À la recherche d’un projet personnel pour se remonter le moral, l’origamiste autodidacte Cristian Marianciuc s’est proposé de plier 100 grues en papier en 100 jours. Mais après avoir terminé, il a pensé qu’il serait dommage de s’arrêter là et il a été poussé à continuer à faire des grues.
Cent grues sont devenues mille. Et finalement, son passe‑temps s’est transformé en une profession rare qui consiste à fusionner l’artisanat en papier avec une multitude de moyens mixtes, dépassant l’expérience tactile et visuelle pour incorporer de la musique, des parfums, et même Mère Nature dans ses œuvres.
Cristian Marianciuc, 32 ans, qui a grandi dans une petite ville du nord‑est de la Roumanie, a découvert l’origami alors qu’il étudiait la diplomatie et les langues étrangères dans le cadre d’une bourse universitaire à Sydney, en Australie. À l’époque, il ne s’intéressait guère à cette forme d’art, mais après avoir travaillé pendant trois ans pour une ONG en Moldavie, il a eu du mal à se réadapter à la vie sur le continent.
Il était loin de s’attendre à ce que son remède prenne la forme d’une grue en origami.
La pratique rend parfait
« Je voulais simplement faire face à cette situation d’une manière créative et positive », raconte‑t‑il à Epoch Times. Il a d’abord commencé à reprendre de manière créative des pages de son journal intime, les découpant en carrés, avant d’y écrire un message spécial, pour lui‑même ou pour quelqu’un d’autre, puis de les plier en grue.
C’est le 1er janvier 2015 qu’il a posté sa première grue sur Instagram. Bien qu’il s’agisse d’« un projet très intime, très personnel », il est en même temps devenu « assez public » dès sa création. « J’avais un peu d’appréhension parce que j’avais fait beaucoup de choses similaires. Je me suis rapidement lassé. Mais avec celui‑ci, pour une raison ou une autre, ça a fait tilt. »
Travaillant à plein temps comme traducteur et interprète, faisant la cuisine et le ménage pour joindre les deux bouts, Cristian Marianciuc trouvait chaque jour dix minutes, avant ou après le travail, pour s’asseoir avec son papier et créer. « Pour la toute première grue que j’ai postée, même la photo est vraiment mauvaise… Au fil des jours, on peut voir un développement progressif. La pratique rend parfait, comme on dit. »
Cent jours sont passés en un clin d’œil, puis 365. Lorsque janvier 2016 est arrivé, il avait trouvé une telle aisance dans son métier qu’il ne pouvait plus envisager de s’arrêter.
Chaque grue est d’abord un simple oiseau en origami plié à partir d’une feuille carrée de papier. Il y ajoute des éléments décoratifs en papier, une fleur occasionnelle ou d’autres objets trouvés. Il a terminé sa 1000e grues à la fin du mois de septembre 2017. « Après cela, j’ai vraiment eu besoin de faire une pause. »
L’expérience complète
Issu d’une fratrie de onze enfants, Cristian Marianciuc affirme que la famille est une de ses plus grandes inspirations pour créer ses œuvres d’art. Profiter de l’environnement naturel de sa ville natale rurale lors de ses promenades matinales en est une autre.
Amateur de musique classique et de musique pop depuis le lycée, Cristian Marianciuc est également inspiré par le son. À un moment donné de son parcours, il a commencé à ajouter des suggestions de chansons à ses posts Instagram, expliquant : « Si [les followers] regardent la grue et écoutent la chanson, ils bénéficieront de l’expérience complète. »
Depuis 2020, Cristian Marianciuc a bifurqué vers un autre support sensoriel : le parfum. Comme sa famille n’a jamais pu s’offrir de parfums, il appréciait les senteurs naturelles des changements de saison. Ce n’est que lors d’un voyage en France en 2020 pour une exposition qu’il a découvert les boutiques de parfums de Paris et qu’il a été conquis.
« J’ai fini par acheter quelques échantillons », dit‑il, ajoutant que le jour où il est rentré chez lui, la pandémie a frappé. « J’ai dû m’isoler dans ma chambre pendant deux semaines. (…) J’ai commencé à défaire mes bagages et j’ai trouvé les échantillons. » C’est en s’asseyant et en les humants que l’idée d’incorporer des fragrances dans son travail a germé.
Aujourd’hui, le processus créatif de Cristian Marianciuc commence par ressentir un parfum et réfléchir aux couleurs et au papier qui conviennent à son atmosphère. Il préfère travailler en monochrome, s’aventurant dans des couleurs plus chaudes en hiver. En collaboration avec ses clients, il commence chaque nouvelle proposition par un croquis.
Les défis
Cristian Marianciuc a collaboré avec des marques de parfums qui apprécient son travail, parfois dans le cadre de campagnes publicitaires à grande échelle. Mais bien qu’il soit passé maître dans son art, ses grues lui posent toujours des défis.
Ceux‑ci sont « principalement mentaux », dit‑il. Ne pas être dans « le bon univers mental », ou « d’humeur créative. » Ou avoir « des choses dans la tête que je dois gérer », ou « si je suis stressé ». Par ailleurs, il peut être difficile de se séparer de ses commandes.
Sa pièce préférée est une de ses dernières œuvres. Plus longue à produire, cette grue, qui reprend un motif traditionnel roumain, a nécessité une semaine de travail. En raison de plusieurs petits accidents survenus au début avec ses outils de coupe, Cristian Marianciuc s’astreint désormais à un rythme soutenu, fait régulièrement des pauses pour reposer ses poignets et travaille calmement et prudemment avec ses lames.
Si son objectif est de traduire l’abstrait en tactile, il puise son inspiration dans une autre source. La célèbre histoire de la jeune japonaise Sadako Sasaki l’a beaucoup impressionné. Sadako Sasaki a été affectée par les radiations atomiques des bombes d’Hiroshima et de Nagasaki pendant la Seconde Guerre mondiale.
« Dans la culture japonaise, si vous pliez 1000 grues, vous obtenez une bonne santé ou un souhait. Elle en a plié 600, mais elle est ensuite décédée d’une leucémie. »
Comme une des sœurs de Cristian Marianciuc est morte d’une leucémie, chacune de ses grues représente un hommage. Il en a réalisé plus de 5000 jusqu’à présent. Sa page Instagram compte plus de 55.000 followers, et son travail touche les âmes du monde entier.
Faire face à l’obscurité
« Un jour, j’ai reçu ce courriel d’une dame des États‑Unis. Son mari allait subir une intervention chirurgicale assez compliquée et elle était stressée, faisant les cent pas dans l’hôpital. Elle ne savait pas quoi faire. Puis elle a sorti son téléphone et est tombée sur l’un de mes posts. »
Faisant défiler toutes ses grues et lisant tout, au moment où elle a vu la dernière, l’opération était presque terminée. « Elle a dit qu’elle était vraiment reconnaissante et me rendait grâce pour avoir pu, d’une certaine manière la distraire de son stress. Je vais me souvenir de cette histoire pour le reste de ma vie. »
Cristian Marianciuc collabore actuellement avec le musicien britannique Kinship pour créer un clip vidéo. La mélodie et les paroles inspirantes sont « au plus près de mon idéal musical. Tout ce projet, ce que je fais, vient peut‑être d’un épisode sombre, mais je voulais traiter cette obscurité d’une manière vraiment créative et positive. »
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