Thaïlande : Poy Sang Long, un rite de passage perpétué par l’ethnie Shan de Birmanie

Par Epoch Times avec AFP
11 avril 2025 10:15 Mis à jour: 11 avril 2025 10:25

Des garçons défilent autour d’un temple après s’être fait raser la tête : cette cérémonie vieille de plusieurs siècles est propre aux Shan de Birmanie, dont des centaines de milliers ont trouvé refuge en Thaïlande au cours des décennies de dictature et de troubles qu’a connu leur pays.

Vêtus de robes chatoyantes, de bijoux et de coiffes florales, une quarantaine de garçons font trois fois le tour du temple Ku Tao de Chiang Mai (nord) sur les épaules de leurs proches, au rythme des gongs traditionnels.

Cette photographie prise le 28 mars 2025 montre de jeunes garçons de l’ethnie Shan portant des robes aux couleurs chatoyantes et des coiffes colorées, portés par les membres de leur famille lors de la procession annuelle Poy Sang Long. (MANAN VATSYAYANA/AFP via Getty Images)

Des moines leur ont au préalable rasé la tête, faisant tomber leurs touffes de cheveux sur des feuilles de lotus.

Cette photographie prise le 27 mars 2025 montre Saenghan, 12 ans, un jeune garçon de l’ethnie Shan se faisant raser la tête par un moine bouddhiste à la veille de la procession annuelle Poy Sang Long au temple Wat Ku Tao, dans la province de Chiang Mai, dans le nord de la Thaïlande. (MANAN VATSYAYANA/AFP via Getty Images)

La procession attire des centaines de spectateurs, et de nombreux policiers assurent la sécurité.

« Ordonner les fils bien-aimés »

« J’ai pris cette décision moi-même (…) Je suis heureux », a déclaré Donlaphat Lungta, neuf ans, dont les parents ont émigré de Birmanie. Il est né en Thaïlande, où l’ethnie Shan est connue sous le nom de Tai Yai.

Ce rite de passage nommé « Poy Sang Long » (« ordonner les fils bien-aimés » en langue shan), est une cérémonie vibrante de trois jours pour ces garçons, avant qu’ils ne commencent une vie monastique pour une période de trois jours à un mois. Ce rite de passage est censé apporter mérite et chance.

Considérés comme des étudiants de Bouddha

« Les garçons qui participent à cette tradition sont considérés comme des étudiants de Bouddha. C’est un événement profondément méritoire », détaille à l’AFP Chaiya Kongcheun, président de l’Association pour l’éducation et la culture Tai Yai.

Cette photographie prise le 27 mars 2025 montre de jeunes garçons de l’ethnie Shan se reposant à la veille de la procession annuelle Poy Sang Long. (MANAN VATSYAYANA/AFP via Getty Images)

Leur tenue rappelle celle d’un prince historique de Birmanie, explique-t-il, tandis que le fait d’être porté sur les épaules de quelqu’un représente le pouvoir et un statut semi-divin.

Cette photographie prise le 28 mars 2025 montre de jeunes garçons de l’ethnie Shan portant des robes aux couleurs chatoyantes et des coiffes fleuries lors de la procession annuelle Poy Sang Long. (MANAN VATSYAYANA/AFP via Getty Images)

Pour Nu Lungta, le père de Donlaphat, la cérémonie représente un investissement précieux dans l’avenir de son fils, des années après qu’il l’a lui-même vécue.

De lourdes dépenses pour cette célébration

Cet homme de 40 ans, un livreur de légumes, a estimé ses dépenses pour la célébration à 150.000 bahts (environ 3.935 euros), nourriture et décorations comprises.

Une cinquantaine de membres de sa famille l’ont aidé à couvrir les coûts, précise-t-il en observant un moine raser la tête de son fils, avant d’expliquer qu’il aurait choisi de reporter la cérémonie s’il n’avait pas été financièrement possible de la célébrer comme il se doit.

« J’espère qu’il deviendra un homme bon et serviable, sans jamais profiter des autres », confie-t-il à l’AFP.

Cette photo prise le 27 mars 2025 montre Sukit Luangla, un jeune garçon de l’ethnie Shan âgé de neuf ans, portant une robe blanche après s’être fait raser la tête à la veille de la procession annuelle Poy San Long. (MANAN VATSYAYANA/AFP via Getty Images)

Chaque nuit, les garçons âgés de sept à 12 ans et leurs familles dorment dans des cabines adossées au temple, entourées de ballons colorés et d’ornements arc-en-ciel.

Avant l’aube, Donlaphat a enfilé plusieurs robes blanches scintillantes, et a été soulevé successivement sur les épaules de ses proches pour le cortège, tandis que ses parents marchaient à ses côtés.

Cette photographie prise le 28 mars 2025 montre de jeunes garçons de l’ethnie Shan portant des robes chatoyantes et des coiffes florales colorées, portés par les membres de leur famille lors de la procession annuelle Poy Sang Long. (MANAN VATSYAYANA/AFP via Getty Images)

« Le peuple Tai Yai a fui la guerre »

L’instabilité politique et les décennies de conflits en Birmanie ont poussé de nombreux membres de l’ethnie Shan à chercher refuge dans la Thaïlande voisine, attirés par des similitudes culturelles et linguistiques.

« Le peuple Tai Yai a fui la guerre pour trouver la paix en Thaïlande », raconte Chaiya Kongcheun.

Il précise que le royaume a connu une augmentation de l’immigration Shan après le coup d’État militaire de 2021 et la guerre civile qui a suivi, l’État Shan en étant l’une des régions les plus touchées.

La cérémonie de Poy Sang Long a lieu en mars et avril à divers endroits du nord de la Thaïlande. La ville de Chiang Mai abrite l’une des plus grandes communautés Shan du pays.

Cette photographie prise le 28 mars 2025 montre de jeunes garçons de l’ethnie Shan portant des robes aux couleurs chatoyantes et portés par des membres de leur famille lors de la procession annuelle de Poy Sang Long. (MANAN VATSYAYANA/AFP via Getty Images)

« Cela restera toujours notre culture »

Nu Lungta a déclaré se sentir pleinement intégré à la société thaïlandaise. « Pour moi, la Thaïlande c’est chez moi (…) mon fils est né ici », affirme-t-il Mais pour de nombreux Shan, le lien avec leur terre natale reste fort.

Mokam Lungkuna, une ouvrière du bâtiment de 35 ans qui a amené son fils de neuf ans, Thanwa, pour être ordonné, vit en Thaïlande depuis deux décennies. « Mon coeur est dans l’État Shan », confie-t-elle à l’AFP, alors que résonnent les roulements de tambour au cours de la cérémonie. « Cela restera toujours notre culture. »

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