Premier alpiniste à avoir gravi l’Everest sans oxygène avec son complice Reinhold Messner en 1978, l’Autrichien Peter Habeler continue à 80 ans passés à défier les cimes.
Dans sa maison du Tyrol (ouest), le dynamique retraité à la carrure d’athlète se souvient du « tourbillon d’émotions » qui l’a saisi à 8848 mètres d’altitude.
« Une fois tout en haut », il dit avoir ressenti « du bonheur, mais aussi de la peur ». L’exploit à peine immortalisé, il avait hâte de redescendre pour retrouver les siens.
Depuis, d’autres ont marché dans ses pas, mais l’ascension sans assistance respiratoire reste rare et dangereuse. Le géant himalayen du Népal a été le tombeau d’au moins 300 téméraires depuis 1950.
Au-delà de 8000 mètres, l’oxygène se raréfie et les grimpeurs pénètrent en « zone létale ».
« On ne savait pas comment nos muscles et notre cerveau allaient réagir », explique l’octogénaire à l’AFP. « Dieu merci, nous n’avions pas trop conscience des possibilités que cela se passe mal ».
Quand il voit les conditions actuelles des expéditions, avec de véritables embouteillages se formant depuis les bases de campement, il s’estime « privilégié » d’avoir eu le mythique toit du monde presque pour lui tout seul.
40 years ago ,Reinhold Messner and Peter Habeler beat mount Everest without oxygen . pic.twitter.com/mBLmTnpuNR
— NangaParbatAdventure?? (@parbat_adv) May 3, 2018
Si son compagnon de cordée, l’Italien Messner, est devenu ensuite le premier à conquérir les 14 sommets de plus de 8000 mètres, Peter Habeler ne se considère pas comme un « collectionneur » de records.
Lui en a franchi cinq dans sa carrière et bien d’autres pics réputés, avec surtout le souci d' »ouvrir des portes ».
« Il peut gravir toutes les montagnes »
À son retour de l’Everest, il s’est accordé une pause pour consacrer du temps à sa famille et fonder dans son village natal de Mayrhofen une école de ski, aujourd’hui dirigée par l’un de ses deux fils.
« Il faut trouver du plaisir en montant et quand on essaie un peu de comprendre la montagne, elle se change en amie », dit-il avec un large sourire et des yeux pétillants, ajoutant qu’après quelques années passées chez lui, il avait à nouveau des « fourmis dans les jambes ».
Ses ascensions ultérieures, il ne les a pas faites avec Reinhold Messner, qu’il remercie de l’avoir aidé à surmonter son appréhension et ses doutes sur l’Everest.
Ce dernier salue en retour son « génie », son « instinct naturel ». « Il peut gravir toutes les montagnes, sur n’importe quel terrain, à n’importe quelle hauteur, dans n’importe quelles circonstances », a-t-il écrit en conclusion du dernier livre d’Habeler.
Pour un tourisme durable
Du haut de son balcon en bois avec vue sur les Alpes, l’Autrichien est intarissable sur sa passion, « une fontaine de jouvence » qu’il espère pratiquer jusqu’au bout.
« C’est une activité physique à part entière qui sollicite aussi beaucoup le cerveau », juge-t-il.
Lors des nombreuses conférences qu’il continue de donner, cette légende de l’alpinisme prône le tourisme durable, notamment le voyage en train pour atteindre les stations.
Et s’inquiète du réchauffement climatique, qui pose « un énorme problème » aux alpinistes. Il s’attend à ce que des passages deviennent impraticables en raison de l’instabilité du terrain, y compris dans ses montagnes.
Il en arpente les versants tous les jours, à skis ou avec ses mousquetons quand le beau temps revient.
Un minimaliste
Il se lance aussi parfois des défis plus ambitieux, comme à 74 ans quand il est devenu le sportif le plus âgé à affronter la face nord de l’Eiger en Suisse, raconte-t-il.
À ses côtés, son ancien élève David Lama qui trouvera la mort peu après, à seulement 28 ans, emporté par une avalanche dans le parc national canadien de Banff.
L’accident, dont l’évocation l’émeut encore aux larmes, l’a rendu encore plus prudent, même s’il continue à gravir les Alpes avec le moins de matériel et d’aide extérieure possibles.
« Je suis un minimaliste. Je ne veux pas avoir trop de choses dans mon sac à dos », souffle celui qui s’est initié à son art auprès des guides de montagne, des gens « qui font ressortir le meilleur de vous-même ».
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.