Le préfet de Mayotte va imposer de nouvelles restrictions d’accès à l’eau pour tenter de préserver les maigres réserves de l’île de l’océan Indien, victime d’une grave sécheresse, jusqu’à la prochaine saison des pluies en fin d’année.
Depuis des mois déjà, l’eau potable n’est distribuée aux 300.000 habitants du département français qu’au compte-gouttes : le robinet d’une partie d’entre eux est coupé tous les jours de 16h00 à 8h00 du matin, celui des autres trois fois par semaine pendant vingt-quatre heures.
« Des coupures de 48 heures toutes les 24 heures »
Insuffisant pour tenir jusqu’à aux prochaines pluies, a tranché jeudi le représentant de l’État, Thierry Suquet. À partir de lundi, il y aura « des coupures de 48 heures toutes les 24 heures » dans l’ensemble de l’île, a-t-il annoncé devant la presse. À Mamoudzou, Koungou ainsi qu’en Petite-Terre, l’eau sera coupée toutes les nuits, de 16h00 à 8h00 avant une coupure de trente-six heures une fois par semaine « afin de garantir la continuité de l’activité économique sur ces zones », a détaillé Thierry Suquet.
L’approvisionnement de Mayotte dépend essentiellement des eaux pluviales : 80% de l’eau provient de deux retenues collinaires et des cours d’eau. En raison de la sécheresse qui y règne depuis plusieurs mois, la retenue de Dzoumogné, au nord de l’île, n’est remplie qu’à 14%, celle de Combani, au centre, à 24%, selon Météo France. Le reste de l’approvisionnement est assuré par des forages en eaux souterraines (environ 15%) et une usine de dessalement, qui ne produit actuellement qu’au tiers de ses capacités prévues.
La vidange complète des deux retenues attendue fin septembre
« On s’aperçoit aujourd’hui que les prélèvement faits dans les retenus collinaires sont trop importants », a expliqué le préfet, ajoutant que les travaux d’urgence lancés par le syndicat des eaux, notamment pour augmenter la production de l’usine de dessalement ne seraient effectifs qu’au début novembre.
« Donc pour réussir à passer le mois d’octobre, nous sommes obligés de prendre de nouvelles mesures », a insisté M. Suquet. « Sans la mise en place de nouvelles restrictions et au rythme des prélèvements actuels, la vidange complète des deux retenues était attendue fin septembre ». Lorsque les deux retenues seront à sec, la préfecture estime que l’île ne produira que « 20.000 m³ par jour », soit moins de la moitié de ses besoins en eau. Les écoles et les établissements de santé ne seront pas soumis aux coupures, a précisé le préfet.
Le plan d’urgence « réalisé beaucoup plus lentement que prévu »
En 2017, un plan d’urgence avait déjà été lancé à l’initiative du gouvernement à l’issue d’une sécheresse qui avait causé un rationnement drastique de l’eau. Il prévoyait la réhabilitation de huit forages, la construction d’une usine de désalinisation dans les dix-huit mois et une troisième retenue collinaire, attendue depuis des années, devait voir le jour fin 2020. Mais « ce plan a été réalisé beaucoup plus lentement que prévu », a expliqué sous couvert d’anonymat à l’AFP un ingénieur, spécialisé en gestion de l’eau. L’extension de l’usine de dessalement de Petite Terre aurait dû être réalisé beaucoup plus tôt. « Des travaux ont été entrepris sur le réseau mais les investissements dans des usines de production pour augmenter les capacités n’ont pas suivi », poursuit l’ingénieur.
Aujourd’hui, les seules mesures d’urgence mises en place sont la régulation du prix des bouteilles d’eau et l’augmentation de leur stock, notamment via des livraisons de La Réunion et de l’île Maurice. « Aucune mesure n’a été prise pour aider les plus faibles. Celles et ceux qui n’ont pas les moyens d’aller acheter des bouteilles d’eau », s’est emportée la député Estelle Yousouffa (Liot) dans une vidéo diffusée sur Facebook jeudi. « Je demande une distribution gratuite pour que les familles puissent faire des stocks », a ajouté la parlementaire.
L’Agence régionale de santé (ARS) a averti il y a quelques semaines que l’eau courante était « impropre à la consommation » juste après les coupures. Selon l’ingénieur, leur multiplication « favorise la prolifération de bactéries ». Le ministre délégué aux Outre-mer Philippe Vigier est attendu la semaine prochaine à Mayotte. L’île attire chaque année des milliers de migrants clandestins en provenance des Comores voisines, qui s’entassent dans des bidonvilles insalubres. Près de 30% de la population de Mayotte n’a pas d’accès direct à l’eau.
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