Romain Bardet : « l’écueil pour un ancien cycliste, c’est de devenir acerbe »

Par Epoch Times avec AFP
3 juillet 2025 06:58 Mis à jour: 3 juillet 2025 06:59

A peine retraité du cyclisme, Romain Bardet, 34 ans, remonte en selle, sur une moto, pour commenter la deuxième semaine du Tour de France sur Eurosport. Il confie à l’AFP vouloir éviter l' »écueil » qui guette tout ancien coureur: « oublier la difficulté de ce sport et devenir acerbe ».

Question : Qu’éprouvez-vous à l’idée de passer de coureur à commentateur?

Romain Bardet: « C’est une opportunité que j’ai saisie à deux mains car je suis un passionné qui aime regarder le vélo à la télé. Alors que tous mes contemporains seront sur le vélo à souffrir, c’est un plaisir de pouvoir changer la focale, toujours avec les jambes sculptées comme un coureur mais avec le recul pour analyser les choses. »

Est-ce un avantage de basculer aussi vite d’un rôle à l’autre?

« C’est la première course de ma vie d’après. Je connais tous les coureurs du peloton, les directeurs sportifs, donc je vais essayer de rendre l’expérience la plus immersive possible pour les téléspectateurs.

Après 11 Tours de France, je connais les parcours, les ascensions. Je vais préparer les étapes comme quand j’étais coureur, me mettre dans leur schéma de pensée pour avoir de la matière à en parler.

Quand on est coureur cycliste, il y a tout un côté qu’on ne retranscrit pas à travers les interviews, sur la profondeur des raisonnements en termes de tactique de course ou de sensations. Je vais essayer de développer ça pour que ce qu’on voit à l’écran fasse davantage sens. »

Vous êtes-vous entraîné à commenter? 

« Non, je pense que ce qui peut faire la différence, c’est la spontanéité. Préparer des choses pourrait être contre-productif par rapport à ce qu’on demande à un commentateur moto: être en prise avec l’inattendu et pouvoir le retranscrire pour amener une vision supplémentaire aux téléspectateurs. »

Voyez-vous ça comme une expérience unique ou une reconversion durable?

« Il faut d’abord faire une première pour avoir des éléments de réponse! »

Y a-t-il des commentateurs qui vous ont particulièrement marqué? 

« Oui. J’aimais beaucoup écouter Laurent Fignon (ancien champion mort en 2010 et consultant dans les années 1990-2000). Il a laissé une empreinte très spéciale et c’était dans les années où j’étais à la lisière du monde professionnel, il y avait toute une part de rêve attachée à ça.

J’aime aussi Jacky Durand (ex-coureur retraité depuis 2004 et consultant sur Eurosport, ndlr). Même s’il a arrêté la course depuis quelques années, il a encore tous les codes et une analyse très fine. Surtout, il n’est jamais dans le jugement, parce qu’un des écueils qui peut guetter les anciens cyclistes, c’est d’oublier la difficulté de ce sport et devenir un peu acerbes ou durs dans les critiques.

Ce que les passionnés souhaitent entendre, c’est des analyses avec beaucoup de contexte et une grande objectivité. Moi, j’aime me mettre devant ma télévision pour écouter les gens comme ça. »

A quoi s’attendre pour ce Tour, notamment côté français?

« Malgré la mainmise de Pogacar, Vingegaard et peut-être même Remco (Evenepoel), on va avoir dix jours ouverts au début, personne ne va tuer le Tour en première semaine. Après, on va monter crescendo avec les Pyrénées, puis les Alpes.

Côté français, on a une génération de talents, avec Kévin Vauquelin, Lenny Martinez, Romain Grégoire et j’en passe. A côté de Julian (Alaphilippe), certains vont prendre une énorme dimension médiatique durant ces trois semaines. »

Un sportif de haut niveau redoute-t-il la fin de carrière?

« Moi pas du tout, car l’arrêt de ma carrière sportive ne signifie pas l’arrêt du sport: je fais du sport-plaisir tous les jours. A côté de ça, j’ai beaucoup plus d’espace mental pour des choses que j’ai dû mettre de côté pendant des années, et qui me nourrissent au niveau intellectuel: être éveillé sur les choses, prendre le temps de rencontrer des gens…

Enfin, c’est profiter de chaque instant sans avoir constamment une montre en main et sans penser à l’entraînement du lendemain. »

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.