La dette publique de la France a continué de gonfler à la fin du deuxième trimestre, s’établissant à 112 % du produit intérieur brut (PIB), contre 110,5 % du PIB à la fin mars, a indiqué l’Insee. L’endettement public du pays a augmenté de 68,9 milliards d’euros pour atteindre 3228,4 milliards d’euros entre avril et juin.
Après un décrochage à 5,5 % du PIB en 2023, le déficit public de la France connaîtra un nouveau dérapage en 2024 et risque de dépasser les 6 % du PIB, a prévenu le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin. C’est bien pire que le déficit de 5,1 % du PIB sur lequel tablait le précédent gouvernement et bien supérieur au seuil de 3 % fixé par l’Union européenne.
Michel Barnier présentera le 1er octobre les pistes privilégiées pour redresser les comptes lors de son discours de politique générale, son premier test politique devant le Parlement avant celui du budget.
Des finances publiques fortement dégradées
La hausse enregistrée au deuxième trimestre provient essentiellement de l’augmentation de la dette de l’État (+68,9 milliards d’euros). La dette des administrations de sécurité sociale s’est également inscrite en hausse, de 4 milliards d’euros. En revanche, la dette des divers organismes d’administration centrale s’est contractée de 4,7 milliards d’euros, et celle des administrations publiques locales de 0,3 milliard d’euros.
Le nouveau gouvernement du Premier ministre Michel Barnier s’est engagé à présenter durant « la semaine du 9 octobre » son projet de budget pour 2025, qui sera principalement placé sous le signe de coupes dans les dépenses publiques pour tenter d’assainir des finances publiques fortement dégradées.
L’élaboration du budget s’annonce particulièrement complexe au vu de la mauvaise santé des finances publiques. Devenu un des mauvais élèves de la zone euro, la France a vu sa note souveraine dégradée par l’agence de notation S&P Global Ratings fin mai et fait l’objet d’une procédure pour déficits publics excessifs de la part de la Commission européenne.
Devant la commission des Finances de l’Assemblée, le ministre de l’Économie Antoine Armand a, lui, révélé que la France avait obtenu de Bruxelles un délai jusqu’au 31 octobre pour présenter sa trajectoire pluriannuelle des finances publiques. La date butoir initiale était le 20 septembre.
Une situation « extrêmement grave »
« Jamais un Premier ministre n’a été contraint à présenter un budget en quinze jours. Ce que je trouve est extrêmement grave, et je pèse mes mots », a déclaré le Premier ministre Michel Barnier lors d’un déplacement au congrès des sapeurs-pompiers de France, à Mâcon, le 28 septembre.
« Oui, la situation de nos finances publiques est grave, et je n’irai pas par quatre chemins: en 2024, le déficit public risque de dépasser les 6 % du PIB, selon les dernières estimations dont nous disposons », a affirmé le ministre du Budget.
Interrogé sur le déficit public abyssal, le Premier ministre a réaffirmé sa volonté de « mieux utiliser l’argent public » et de ne pas augmenter la dette de la France.
Les raisons du dérapage
Laurent Saint-Martin a détaillé les deux « principales raisons » du dérapage massif du déficit public en 2024 : d’abord des recettes fiscales « moins importantes » qu’attendu. Un écart qu’il attribue au fait que la croissance ait été davantage tirée par les exportations que par la consommation, engendrant moins de TVA.
Il a aussi pointé du doigt « l’attentisme des acteurs économiques depuis quelques mois ». Déjà pénalisées par la hausse des taux d’intérêt, les entreprises ont suspendu de nombreux investissements et embauches cet été en attendant de savoir quel Premier ministre succéderait à Gabriel Attal.
Plus généralement, le ministre du Budget a défendu la politique de l’offre d’Emmanuel Macron et imputé la mauvaise santé financière de la France à la « dépense publique massive, record, pour répondre aux crises » du Covid et de l’inflation.
Le « n’importe quoi qu’il en coûte »
Le président de l’Association des maires de France (AMF) David Lisnard a qualifié de « n’importe quoi qu’il en coûte » la prolongation d’une durée selon lui « inconsidérée » des dispositifs d’aide de l’État après la pandémie, ce qui a contribué à gonfler la dette publique.
« La dette publique, depuis 2019 à cette année, a augmenté de quasiment 13 points de PIB en France. La moyenne européenne, c’est 4 points. […] Donc, il y a eu véritablement un n’importe quoi qu’il en coûte », a déclaré le maire LR de Cannes lors de la conférence de presse de rentrée de l’AMF.
Alors qu’un nouveau dérapage du déficit public se profile, Bercy a renvoyé la responsabilité sur les dépenses des collectivités.
« Les communes respectent la règle d’or, n’empruntent que pour leur investissement. La dette des collectivités représentait il y a trente ans […] un peu plus de 9 % du PIB. […] Nous sommes à un peu plus de 8 % […]. Pendant ce temps-là, la dette de l’État a été multipliée par 2,5 », a ajouté David Lisnard.
Évoquant à son tour « un étouffoir » pour les collectivités, dont les ressources fiscales sont une à une supprimées, le premier vice-président délégué de l’AMF André Laignel a dénoncé « un enfumage » orchestré par Bercy.
Les solutions avancées
Pour redresser la barre, « il nous faudra faire des efforts collectifs importants », a prévenu le ministre du Budget, issu du camp présidentiel, s’engageant à « tenir un discours de vérité » et à promouvoir « le dialogue » avec le Parlement.
L’équilibre entre coupes dans les dépenses et recettes fiscales supplémentaires s’annonce très délicat à trouver, alors que la France, avec six autres pays de la zone euro, est déjà visée par une procédure de déficit excessif par la Commission européenne.
Le rétablissement des comptes publics passera « prioritairement » par une baisse des dépenses, a expliqué Laurent Saint-Martin, se disant ouvert à un débat sur une hausse de la fiscalité « si et seulement si il répond à une problématique de justice fiscale ».
Il ne s’interdit pas de revoir le montant de 492 milliards d’euros de dépenses mentionné dans l’ébauche de budget 2025 du précédent gouvernement et, pour 2024, d’annuler tout ou partie des 16,5 milliards d’euros de crédits gelés.
Il a exclu une « augmentation d’impôts généralisée », car « on ne touche pas aux gens modestes et au travail et aux classes moyennes », laissant transparaître son opposition à un gel des barèmes de l’impôt sur le revenu.
Un « cocktail » de hausses d’impôts ciblées et baisses de dépenses, selon la Banque de France
Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a suggéré le 25 septembre un « cocktail bien proportionné » de diminution des dépenses et de « certaines hausses d’impôts ciblées, justes », pour faire face au déficit vertigineux du pays.
« La maladie française c’est que nous accumulons depuis trop longtemps trop de déficit et trop de dettes, et que cette situation ne peut plus durer. La dette coûte de plus en plus cher, les dépenses héritées du passé nous empêchent de financer les dépenses d’avenir. Et les prêteurs internationaux, qui prêtent (de l’argent) à la France nous disent, il faut réagir », a déclaré le gouverneur.
Selon François Villeroy de Galhau, « il faut se poser la question de façon plus simple : quand une famille vit au-dessus de ses moyens et qu’elle n’arrive pas à boucler son budget, et c’est le cas de la France, on peut diminuer ses dépenses ou on peut augmenter ses recettes ».
« Le bon sens, c’est qu’aujourd’hui il faut faire les deux, il faut un cocktail bien proportionné des deux mesures. Ce n’est pas à la Banque de France d’en décider, c’est le débat démocratique avec le gouvernement et le Parlement. Je crois que la bonne proportion c’est une majorité d’économies de dépenses pour environ trois quarts, et sans doute un recours à certaines hausses d’impôts ciblées, justes, pour un quart », a-t-il estimé.
Le gouverneur de la Banque centrale a également suggéré de « regarder ce qui marche chez nos voisins », car « nous allons bientôt être le seul pays européen qui n’arrive pas à ramener sa dette sous 3 % » et « nous ne sommes pas plus bêtes que nos voisins européens ».
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