Après le plafonnement des prix de l’essence et le prix coûtant à la pompe pour faire face à l’inflation, le gouvernement a sorti la carte de la vente à perte de carburants, une mesure jusqu’ici taboue que le gouvernement veut rendre effective « début décembre ».
« Ce sera effectif à partir de début décembre, j’espère le 1er décembre puisque le texte de loi (sur les négociations commerciales entre producteurs et distributeurs, ndlr) sera examiné à l’Assemblée début octobre », a affirmé lundi le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire sur France 2, ajoutant que la mesure durerait « six mois ». Élisabeth Borne l’avait annoncée samedi, levant un vieux tabou. Le projet de loi sera présenté en Conseil des ministres le 27 septembre, a confirmé le ministère à l’AFP.
??️ « Une augmentation de la facture d’électricité en janvier est une possibilité mais il est hors de question d’avoir une hausse de 10 à 20 %. Nous maintiendrons une protection en 2024 » indique Bruno Le Maire. #Les4V @BrunoLeMaire pic.twitter.com/w7n3swPahg
— Telematin (@telematin) September 18, 2023
La vente à perte est interdite en France depuis 1963 et est loin de faire l’unanimité, bien qu’elle ait été envisagée à plusieurs reprises pour faire face à l’inflation. Le groupe RN (88 députés) est d’ailleurs défavorable, selon les déclarations du vice-président du RN Sébastien Chenu lundi matin sur Public Sénat.
Pas de vente à perte généralisée
Si la mesure était votée, la question sera de connaître le nombre de stations-service qui l’utiliseront, car on imagine mal les stations indépendantes vendre à perte leur principale source de chiffre d’affaires, contrairement aux grandes surfaces qui utilisent l’essence pour attirer des clients dans leurs rayons.
En France, environ un tiers des 10.000 à 11.000 stations sont gérées par TotalEnergies (3400 stations), et une moitié ont une enseigne de la grande distribution. Les autres sont indépendantes. Francis Perrin, directeur de recherche à l’Iris, table sur « des opérations exceptionnelles » sur « un mois ou deux » par les grandes surfaces, en fonction des « zones géographiques et des situations de concurrence » mais pas une vente à perte généralisée.
Cet été, les prix du carburant sont repartis à la hausse, frôlant le seuil symbolique des deux euros le litre, dans le sillage de l’envolée des prix du pétrole. Et ils pourraient continuer à monter, avec des réductions de production dans les prochains mois décidées par des pays producteurs.
Une mesure « complètement décalée »
La vente à perte « peut répondre à un enjeu de très court terme (…) l’un des inconvénients c’est qu’il n’y a pas de ciblage », a réagi Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, sur Franceinfo. C’est une mesure « complètement décalée », affirme Frank Rosenthal, expert en marketing du commerce, recommandant un ciblage « de ceux qui roulent le plus ».
Dans une note, le cabinet Asteres souligne que la mesure « ne semble pas être en mesure d’accroître sensiblement le pouvoir d’achat des ménages », la probabilité qu’un grand nombre de distributeurs l’applique étant mince et leurs marges étant déjà faibles. Le cabinet souligne par ailleurs le risque d’une hausse des prix des autres produits pour « compenser les pertes » et un évincement redouté des petites stations.
Hors grandes surfaces « je leur donne trois mois »
« Mes adhérents vivent à 40, 50% voire plus de la vente du carburant, donc s’ils vendent à perte, je leur donne trois mois », s’est indigné Francis Pousse, président du syndicat professionnel Mobilians, représentant 5800 stations-service hors grandes surfaces.
De nombreux distributeurs ont déjà ces derniers mois vendu du carburant à prix coûtant. La plupart se sont engagés la semaine dernière à poursuivre ces opérations jusqu’à la fin de l’année. « L’essence est un produit d’appel parce qu’il s’agit d’un produit qui coûte cher, sur lequel il peut y avoir des différences », explique à l’AFP Frank Rosenthal, expert en marketing du commerce.
La vente à perte est « une curieuse façon de régler le problème dans la mesure où les distributeurs ne sont pour rien dans le prix élevé », ajoute-t-il. « La marge se fait au niveau des pays qui produisent et de ceux qui raffinent. Les distributeurs ne font qu’acheter, avec des volumes tels qu’ils leur permettent d’avoir de meilleurs prix. » TotalEnergies a lui annoncé qu’il prolongerait l’an prochain le plafonnement à 1,99 euro par litre du prix de l’essence et du gazole, annoncé en février dernier.
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