Le 10 juillet, un rapport sénatorial exposait le « danger » du salafisme en France. Tel un pavé jeté dans la mare de la République, ses auteurs dénoncent « l’inaction coupable des pouvoirs public », s’alarment sur la montée du salafisme et préconisent 63 mesures pour contrer une menace « endogène ».
Les sénateurs Bernard Cazeau (LREM) et Sylvie Goy-Chavent (Union centriste), qui ont piloté le rapport, ont pris acte du renforcement et de l’adaptation des moyens de l’État mais estiment que le «traitement de la menace terroriste souffre de réelles insuffisances».
Un chiffre retient l’attention dans le rapport : entre 215 et 2017, 4 000 enfants ont été déscolarisés dans les quartiers sensibles. Il ne s’agirait pas de « décrochage scolaire » : ces enfants seraient tout simplement « scolarisés à domicile », mais sans aucun contrôle de la part des autorités. Passant sous le radar de l’administration publique, une partie des parents est rappelée à l’ordre, et d’autres sont totalement ignorés.
Caroline est prof dans les quartiers nord de Marseille. Lors d’une interview à Paris Match, elle se livre sur son quotidien. « Même si l’école est obligatoire jusqu’à 16 ans, les parents reçoivent des recommandés du Conseil général pour absentéisme puis une convocation chez les flics pour un rappel à la loi. Ce qui ne sert à rien ; les familles s’en désintéressent au point de ne même pas venir aux réunions de prérentrée… Sur nos 60 élèves (15 par classe), il n’y a que trois parents qui y assistent ! ».
Elle évoque des collégiens laissés livrés à eux-mêmes avec leurs grands frères de cités. Dans l’indifférence des parents, et sans que l’Éducation nationale puisse y apporter de réponse.
Ce n’est pas le premier rapport insistant sur le manque de contrôle de la part de l’administration. Deux députés, Anne Brugnera et George Pau-Langevin, par ailleurs ex-secrétaire d’État à la réussite éducative, ont rappelé très récemment le rôle des maires pour surveiller ces situations.
Et parmi ces enfants « hors radar », d’après ces députés, certains n’ont tout simplement jamais vu une salle de classe. Certains sont inscrits sur deux registres, certains ne sont pas du tout inscrits. Ils passent par le « trou du filet ». Car si chaque enfant scolarisé possède un « identifiant national élève », un enfant radié d’une école doit être inscrit dans une autre école qui est supposée exiger un certificat de radiation de l’école précédente. « Le caractère contradictoire de ces deux obligations entraîne leur non-application » avec de nombreuses doubles inscriptions mais aussi des enfants qui sortent des radars », d’après le rapport des députés.
D’après la commission sénatoriale, c’est une des causes permettant de dire que le salafisme est « enraciné en France ». Elle dénombre entre 40 000 et 60 000 adeptes du courant salafiste en France, et préconise 63 propositions relevant de domaines très divers, de l’éducation au pénal en passant par le renseignement ou la coopération extérieure.
Parmi elles : encourager l’expulsion des fichés S (pour sûreté de l’État) radicalisés de nations «returnees», création des pôles de lutte contre l’islam radical dans chaque département, application aux détenus pour terrorisme binationaux de la déchéance de nationalité.
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