La commission des Affaires économiques du Sénat a livré mercredi un rapport accablant dans l’affaire des steaks hachés frauduleux fournis à des associations caritatives.
Début juin, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait révélé que des steaks hachés de très mauvaise qualité avaient été fournis en France à des associations d’aide aux plus démunis, tout en écartant un quelconque risque sanitaire.
Ce sont les associations qui avaient alerté les autorités début mars sur la présence de tâches brunâtres suspectes sur les steaks hachés fournis grâce au Fonds européen d’aide aux plus démunis (Fead).
Ce rapport indique que l’origine de la viande est impossible à déterminer, des contrôles insuffisants, un État « défaillant ».
.@JocelyneGuidez (@UC_Senat) interroge @AgnesRunacher sur le scandale des faux steaks hachés
“L’Etat ne devrait-il pas mieux imposer la prise en compte du critère lié à la qualité dans l’attribution de ses marchés ?”#QAG #DirectSénat pic.twitter.com/Klbm1fRXbr— Sénat (@Senat) June 11, 2019
« Personne ne peut aujourd’hui déterminer l’origine de la viande contenue dans les steaks hachés distribués dans le cadre du marché public incriminé. Tous les auditionnés, les entreprises concernées comme les administrations, ont confirmé qu’il leur était impossible de garantir que l’origine des carcasses utilisées par l’industriel était polonaise », annonce ce rapport.
Les steaks hachés, censés ne contenir que du muscle selon la législation en vigueur, « contenaient quand même de l’estomac, des amygdales, du cartilage, des cœurs de bœuf, du soja, de l’amidon et des morceaux de viande déjà transformés », a déclaré le rapporteur Fabien Gay (CRCE à majorité communiste) à l’agence France Presse (AFP).
« On demande à nos agriculteurs de tracer chaque bête, chaque morceau de viande, on est en train de passer un traité de libre-échange avec le Canada (Ceta), où on nous dit « il n’y a pas de problème, la traçabilité sera assurée ». Et aujourd’hui, au sein de l’Union européenne, avec un marché public, on produit de la viande dont on ne connaît pas la traçabilité », s’insurge-t-il.
Cet événement grave a concerné, pour les Banques alimentaires, 480 tonnes de viande, soit 9 millions de steaks.
« Plus de cinq millions de personnes, en France, sont susceptibles d’avoir accès à l’aide alimentaire. C’est une population extrêmement importante et très sensible, ce qui rend d’autant plus scandaleux ce qui vient de se passer », relève dans le rapport Patrice Blanc, président des Restos du Cœur.
Parmi les 18 recommandations du rapport, l’amélioration du cahier des charges des appels d’offres figure donc au premier rang.
Sa première piste consiste à « mettre en place un critère de traçabilité sur les matières premières utilisées pour produire les denrées Fead dans les appels d’offres ».
L’appel d’offres du Fead concernait près de 1 500 tonnes de steaks hachés surgelés pour la somme de 5,2 millions d’euros.
Affaire des « faux » steaks hachés distribués aux plus démunis : pour la #ComAfEcoSénat, la réaction de l’État n’était pas à la hauteur.
Pour éviter qu’une telle situation ne se reproduise, la commission propose 18 recommandations opérationnelles.
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Le rapporteur du texte a également dénoncé « des trous dans la raquette et des défaillances lourdes des autorités de l’État concernant les contrôles ».
« Depuis deux ans, on ne demande plus les tests gustatifs pour les steaks hachés », indique M. Gay, selon qui ces contrôles moindres constituent pour négociants et traders « une incitation à la course aux prix, au détriment de la qualité ».
Il dénonce par ailleurs un manque de moyens de FranceAgriMer, opérateur public chargé de l’achat des denrées alimentaires financées par le Fead, et va jusqu’à évoquer « une négligence » de l’État.
« Malgré des alertes à répétition portant sur l’industriel polonais produisant les steaks hachés depuis des années, notamment en 2015 au sujet de la présence de salmonelles, le dernier contrôle sur place par l’administration date par exemple de 2013 alors que les services sont censés contrôler chaque industriel au moins une année sur deux », déplore dans un communiqué la commission des affaires économiques du Sénat.
« Depuis plusieurs années (…), les Banques alimentaires alertent leurs tutelles sur le fait qu’elles ont toujours affaire aux mêmes traders, que l’on ne voit pas apparaître de processus clair de certification, d’assurance qualité, de politique de responsabilité sociale des entreprises (RSE) ni de traçabilité », a déploré Jacques Bailet, président du réseau des Banques alimentaires, lors d’une audition citée dans le rapport.
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