Y-a-t-il des responsabilités politiques dans la faillite retentissante de la société de paiements Wirecard ? « Non », a vigoureusement répondu jeudi le ministre allemand des Finances Olaf Scholz, passé sur le gril à propos de ce scandale sans précédent sur lequel devra aussi s’expliquer Angela Merkel.
La commission d’enquête parlementaire sur cette vaste fraude présumée touche cette semaine au coeur du pouvoir avec l’audition d’une série de ministres, avant celle, vendredi, de la chancelière elle-même.
Scandale financier
Jeudi, le ministre des Finances a reconnu que l’affaire Wirecard était « le plus grand scandale financier » ayant jamais secoué l’Allemagne, tout en assurant que « la responsabilité de cette fraude criminelle à grande échelle n’incombe pas au gouvernement ».
La chute de la start-up, longtemps coqueluche de la bourse, est une tache dans le bilan de M. Scholz, candidat des sociaux-démocrates aux législatives de septembre.
Jeune société de paiements dématérialisés à la croissance fulgurante, Wirecard s’est retrouvée l’épicentre d’une gigantesque fraude quand ses dirigeants ont admis que 1,9 milliard d’euros inscrits dans les comptes n’existaient pas. La société a été mise en liquidation fin août.
L’affaire a mis en lumière des « manquements qui convergent vers un point central, la Bafin », le régulateur financier allemand, dénonce le député conservateur Matthias Hauer, membre de la commission d’enquête.
Or cette instance de supervision est placée sous la houlette du ministère des Finances.
Ventes à découvert
Elle est notamment mise en cause pour avoir interdit les ventes à découvert sur le titre Wirecard, entre février et avril 2019, afin d’empêcher la dégringolade du titre déclenchée par des allégations de malversations dans la presse économique.
Cette initiative a contribué à dissimuler la fraude pendant des mois, accusent les critiques.
Mais il s’agissait d’une « décision de la Bafin », a insisté Olaf Scholz, assurant que son ministère n’avait fait que l’entériner. Il affirme n’avoir eu à l’époque « aucun indice prouvant qu’il ne s’agissait pas d’une bonne décision ».
Le ministre a néanmoins admis que le régulateur financier n’avait pas tous les moyens d’une supervision efficace.
« Avec ce que nous savons aujourd’hui, il est clair que les missions de surveillance et de contrôle n’étaient pas bien armées », a-t-il déclaré, rappelant que des réformes avaient été engagées. Le directeur de la Bafin a également été remplacé.
Révélation de courriels
L’audition du ministre a été marquée par la révélation de courriels concernant l’affaire, envoyés depuis son adresse mail personnelle, alors qu’il avait précédemment assuré ne communiquer que via sa messagerie professionnelle.
Dans cette recherche de responsabilités, teintée d’arrière-pensées politiques, le ministre a observé que les auditeurs de la multinationale du conseil financier EY ont approuvé dix ans durant les comptes de Wirecard.
Ce qui rejaillit sur le ministère de l’Economie, tenu par les conservateurs, tutelle de l’autorité de surveillance des cabinets d’audit (Apas).
Les lacunes de leur travail ont été recensées dans une récente expertise remise à la commission d’enquête.
Surveillance défaillante
Si l’Apas « n’a pas été performante alors le ministre (de l’Economie, Peter Altmaier) n’a pas non plus fait correctement son travail », estime le député libéral Florian Toncar.
Le chef de l’Apas a par ailleurs été mis à pied en décembre pour avoir spéculé à titre privé sur des actions Wirecard au moment où la société était soupçonnée d’irrégularités.
Angela Merkel sera interrogée vendredi sur un voyage officiel qu’elle a effectué en Chine en 2019, embarquant des responsables de la fintech qui cherchaient des entrées auprès des autorités chinoises.
Etait-il approprié de « placer Wirecard sous sa protection lors de ce voyage ? », se demande le député Franz Schäffler, alors que des alertes commençaient à circuler.
Discussion sur Wirecard à Pékin ?
Interrogé sur la question, Olaf Scholz a assuré n’avoir de son côté « eu aucune discussion sur l’entreprise Wirecard » à Pékin.
Le dirigeant de Wirecard, Markus Braun, est incarcéré depuis cet été dans le sud de l’Allemagne, dans le cadre d’une vaste enquête judiciaire menée par le parquet.
Parmi les premiers à comparaître devant la commission d’enquête à l’automne, cet Autrichien de 51 ans a refusé de s’exprimer.
Son ancien bras droit, Jan Marsalek est en fuite depuis des mois. De nombreuses informations de presse le présentent comme un interlocuteur de divers services de renseignement, dont ceux de la Russie.
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