Les sans-abri font souvent partie des groupes les plus négligés et les plus incompris d’un pays.
En 2003, pendant quelques jours, une femme a fait un « acte de foi » en abandonnant son lit douillet pour aller vivre dans la rue avec les sans-abri et entrer en contact avec eux à Austin, au Texas. En retour, elle a acquis une nouvelle perspective.
Judith Knotts, 79 ans, vit à Austin depuis 2000. Elle est titulaire d’une maîtrise en politique et leadership éducatif de l’université Virginia Tech et a travaillé dans l’administration scolaire depuis les années 1970.
Alors que Judith Knotts grandissait et fréquentait l’école publique en Pennsylvanie, elle se souvient de son professeur de CM2 qui alignait les pupitres des élèves en fonction de leur moyenne. Judith, bien que très jeune à ce moment, savait qu’il y avait certainement une meilleure façon d’éduquer les élèves.
« Ça a été la motivation de départ pour essayer d’améliorer les écoles », a-t-elle déclaré.
Interagir avec les sans-abri
Lorsque Judith est arrivée à Austin en 2000, elle a commencé à travailler comme directrice d’établissement scolaire pour des écoles primaires, des collèges et des lycées. Elle se souvient qu’elle a toujours eu un profond intérêt sur ce qui transforme les gens et les rend ce qu’ils sont. Cette passion l’a amenée à travailler avec les sans-abri. En 2003, un ami l’a informée qu’il organisait un groupe de « retraite dans la rue » à Austin.
« En deux secondes, je me suis dit : ‘J’y vais.’ C’était totalement un acte de foi », se rappelle Mme Knotts.
Inspirée par son humilité et son honnêteté, elle est sortie avec cette équipe pour vivre parmi les sans-abri pendant 72 heures.
Judith Knotts et le groupe sont sortis sans argent, carte de crédit ni téléphone. Elle n’avait qu’un sac à dos et n’avait aucune idée de ce qui l’attendait. Cette expérience l’a profondément marquée.
« Cela a changé ma vie. J’ai maintenant une toute nouvelle vision d’un monde dont je ne connaissais pas l’existence », explique-t-elle.
Mme Knotts a été surprise de l’environnement dans lequel les sans-abri vivent. L’image de personnes enjambant une femme itinérante dormant sur du carton, sur le trottoir d’une ruelle, lui est restée collée. Les sans-abri étaient également gentils avec elle et lui ont appris des choses comme où trouver de l’eau.
Elle a découvert à quel point ces gens sont résilients ; après trois jours et trois nuits, Judith admet avoir été physiquement et émotionnellement épuisée. Mais cela n’était rien comparé à la période indéfinie que les sans-abri endurent dans la rue.
Relations
Judith estime et continue d’estimer chaque sans-abri comme une personne plutôt qu’une statistique, et considère comment elle peut agir pour aider. N’ayant pas peur, elle passe du temps avec les sans-abri et les écoute. Sans être indiscrète avec ses questions, elle engage la conversation avec eux et tente d’offrir une oreille amicale.
Bien qu’elle ne passe plus de nuit dans la rue avec les sans-abri, elle passe deux jours par semaine à les nourrir et elle les garde à l’oeil ; qu’ils soient sous les autoroutes ou dans la rue.
Tout au long de son engagement auprès de la communauté des sans-abri, elle a développé des relations profondes. Une expérience qui lui est restée gravée à la mémoire est celle d’un sans-abri qui s’est approché de sa voiture. Elle a baissé sa fenêtre et mis sa main gauche dehors.
L’homme n’a pas demandé d’argent ni de nourriture. Il lui a simplement pris la main et a raconté comment il avait passé sa journée à travailler et combien il était seul. Elle a obtenu son nom, et ensuite, il est allé dans les bois vers la tente où il vivait. Tragiquement, dans les nécrologies du lendemain, elle a appris qu’il était mort d’une overdose.
« J’ai réalisé que j’étais la dernière personne à l’avoir vu », se souvient Judith.
L’homme n’avait pas demandé d’argent ni de nourriture, il était juste dans des circonstances terribles, a-t-elle déclaré.
Un autre sans-abri dont Judith s’est liée d’amitié n’avait pas de jambes et était en fauteuil roulant. Alors qu’au commencement, il appréhendait légèrement de lui parler, avec le temps une amitié s’est développée. Un jour, sa couverture a glissé et Judith a remarqué qu’il avait un couteau. Il lui a alors expliqué que c’était le seul moyen qu’il avait pour se protéger. Judith lui a rendu visite régulièrement dans sa dernière année de vie, avant que lui aussi ne meure d’une overdose.
« [Nous étions] deux personnes [venant] de deux côtés opposés du monde. Nous sommes devenus de très bons amis », a-t-elle déclaré. « Je le pleure. Je le pleure vraiment. Il m’a très peu demandé, et m’a beaucoup donné. »
Leçons apprises
Judith a beaucoup appris de son expérience avec ces deux hommes et les sans-abri en général. Elle a découvert qu’au fond, tous les gens sont les mêmes. Nous sommes tous des êtres humains.
« C’est l’humanité qui nous lie », a-t-elle partagé.
Elle a également réalisé à quel point les sans-abri peuvent être gentils, généreux et résilients. Alors que souvent elle donnait un sandwich à un sans-abri, homme ou femme, à son tour, celui-ci le donnait à un autre sans-abri qui en avait davantage besoin. Par-dessus tout, elle a compris que tout le monde veut être aimé.
La société blâme souvent les sans-abri pour leur situation, mais les causes de l’itinérance sont nombreuses, explique-t-elle.
Si certains ont été abandonnés par leur famille ou maltraités, d’autres sont pris avec la dépendance aux drogues et à l’alcool, ou souffrent de maladies mentales. Beaucoup ont un emploi, mais sont incapables de gagner suffisamment pour se loger. D’autres n’ont pas accès à l’éducation ou viennent d’être libérés de prison, ce qui rend encore plus difficile la recherche d’un emploi. Il arrive également que ce soit une blessure traumatique qui rende la personne incapable de travailler. Les catastrophes naturelles peuvent également contraindre les gens à vivre dans la rue.
« Il y a tellement de raisons et nous devons nous pencher sur chacune de ces personnes sans domicile fixe et nous demander quel est leur problème. Pourquoi sont-ils ici, comment puis-je les aider en tant qu’individu ? » déclare Judith.
La société ignore largement la population des sans-abri parce que cette situation est peu attrayante, et les gens en font abstraction dans leur esprit. De plus, il est difficile pour une personne ordinaire de s’imaginer devenir sans-abri.
Cependant, parfois il suffit d’un seul événement catastrophique pour que quelqu’un tombe à la rue. Par exemple, alors que Judith se trouvait dans un camp de sans-abri, elle a rencontré un jeune garçon. Celui-ci lui a demandé si elle se souvenait de lui, elle ne l’avait pas reconnu. En fait, il avait été un de ses anciens élèves.
« Ce n’est pas seulement la classe inférieure, ou des personnes sans éducation, qui deviennent sans-abri. Nous pourrions tous, d’un jour à l’autre, devenir sans-abri », a-t-elle dit.
Écrivant pour l’Austin American-Statesman depuis 2008, beaucoup d’articles de Judith Knotts ont porté sur l’itinérance. Afin d’attirer l’attention sur ce problème, Mme Knotts a compilé une série de 34 articles et nouvelles dans un livre intitulé You Are My Brother » : Lessons Learned Embracing a Homeless Community (« Tu es mon frère : Leçons apprises sur mon intégration au sein d’une communauté de sans-abri »). Elle espère que les lecteurs commenceront à mieux comprendre les sans-abri dans leurs villes, et comment les aider.
« J’espère que les yeux [des lecteurs] seront ouverts et que leur cœur s’ouvrira », a déclaré Mme Knotts.
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