Les yeux seront rivés mercredi sur la banque centrale américaine, qui achève sa réunion et dira si elle relève ses taux, au moment où la confiance semble revenir sur les Bourses et marchés après deux semaines de turbulences dans le secteur bancaire.
La puissante Fed se trouve face à un difficile arbitrage : doit-elle continuer à relever son principal taux directeur pour juguler la forte inflation persistante, ou marquer une pause, afin d’éviter d’aggraver les difficultés des banques ? « L’expérience de mort imminente qu’a connue le secteur bancaire au cours des deux dernières semaines devrait rendre les responsables de la Fed plus mesurés », relève Steve Englander, économiste pour Standard Chartered et ancien économiste à la Fed.
L’hypothèse d’une hausse modérée, d’un quart de point de pourcentage, soit 25 points de base, l’emporte ainsi très largement parmi les acteurs du marché, selon l’évaluation de CME Group.
Les anticipations avaient fait les montagnes russes, passant en quelques jours d’une forte hausse d’un demi-point de pourcentage (50 points de base) après des propos du président de la Fed sur l’inflation, à zéro lors du déclenchement de la mini-crise bancaire.
Les faillites des banques régionales américaines Silicon Valley Bank (SVB), Signature Bank et Silverline, ont créé une vague d’inquiétudes dans le secteur bancaire et sur les marchés mondiaux. Gouvernements, banques centrales et régulateurs sont intervenus en urgence pour tenter de rétablir la confiance, meilleure arme pour éviter à tout prix une contagion. Mais la banque helvétique Credit Suisse, déjà en difficulté depuis des années, en a fait les frais, et a été rachetée dimanche en urgence par sa compatriote UBS.
Un secteur bancaire à la hausse malgré les risques
Le calme a cependant semblé revenir mardi. Les Bourses européennes ont clôturé sur un deuxième rebond consécutif, et à Wall Street, qui a également terminé dans le vert, c’est même le secteur bancaire qui a mené la hausse du marché. La banque américaine First Republic s’est elle envolée de presque 30%. « La pression sur les titres du secteur bancaire semble se relâcher après les actions des régulateurs pour restaurer la confiance », a commenté Rubeela Farooqi, cheffe économiste pour HFE, qui n’écarte toutefois pas le risque de « crainte de nouvelles faillites et d’un risque de contagion ».
La réunion de la Fed a débuté mardi matin et s’achèvera mercredi à la mi-journée. Un communiqué de presse sera publié à 14h00 (18h00 GMT) puis le président de l’institution, Jerome Powell, tiendra une conférence de presse à 14h30 (18h30 GMT). Jerome Powell « reconnaîtra les risques sur le secteur bancaire, mais soutiendra que la menace est contenue », anticipe Ian Shepherdson, chef économiste pour Pantheon Macreconomics. Pour lui cependant, « toute hausse des taux aujourd’hui est une erreur », car « la Fed a fait assez pour ramener l’inflation à la cible, et nous ne pouvons pas être sûrs que les menaces contre le système bancaire sont passées ».
? THREAD – Argent illimité : le cheat code
En une semaine, la Fed a prêté plus d’argent aux banques qu’en pleine crise en 2008.
Probablement rien non ? ? pic.twitter.com/ip397C6rKX
— MoneyRadar (@MoneyRadar_FR) March 22, 2023
D’autant plus que la chute de ces banques a été poussée par les relèvements des taux de la Fed, qui ont grimpé à un rythme inédit depuis le début des années 1980, lors de l’épisode de très forte inflation qu’avaient alors connu les États-Unis. Compris entre 0 et 0,25% il y a encore un an, les taux se trouvent désormais entre 4,50 et 4,75%. La Fed mettra également à jour ses prévisions économiques, en termes de croissance du PIB, de chômage et d’inflation, et ses responsables diront jusqu’où ils voient les taux grimper. La banque centrale américaine est d’autant plus sous pression que son homologue européenne, la BCE, a relevé jeudi ses taux de 0,50 point, en assurant qu’elle ne ferait pas de compromis entre stabilité des prix et stabilité financière.
La Fed a prêté quelque 164 milliards de dollars aux banques américaines en quelques jours, afin que tous les clients qui souhaitaient retirer leur argent puissent le faire, ainsi que 142,8 milliards aux deux entités créées par les régulateurs américains pour succéder à SVB et Signature Bank.
À rebours de la lutte contre l’inflation que mène la Fed, ces prêts ont fait grimper de 297 milliards de dollars son bilan, qu’elle s’efforçait pourtant de réduire depuis juin. Elle avait acheté des titres pendant la pandémie de Covid-19 pour inonder le marché de liquidités et lui permettre de continuer à fonctionner.
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