes fustigent la présence militaire occidentale sur leur sol et font désormais appel, selon les Européens, aux mercenaires russes de la société Wagner.
Quelque 25.000 hommes sont actuellement déployés au Sahel, dont environ 4300 Français (2400 au Mali dans le cadre de Barkhane), selon l’Élysée. Le pays accueille aussi 15.000 soldats de l’ONU au sein de la Minusma, dont l’avenir est désormais en suspens puisqu’elle comptait sur un large soutien de Barkhane.
Le Mali était au cœur du dispositif antiterroriste français et européen au Sahel. Emmanuel Macron avait déjà décidé d’amorcer à l’été 2021 une réduction des effectifs français au profit d’un dispositif régional moins visible, mais ce départ contraint du pays va forcer Paris à accélérer cette réorganisation dans d’autres pays de la région menacés par la contagion djihadiste, notamment dans le golfe de Guinée.
Lorsque Paris annoncera le retrait de Barkhane du Mali, n’oubliez pas que ce n’est pas leur décision, mais celle des autorités maliennes. À plusieurs égards, Bamako c’est le Diên Biên Phu de la France en Afrique subsaharienne: une déroute militaire, diplomatique & politique.
— Nathalie Yamb (@Nath_Yamb) February 16, 2022
53 soldats français ont été tués au Sahel, dont 48 au Mali
Hors du Mali, Paris compte poursuivre la lutte antidjihadiste dans la région, où les mouvements affiliés à Al-Qaïda ou au groupe État islamique ont conservé un fort pouvoir de nuisance malgré l’élimination de nombreux chefs.
Outre un possible renforcement de sa présence au Niger voisin, qui héberge déjà une base aérienne française et 800 militaires, Paris ambitionne de proposer ses services à d’autres pays d’Afrique de l’Ouest (Côte d’Ivoire, Sénégal, Bénin…) pour les aider à contrer la propagation du djihadisme vers le golfe de Guinée.
Depuis 2013, 53 soldats français ont été tués au Sahel, dont 48 au Mali.
Lors de la conférence de presse, le Président français Emmanuel Macron « récuse complètement » l’idée d’un échec français au Mali.
« Que se serait-il passé en 2013 si la France n’avait pas fait le choix d’intervenir ? Vous auriez à coup sûr un effondrement de l’Etat malien », a-t-il fait valoir, en ajoutant qu’« ensuite nos militaires ont obtenu de nombreux succès », dont l’élimination de l’émir d’Al Qaïda au Maghreb Islamique (Aqmi) en juin 2020.
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