Travailler autrement : les recettes du coworking

26 septembre 2016 16:00 Mis à jour: 27 septembre 2016 22:26

En mai dernier, Wework, licorne américaine du coworking pesant 16 milliards d’euros, déposait ses valises à Paris en investissant dans un immeuble au 33 rue Lafayette. Dans le marché de ces espaces de travail alternatifs, la capitale française figure en bonne place : d’après le site Bureauxàpartager.com, 396 espaces de travail dédiés au coworking y coexistent. L’engouement pour ces nouvelles structures, désormais évident, témoigne d’une évolution des modes de travail mais également d’un marché de l’immobilier de bureaux qui peine à répondre à la demande de flexibilité des jeunes entreprises.

Différents modèles économiques existent sous la bannière du coworking : il y a le café-bureau proposant wifi-café illimité à 4 euros de l’heure, les espaces subventionnés par les groupes immobiliers ou encore les plateformes de mise en relation telles que Bureaux À Partager ou Le Spot Multiburo. Tous ces acteurs surfent sur la même vague : l’explosion du travail indépendant. Freelances, auto-entrepreneurs, startupeurs, cadreS et cadres sup constituent le cœur de cible de ces espaces. D’après Eurostat, le nombre de travailleurs indépendants a augmenté de 85% entre 2004 et 2013.

La moyenne des prix s’élève à 350 euros par poste et par mois, contre 225 euros en province.

Un même constat revient souvent, pour les professions indépendantes et jeunes entreprises : une installation peut s’avérer complexe et coûteuse. D’après Christophe Lameignère, cofondateur du café coworking Le 10H10, « la première chose qu’un banquier vous demande, c’est l’adresse de vos locaux. Or, pour louer des bureaux, il faut des garanties financières. À partir du moment où on n’a pas trois bilans, une maison à mettre en garantie, c’est compliqué ». De plus, les baux de locaux proposés couvrent plusieurs mois voire années : difficile à envisager lorsque l’avenir est encore incertain.

La détente, c’est du sérieux

Un espace de coworking, c’est un peu comme un univers parallèle. Chez Nextdoor, filiale du groupe Bouygues Immobilier, le rez-de-chaussée combine salle de réunion, bar, espace « console de jeux », douches, bibliothèque et terrasses ouvertes. L’espace propose des solutions de bureaux privatifs toutes charges comprises avec boîte aux lettres et accès 24h/24h pour ses colocataires. La détente et le chill-out sont prises très au sérieux : tout est fait pour se sentir chez soi.

Car le « bien-être au travail » est définitivement une recette gagnante. L’idée est de mettre à l’aise le professionnel, prompt à cumuler des dizaines d’heures derrière un écran d’ordinateur, en proposant confort, animation et rencontres pro. Philippe Gastaud, consultant en stratégie marketing digital, a adopté la formule. « Il me fallait un espace de travail autre que la maison. J’ai cherché soit un bureau dans une agence de com’ et de pub parce que c’est là d’où je viens, mais j’avais peur d’être trop enfermé avec les mêmes profils que le mien. Je voulais justement un endroit où il y avait des profils différents, des entrepreneurs différents avec des personnes qui pourraient peut-être m’apporter quelque chose sur le commercial, sur la partie comptable ou sur les métiers que je ne connais pas. Et moi en retour, je pouvais offrir mon expertise en marketing. Il me fallait donc un endroit assez identifié », témoigne-t-il, ajoutant trouver dans l’espace de coworking « tous les avantages de la vie en communauté sans les inconvénients ».

Paris, spot mondial de coworking ?

D’après une enquête de Bureaux À Partager, Paris serait bien l’un des plus gros spots de coworking du monde. Une concentration d’espaces qui s’explique en partie par le programme spécifique d’aides à destination des créateurs des espaces de coworking. Pourtant, cette concentration s’arrête aux portes du périphérique ; la région Île-de-France semble bien dépourvue, à l’exception des Hauts-de-Seine et particulièrement à La Défense. Le Val-de-Marne et la Seine-Saint-Denis sont quant à eux presque désertés.

Nuage Café. À l’étage, pièces intimes avec moquette et coussins à ras-le-sol.
Nuage Café. À l’étage, pièces intimes avec moquette et coussins à ras-le-sol.

Pourtant, le marché existe : d’après une étude de 2015 menée par Deskmag et Socialworkplaces.com auprès d’une soixantaine d’opérateurs de coworking (soit 10 à 15% du marché), 60% des sondés estiment qu’il y a « trop peu » d’espaces en France aujourd’hui. Les prix d’installation sont néanmoins plus élevés qu’en province : d’après l’étude de Bureaux À Partager, la moyenne des prix s’élève à 350 euros par poste et par mois, contre 225 euros en province. Les offres de coworking-café, généralement moins fournies au niveau des heures d’ouvertures et des services proposées, sont un peu moins chères sur la capitale, de l’ordre de 250 euros mensuels.

La rentabilité des espaces de coworking progresse à ce jour lentement pour de nombreux arrivants. « Sur le plan financier, est-ce que le café coworking sera le modèle de demain, cela reste encore à voir », analyse Emmanuel Watrinet, cofondateur du Nuage Café. Une observation partagée dans le métier : d’après l’étude de Deskmag et Socialworkplaces.com, 50% des opérateurs de coworking ne font pas de bénéfices pour le moment, et 30% commencent à être rentables. Pour Christophe Lameignère, du 10H10, c’est « un business qui n’est pas très juteux mais qui s’équilibre très vite ». « La marge réalisée n’est pas énorme, mais c’est sa répétition qui est importante et permet de faire des bénéfices », continue-t-il.

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