La Cour de cassation a estimé mercredi que le plafonnement des indemnités pour licenciement abusif, une mesure phare des ordonnances Travail contestée par plusieurs conseils de prud’hommes, était « compatible » avec les textes internationaux.
« C’est une très bonne nouvelle pour l’emploi », s’est félicitée la ministre Muriel Pénicaud car ce barème a contribué à « lever la peur de l’embauche dans les petites entreprises », les patrons ayant dorénavant connaissance du coût d’un licenciement éventuel.
Même satisfaction côté patronal. « Cet élément contribue à sécuriser les entreprises, en particulier les plus petites, qui pouvaient être mises en péril par des condamnations imprévisibles et trop lourdes », a jugé l’U2P (artisans et commerçants). « Le doute est levé dans l’intérêt de tous », a tweeté le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux.
Dans son avis, la Cour de cassation estime que ce barème est « compatible » avec la Convention n°158 de l’Organisation internationale du travail qui demande « le versement d’une indemnité adéquate » en cas de licenciement abusif.
Pour la Cour, « le terme « adéquat » doit être compris comme réservant aux États parties une marge d’appréciation » et l’État, avec ce barème, n’a fait « qu’user de sa marge ». Elle rappelle qu’il n’est pas appliqué en cas de licenciement nul (harcèlement moral ou sexuel, discrimination, etc.).
La Cour estime que la Charte sociale européenne, autre texte invoqué, « n’a pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers » et que le barème « n’entre pas dans le champ d’application » de la Convention européenne des droits de l’homme » sur le droit à un procès équitable.
Depuis les ordonnances réformant le code du travail fin 2017, ces dommages et intérêts sont plafonnés entre un et vingt mois de salaire brut, en fonction de l’ancienneté. Par exemple, ce plafond est de dix mois pour dix ans d’ancienneté.
À partir de deux ans d’ancienneté s’applique un plancher minimal de trois mois, plus faible dans les entreprises de moins de onze salariés. Auparavant, ce seuil était de six mois et les juges n’étaient pas tenus par un plafond. Dans les faits, ils allaient jusqu’à 30 mois de salaire pour 30 ans d’ancienneté.
En dépit de sa validation par le Conseil constitutionnel, plusieurs conseils de prud’hommes (près d’une vingtaine selon un syndicat d’avocats) ont refusé d’appliquer le barème au motif qu’il serait contraire aux traités internationaux.
Pour y voir plus clair, les conseils de Louviers (Eure) et de Toulouse avaient donc saisi la Cour de cassation afin d’avoir un avis de portée générale, sans attendre un pourvoi sur un cas concret.
Les syndicats qui dénonçaient un barème « sécurisant l’employeur fautif », n’ont pas caché leur déception. La CGT a dénoncé « une validation aberrante », la CFDT « une décision fortement regrettable » tandis que FO promettait de poursuivre « ses recours aux niveaux européen et international ».
Cet avis devrait fortement influencer les prochains jugements, notamment les deux premières décisions de cours d’appel, attendues le 25 septembre, l’une à Paris, l’autre à Reims.
« Cet avis collégial de la Cour va avoir une très grande autorité morale. Il sera très difficile pour une cour d’appel d’ignorer un tel avis », reconnaît Me Antoine Lyon-Caen, intervenu au nom de la CFE-CGC, qui ne désespère cependant pas qu’à l’avenir la Cour de cassation se prononce différemment « sur un cas particulier d’application du barème ».
Mme Pénicaud n’a pas caché que le barème avait aussi pour but de réduire le nombre de contentieux aux prud’hommes « en encourageant à la négociation et à la médiation ».
Selon un rapport sénatorial publié mardi, le nombre de contentieux a déjà diminué de 45% depuis 2005, conséquence « de la baisse du nombre de licenciements et du recours croissant à la rupture conventionnelle ».
Pour autant, les délais moyens de jugement en première instance « ne se sont pas réduits » et dépassent 16 mois. Avec en outre, deux tiers de jugements frappés d’appel.
La faute, selon ce rapport, au fait qu’il ne reste plus devant les prud’hommes que les affaires complexes, mais également à un défaut de professionnalisme des conseillers prud’homaux, désignés paritairement par les organisations syndicales et patronales.
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